• A LIRE , INTERESSANT =

    Dimanche 12 août 2012 7 12 /08 /Août /2012 10:58


    Par DESIRS D'AVENIR HERAULT

    Les Français douteraient de Hollande : ce que dissimule le sondage du Figaro

    Nouvel Observateur. 11-08-2012. Thierry de Cabarrus


    attention sondages

    LE PLUS. Le Figaro a publié un sondage Ifop tentant de montrer que François Hollande n’a plus la confiance des Français. Mais pour notre chroniqueur Thierry de Cabarrus, ce n'est rien de plus qu'une interprétation fausse et partisane des chiffres, qui prouve une fois de plus que l'on peut faire dire ce que l'on veut aux sondages.

    Je le sais, on l’a souvent dit et répété. Et pourtant, ça me met toujours en colère quand j’en ai une nouvelle preuve sous les yeux : on peut tout faire dire à un sondage, et même l’exact contraire des "informations" qu’il donne sur ce que pensent vraiment les Français.

     

    Prenez par exemple le dernier sondage Ifop commandé par Le Figaro. Il n’a pas d’autre objectif que de dire à nos concitoyens ceci : François Hollande a mangé son pain blanc, les Français ne lui font plus confiance, c’en est fini de l’état de grâce de l’exécutif, cent jours à peine après son arrivée au pouvoir. Et pourtant, c’est faux et je m’en explique.

     

    Le président a tenu parole


    Il suffit d’analyser cette enquête d’opinion dans le détail pour constater qu’au contraire, nos concitoyens reconnaissent que le nouveau président a tenu parole et que les premières mesures qu’il a prises sont satisfaisantes pour la grande majorité d’entre eux : retour à la retraite à 60 ans (d’accord à 71%), baisse de son salaire et de celui de son premier ministre (d’accord à 82%), encadrement des loyers (d’accord à 68%), hausse de l’impôt sur la fortune (d’accord à 67%), hausse du Smic (d’accord à 59%), retrait des troupes d’Afghanistan (d’accord à 75%).

     

    Ces résultats essentiels, qui se retrouvent dans le corps de l’article du Figaro, n’empêchent pas le quotidien de titrer : "Hollande : le doute s'installe chez les Français".

     

    Or, pour justifier cette mise en perspective partisane, le journal s’appuie sur des questions posées à caractère général et qui ne mettent pas en cause personnellement le président de la République.

     

    Un pessimisme général


    Il s’agit en fait de mettre en relief le pessimisme de nos concitoyens ou plus simplement leur lucidité à l’égard d’une crise que François Hollande, en trois mois, n’a ni provoquée ni bien sûr aggravée.

     

    Alors, c’est vrai : 51 % des Français estiment que la situation en France est en train de changer "plutôt en mal", quand 17 % seulement pensent que les choses s’améliorent. Jérôme Fourquet, directeur du département Opinion et Stratégies d'entreprise de l'Ifop en conclut dans Le Figaro :

     

    "Dans ce climat très pessimiste et au regard des marges de manœuvre limitées qui existent, la confiance accordée à François Hollande et son gouvernement dans différents domaines est systématiquement minoritaire".

     

    Et de décliner des chiffres à consonance négative : 40 % "seulement" ont plutôt confiance dans l’exécutif pour trouver des solutions à la crise de la zone euro, 33 % pour réduire la dette, 31 % pour lutter efficacement contre la désindustrialisation et 27 % pour faire reculer le chômage.

     

    Ce pan d'analyse permet au quotidien de sensibilité de droite de claironner :

     

    "46 % des Français seulement se déclarent satisfaits de l'action de François Hollande, cent jours après son élection, le 6 mai. Le président, qui n'a pas bénéficié d'un état de grâce comparable à celui de ses prédécesseurs, n'a pas non plus convaincu de sa capacité à 'redresser' le pays, pour reprendre son principal slogan de campagne".

     

    Si le lecteur se contente de lire ce paragraphe, s’il n’a pas le temps ni la curiosité d’aller plus loin et de pondérer son jugement par la lecture des résultats qui montrent que François Hollande a tenu ses engagements, il gardera une vision parcellaire, déformée et partisane de ce sondage.

     

    Les habitudes partisanes de la presse de droite


    Le site d’Europe1, de son côté, fait un résumé encore plus négatif dans les premières lignes de son article consacré au sondage Ifop, ce qui, pour un lecteur pressé, aura des conséquences sur son interprétation :

     

    "Dans cette étude réalisée 100 jours après l'élection, écrit le site, seules 3% des personnes interrogées sont "très satisfaites" de l'action du chef de l'Etat et 43% "plutôt satisfaites". Elles sont en revanche 38% à se dire "plutôt mécontentes" et 16% "très mécontentes" de ses débuts à l'Elysée".

     

    Or, ces quelques lignes apparaissent sous un titre particulièrement spectaculaire malgré son point d’interrogation qui sert à préserver une apparence de neutralité: "Fin de l’État de grâce pour Hollande ?

     

    Cette méthode journalistique, qui consiste à vouloir frapper l’opinion, quitte à transformer la réalité d’une information, a en principe deux objectifs souvent liés : pousser le lecteur à lire l’article mais aussi parfois lui délivrer une information partisane.

     

    Il suffit, pour s’en convaincre, de reprendre le sondage Ifop-Le Figaro et de le comparer avec la précédente étude d’opinion, réalisée par le même institut le 10 juillet dernier, mais pour Paris-Match, cette fois. D’abord le titre de l’hebdomadaire est pratiquement le même que celui du Figaro.

     

    Ensuite, l’information :

     

    "Terminé le mini-état de grâce qui prévalait entre les deux tours des législatives, écrit Paris-Match. Pour François Hollande, la chute est brutale, – 7 points, même si sa cote reste largement majoritaire, à 56 %".

     

    N’importe quel commentateur impartial écrirait que le président, deux mois après sa prise de fonction, dispose encore d’une majorité d’opinions confortables même si cette dernière a baissé. D’ailleurs, l’analyste est obligé d’écrire : "Il est vrai que la crise, profonde, change la donne"…

     

    "Un état de gravité dès les départ"


    En fin d’article et sous une avalanche de tableaux tous plus négatifs les uns que les autres, Jean-Luc Parodi, directeur de recherche à la Fondation nationale des sciences politiques et consultant à l’Ifop , rétablit la vérité et reconnaît que François Hollande "garde cependant une cote majoritaire et ses traits d’image, même en baisse, restent élevés".

     

    C’est en fait systématiquement du côté des analyses réalisées par les sondeurs eux-mêmes qu’il faut se tourner pour ne pas tomber dans le piège qui consisterait à se contenter de lire des chiffres ne reflétant qu’une partie de la réalité.

     

    "Il n'y a pas eu d'état de grâce mais un état de gravité, dès le départ", révèle ainsi de manière lumineuse Stéphane Rozès, politologue et président de la société Conseils, analyses et perspectives (CAP). Cette phrase à la fois honnête et capitale pour la compréhension du sondage du Figaro est une pépite noyée au quatrième chapitre d'un article-fleuve publié sur le site zonebourse qui évoque une possible stratégie de rentrée de François Hollande.

     

    En conclusion, le sondage du Figaro, repris par le site d’Europe1, au delà se son exploitation partisane, enfonce des portes ouvertes. Les Français, nous dit-il, sont pessimistes face à la crise. Celle-ci ne se résoudra pas d’un coup de baguette magique. Et ça n'a rien à voir avec la couleur politique du  président qu’ils se sont choisis. Autant de révélations qu'on connaissait déjà.

     

    Tags Tags : , , , ,