• La Maison Blanche se réjouit que les éléphants ne soient pas montés aux arbres


    Moon of AlabamaMoon of Alabama

    Par Moon of Alabama – Le 29 juin 2017

     

    Les responsables de l’administration Trump reculent sur leur projet de perpétrer une fausse attaque d’armes chimiques en Syrie annoncé par la Maison-Blanche.
     
    Les États-Unis ne manquent pas de raisons de vouloir accuser le gouvernement syrien d’utiliser des armes chimiques, par contre le gouvernement syrien n’a absolument aucune raison logique de vouloir en utiliser. La Russie et la Syrie réclament depuis longtemps l’envoi d’inspecteurs d’armes chimiques sur la base aérienne dont l’administration Trump prétend qu’elle est au centre de son conte de fées « chimique ». Les États-Unis ont empêché les inspecteurs d’y aller. Les allégations étasuniennes n’avaient donc aucune réalité.

     

     
    La façon dont l’annonce de la Maison Blanche a été faite, sans que les agences concernées en aient connaissance et avec très peu d’implication des directeurs d’agences, était tout simplement idiote. On aurait dit une idée suggérée par Netanyahou à l’écolier Kushner qui aurait ensuite convaincu son beau-père de faire cette annonce grotesque. Maintenant, la Maison Blanche est obligée d’envoyer des officiels affirmer que « l’avertissement » de la Maison Blanche était sensé, avec le pire argument que l’on ait jamais utilisé.
     
    « Les éléphants ne sont pas montés aux arbres. Grâce à nos avertissements, affirment-ils, les arbres ont été sauvés ! . »
     
    « Il semble qu’ils prennent notre avertissement au sérieux, a déclaré Mattis. Ils n’ont pas perpétré d’attaques chimiques », a-t-il déclaré aux journalistes qui voyageaient avec lui pour aller à une réunion des ministres de la défense de l’OTAN à Bruxelles.
     
    Il n’a présenté aucune autre preuve que le fait qu’une attaque n’avait pas eu lieu.
     
    ***
    « Je peux vous dire que grâce à ce que le président a fait, il n’y a pas eu d’incident », [a déclaré l’ambassadeur des États-Unis à l’ONU, Nikki] Haley au Comité des affaires étrangères de la Chambre lors d’une audience, mardi. […]
    […]
    « J’aime à penser que le président a sauvé de nombreux hommes, femmes et enfants innocents. », a poursuivi Haley.
     
    Haley « aimerait penser » beaucoup de choses – malheureusement, elle n’en est pas capable. Un peu plus tard, elle a publié un tweet typiquement égocentrique sur le maintien de la paix des Nations Unies qui augmentera sûrement le statut politique américain dans le monde :
     
    « Ça ne fait que 5 mois que nous sommes là. Nous avons déjà réduit notre contribution au maintien de la paix des Nations Unies d’un demi-milliard et ce n’est qu’un début ! »
     
     
    Je peux même convenir avec Haley que le maintien de la paix de l’ONU est devenu n’importe quoi. Que des troupes mandatées par l’ONU répandent le choléra en Haïti et violent femmes et enfants dans les pays qu’ils traversent ne plaide pas en leur faveur. Mais la façon de mettre fin à cela est de cesser de leur donner des mandats pour de telles missions. Exiger, au Conseil de sécurité de l’ONU, l’envoi de forces de maintien de la paix insuffisantes / sous-payées tout en réduisant leur budget est irresponsable. Cela corrompra encore plus les troupes et leur comportement empirera.
     
    Les forces de maintien de la paix des Nations Unies ont souvent été l’instrument de la politique étrangère américaine. En réduisant leur budget, les États-Unis et Haley réduisent leurs propres options politiques.
     
    « L’avertissement » de la Maison Blanche, sur lequel elle a dû revenir en moins d’une journée, a le même résultat. Les gens croiront de moins en moins ce que disent les États-Unis et se conformeront de moins en moins à leurs exigences. Ces deux déclarations successives ont limité leurs futures options stratégiques.
     
    L’administration Trump va-t-elle finir par regretter ce genre de déclarations ?

  • Russie politics

     

    L'ouverture d'une Représentation de DNR en France

    Posted: 30 Jun 2017 08:46 AM PDT

    N. Nikonorova (ministre des affaires étrangères de DNR) et C. Borelli
     
     
    Lors de leur séjour dans la République populaire de Donetsk (voir notre texte), les élus français ont signé un protocol d'accord de coopération entre la DNR et la France. Ainsi, une représentation de la jeune république s'ouvre à Marseille, montrant ainsi toute la distance qui sépare le "pouvoir officiel" des inclinations diverses et variées que l'on retrouve dans le paysage politique français.
     


    La France a pour tradition, semble-t-il aujourd'hui d'un point de vue historique, de défendre les victimes contre les bourreaux, position humaniste qui a permis le rayonnement français dans le monde durant de nombreux siècles. Cette politique a pris fin, certainement jugée trop coûteuse pour un Etat confiné dans l'Union européenne, soumis à la domination d'une autre culture, américaine, devenue dominante grâce aux renoncements successifs et nombreux. 
     
    Cet abandon de terrain a des conséquences en politique internationale, où la voix de la République française est devenue tellement faible, qu'elle est inaudible dès qu'elle oserait ne plus se faire l'échos de ce qui est attendu d'elle.
     
    C'est ainsi que dans cet ignoble conflit ukrainien, à la suite des Etats Unis et de l'Union européenne, la France a décidé de défendre les putschistes contre les populations résistantes. C'est ainsi que la position officielle de la France est la négation des atrocités commises dans le Donbass par l'armée ukrainienne. C'est ainsi que la France, dans l'OTAN, cautionne l'aide apportée par ce bras armé des intérêts atlantistes aux différents bataillons extrémistes ukrainiens et à l'armée régulière (puisqu'ils sont entremêlés) par l'envoi d'instructeurs, d'armes non létales, de cartes de l'OTAN - à un pays qui n'en fait pas partie et qui est meurtri par une guerre civile.
     
    C'est pour toute ces raisons que non seulement la France ne reconnaît pas la République de Donetsk, ce qui est compréhensible politiquement, mais n'apporte aucune aide aux populations civiles touchées - ce qui est ici impardonnable.
     
    La délégation des trois élus français composée de H. Fayard, C. Pujol et C. Borelli ont, lors de leur séjour à Donetsk, signé un protocole de coopération avec la jeune république, renouant ainsi avec les traditions humanistes de notre pays et ont institué, à l'instar de ce qui existe déjà en Grèce ou en Italie, un centre de la Représentation de la République populaire de Donetsk en France.
     
     
    Les réactions dans la presse ukraienne furent assez virulentes, ce à quoi l'on pouvait s'attendre. Pour la petite histoire, ce fut également l'occasion d'apprendre que le Ministère des affaires étrangères français n'a pas ... d'adresse électronique (Sic). Telle fut en effet la réponse apportée à M. Pujol, lorsque celui-ci a demandé un rendez-vous pour présenter la jeune république aux instances officielles françaises.
     
     
     
    Savourons cet épisode de notre diplomatie nationale avec A. Jarry:
     
    "La princesse reste rigide;
    Et, passant sur son front algide,
    Tous les ouragans des effrois
    Lancent au ciel ses cheveux droits"

     


  • Chronique d’une attaque chimique annoncée

    Par Elijah Magnier – Le 28 juin 2017 – Source son compte Twitter

    Note du Saker Francophone
    Sur son compte Twitter, Elijah Magnier, analyste politique et correspondant de guerre qui compte plus de 30 ans d'expérience à son actif, répond à trois questions bien précises au sujet d'une attaque éventuelle des USA contre la Syrie, qui est accusée de préparer une (autre) attaque à l'arme chimique.

    Pourquoi les USA veulent–ils accuser Assad de recourir à des armes chimiques ?

    Assad et ses alliés ont stoppé les forces étasuniennes à al-Tanaf, en faisant fi de leur avertissement et en leur bloquant la route. Ces forces et leurs mandataires inefficaces sont dorénavant isolés.

     

    – Assad et ses alliés ont imposé un lien entre leurs forces armées et les Forces de mobilisation populaire (FMP) irakiennes, de l’autre côté de la frontière. C’est justement pour empêcher ce lien que les USA ont occupé al-Tanaf.

    – Assad et ses alliés veulent continuer leur poussée vers Deir Ezzor, afin de libérer entre 100 000 et 150 000 civils encerclés par Daech. Les USA n’objecteraient pas à ce que Daech prenne Deir Ezzor, pour pouvoir plus tard la « libérer » de Daech avec leurs mandataires kurdes (Forces démocratiques syriennes/Unités de protection du peuple kurde – FDS/YPG).

    – Assad et ses alliés se sont imposés dans le sud et ont déjoué les tentatives d’Israël d’amener al-Qaïda (AQ) à prendre le dessus. Les USA ont intérêt à ce que Daraa tombe aux mains d’AQ afin d’imposer des « forces de maintien de la paix », au grand dam de la Russie et de Damas.

    – Les USA ont sommé le Premier ministre irakien Haidar al Abadi d’empêcher les FMP d’atteindre la frontière syrienne. Abadi n’arrivera pas nécessairement à imposer sa volonté aux FMP, car la sécurité de l’Irak ne peut être assurée tant que Daech peut passer librement d’un pays à l’autre. Si cela arrive, les USA seront furieux.

    – Les USA veulent imposer une nouvelle règle d’engagement, car leurs messages (bombarder l’armée syrienne et ses alliés à répétition et abattre un avion) ont été entendus et ignorés par Damas.

    Pourquoi Assad utiliserait-il des armes chimiques ?

    – L’Armée arabe syrienne (AAS), la Russie et leurs alliés l’emportent sur tous les fronts contre Daech et l’Armée syrienne libre (ASL, mandataires des USA) à al-Badiyah (Jaych Ossoud al-Charkiya, etc.).

    – L’AAS et ses alliés ont bloqué la route aux forces étasuniennes à al-Tanaf, les ont contournées et ont fermé la route vers le Nord-Est.

    – L’AAS et ses alliés progressent rapidement dans les territoires occupés par Daech, en poussant leurs forces vers al-Sukhnah et sur d’autres fronts dans le but d’atteindre Deir Ezzor, afin de briser le siège que Daech impose à cette ville depuis 30 mois.

    – L’AAS tire profit d’un cessez-le-feu généralisé dans bon nombre de villes et de zones, ce qui permet à ses forces et à ses alliés de consacrer plus de troupes à la lutte contre Daech.

    – L’AAS a stoppé al-Qaïda dans le sud de la Syrie malgré l’aide militaire israélienne.

    – L’AAS utilise l’aéroport de al-Shua’yrat qui se trouve au cœur de toutes les opérations militaires dans la région rurale de Homs et à al-Badiya (steppe syrienne).

    Conclusion – L’utilisation d’armes chimiques ne ferait que nuire aux progrès d’Assad et à son avantage sur tous les fronts, y compris sur le plan politique à Astana (dont les pourparlers reprendront le mois prochain).

    Que se passera-t-il si la Russie décide de rétorquer à un bombardement de l’armée syrienne ou de sa force aérienne par Trump ?

    – De Damas et Hmeimim, les forces aériennes russes et syriennes attaquent le sud (Daraa).

    – De l’aéroport militaire de al-Shuay’rat, l’AAS et la Russie attaquent Daech.

    – Trump accuse Assad de « préparer une attaque chimique à partir de Shuay’rat ». Au nord de la Syrie, il y a cessez-le-feu tacite avec al-Qaïda, Ahrar al-sham et autres.

    – Trump va-t-il bombarder l’armée syrienne ou sa force aérienne pour défendre « l’État islamique » ?

    – Assad « se prépare à utiliser des armes chimiques » contre quelles forces au Nord ?

    Conclusion – Le bombardement de l’armée syrienne par Trump ne repose sur aucun motif. Il en a donc inventé un. Mais ce sera un véritable casse-tête pour la Russie. Si Moscou ne réagit pas ou qu’Assad ne lance pas des missiles antiaériens, les deux paraîtront très faibles.

    Trump a-t-il réfléchi à l’autre possibilité ? (Qu’arrivera-t-il si la Russie réagit ?).

    Traduit par Daniel, relu par Catherine pour le Saker Francophone