• C'EST LONG , MAIS SUPER INTERESSANT =

    Comité de soutien à François Hollande dans la Vienne

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    François Hollande était l'invité de Jean-Jacques Bourdin sur BFMTV et RMC jeudi 19 avril. Il est notamment revenu sur son parcours, racontant son enfance, sa découverte de la politique, le 21 avril 2002 et sa campagne depuis sa candidature aux primaires socialistes.

     

    L'intégralité de l'échange entre François Hollande et Jean-Jacques Bourdin

     

    Jean-Jacques BOURDIN

    J -3, dans trois jours le premier tour de la présidentielle. Nos entretiens d’embauche s’achèvent sur RMC et BFM TV : demain Marine LE PEN, 8 heures 20 / 9 heures, et ce matin François HOLLANDE est notre invité. Bonjour.

    François HOLLANDE

    Bonjour.

    Jean-Jacques BOURDIN

    Il y a une phrase que vous avez prononcée plusieurs fois François HOLLANDE et qui m’intéresse. « Ne pas faire carrière est la meilleure façon de réussir. »

    François HOLLANDE

    Oui.

    Jean-Jacques BOURDIN

    Oui ?

    François HOLLANDE

    Je me suis dit ça tout au début de ma vie. C'est-à-dire que j’avais la volonté de faire de la politique. J’avais fait ce choix très tôt. J’ai eu un engagement pour la gauche, le Parti socialiste, celui de François MITTERRAND très jeune.

    Jean-Jacques BOURDIN

    On va en parler.

    François HOLLANDE

    Mais je ne me suis pas dit, voilà : « Un jour, je serai candidat à l’élection présidentielle et je vais y mettre tous les moyens. » J’ai fait en sorte de franchir toutes les étapes. Je voulais être élu député, je considérais que c’était le mandat qui me permettait de faire de la vie politique en définitive mon accomplissement, et puis ensuite, chaque fois que j’ai eu une mission, un mandat, je l’ai accompli pour le réussir de façon à ce que je puisse un jour prétendre, sans être obsédé par ça.

    Jean-Jacques BOURDIN

    Alors nous allons parler de votre carrière. Vous êtes né à Rouen, août 1954. Famille bourgeoise, catholique, un père médecin ORL, une mère assistante sociale. Votre père a fait un jour de la politique, un peu de politique, puis il était très engagé à droite – extrême droite même…

    François HOLLANDE

    L’Algérie française, mon père.

    Jean-Jacques BOURDIN

    L’Algérie française, oui. Il défendait l’OAS.

    François HOLLANDE

    Oui.

    Jean-Jacques BOURDIN

    Et vous aviez cinq ans en 1959 : il est battu aux municipales à Rouen, je crois. Quatorze ans : la famille déménage à Neuilly. Le lycée, le bac, licence de droit, vous êtes à la tête de l’UNEF. Science Po, HEC, en 1974 vingt ans. Là, je m’arrête sur un moment de votre jeunesse : le service militaire. Est-il vrai que vous avez voulu faire votre service militaire pour ne pas nuire justement à une future carrière politique ?

    François HOLLANDE

    J’avais été dispensé de service national à cause d’une vue qui n’était pas suffisamment garantie, donc lorsque je suis entré à l’ENA, j’ai demandé à repasser la visite médicale pour faire mon service. Ça m’a été accordé et la visite a reconnu que je pouvais faire le service. Pourquoi je me suis mis…

    Jean-Jacques BOURDIN

    Oui. Vous aviez dans la tête l’idée d’une carrière politique.

    François HOLLANDE

    Oui. Je ne suis pas sûr qu’aujourd'hui dire : « J’ai fait mon service militaire » alors qu’il a été supprimé est un argument électoral de poids. Mais je rentrais dans l’administration, je devenais fonctionnaire, j’allais être membre de la haute fonction publique. J’avais un devoir de faire en sorte que, si je pouvais physiquement faire mon service national, je l’effectue. Alors quand j’ai été voir, pour tout vous dire, le général ou le colonel pour demander cette dérogation, il m’a dit : « Mais écoutez, profitez de votre chance. Vous allez gagner un an dans la vie. Vous allez pouvoir faire une carrière encore plus longue. » J’ai dit : « Non. Je veux faire ce service national. » Et je l’ai fait dans les conditions, j’allais dire, de tous les autres élèves de l’ENA. Je suis parti à Coëtquidan, puis après à Angers, puis après à Rouen. Et j’ai été très heureux de cette période. J’ai beaucoup appris, et pas simplement pour savoir ce qu’était l’armée mais ce qu’étaient les hommes, en l’occurrence qui étaient sous mes ordres et qui étaient des gens très modestes qui, eux, n’avaient pas eu le choix. Qui venaient faire le service parce que c’était la règle. Ils n’avaient pas de dispense possible et ceux-là ils m’ont donné le témoignage de leur engagement et de leur courage.

    Jean-Jacques BOURDIN

    L’ENA, la rencontre avec Ségolène ROYAL. Quatre enfants, vous devenez conseiller à l’Élysée en 1981 – vous avez vingt-sept ans. Vous vous lancez en politique vraiment, ce qui ne vous empêche pas d’enseigner à Sciences Po de 88 à 92. Elu député de Corrèze donc en 1988 et vous n’entrez pas au gouvernement car Ségolène ROYAL devient ministre et François MITTERRAND refuse de voir un couple au gouvernement. C’est cela ?

    François HOLLANDE

    Oui, c’est ce qui a été dit, mais je ne pense pas que c’était juste, d’ailleurs. François MITTERRAND n’était pas complètement convaincu que je puisse rentrer au gouvernement. J’avais critiqué l’entrée de TAPIE.

    Jean-Jacques BOURDIN

    Ah bon ?

    François HOLLANDE

    Oui, dans le gouvernement.

    Jean-Jacques BOURDIN

    Et pourquoi ?

    François HOLLANDE

    Parce que je considérais que ce n’était pas sa place d’être dans un gouvernement de gauche. Et comme en plus…

    Jean-Jacques BOURDIN

    Vous ne vouliez pas être dans le même gouvernement que Bernard TAPIE ?

    François HOLLANDE

    On ne m’avait pas proposé de rentrer au gouvernement…

    Jean-Jacques BOURDIN

    Oui.

    François HOLLANDE

    Donc je considérais tout simplement que ce n’était pas ce que j’avais voulu justement comme engagement à gauche que d’avoir TAPIE dans un gouvernement. Et en plus, JOSPIN sortait du gouvernement et je considérais que, au moment où TAPIE rentrait et JOSPIN sortait, c’était un mauvais symbole.

    Jean-Jacques BOURDIN

    Mais Lionel JOSPIN qui devient Premier ministre plus tard ne vous propose pas non plus d’entrer au gouvernement ?

    François HOLLANDE

    Ah ! alors là, ça a été – nous sommes en 97, la dissolution a eu lieu, j’étais porte-parole du Parti socialiste, nous étions très liés Lionel JOSPIN et moi.

    Jean-Jacques BOURDIN

    Vous choisissez le Parti socialiste, là.

    François HOLLANDE

    Lionel JOSPIN me dit : « Voilà. Je te propose d’être Premier secrétaire. C’est la plus belle mission que je puisse t’offrir parce que tu vas travailler avec moi, Premier ministre. On va être l’un et l’autre associé. » Nous sommes dans une période de cohabitation ; nul ne sait comment ça va se terminer. Il m’a dit : « Si tu ne le souhaites pas, si tu veux un autre destin, tu entres au gouvernement Tu choisis. Est-ce que tu veux être le Premier secrétaire qui va avoir une mission pendant cette période élevée ? ou tu vas être un bon ministre du gouvernement. » J’ai choisi d’être Premier secrétaire.

    Jean-Jacques BOURDIN

    Bien. 21 avril 202. Il y a cette défaite de Lionel JOSPIN au premier tour. [Il tousse] Pardon, ça arrive, je perds ma voix. Je sais que vous avez des problèmes de voix aussi.

    François HOLLANDE

    J’ai des problèmes. Je vous donnerai quelques conseils.

    Jean-Jacques BOURDIN

    D’accord, d’accord. 21 avril 2002 donc, Lionel JOSPIN est éliminé au premier tour. Ça vous a profondément marqué.

    François HOLLANDE

    Imaginez cette situation – je crois que vous pouvez le faire. Je suis proche de Lionel JOSPIN. Je l’accompagne jusqu’au moment de l’élection présidentielle. À aucun moment, et je vous l’assure, nous ne voyons surgir LE PEN à ce niveau. C’est pourquoi dix ans après : méfiance.

    Jean-Jacques BOURDIN

    C’est pour ça que je posais la question.

    François HOLLANDE

    Personne ne voit. Tous les sondages… On parle beaucoup…

    Jean-Jacques BOURDIN

    Aujourd'hui personne ne voit ce qui va se passer dimanche, François HOLLANDE ?

    François HOLLANDE

    Mais bien sûr que personne ne voit. Vous vous rendez compte ? Je vais donner cette information aux auditeurs.

    Jean-Jacques BOURDIN

    Oui.

    François HOLLANDE

    J’avais des enquêtes d’opinion jusqu’au jeudi avant le premier tour qui mettaient Lionel JOSPIN à 18 et LE PEN à 13 ou à 14. Ça se finit Lionel JOSPIN à 16 – et un peu plus – et LE PEN à 17. Trois points qui ont bougé dans un sens et trois points dans un autre : ça fait que LE PEN est qualifié au second tour, pas JOSPIN.

    Jean-Jacques BOURDIN

    Ça veut dire que les sondages d’aujourd'hui ne veulent rien dire ?

    François HOLLANDE

    Ça veut dire qu’ils donnent une indication qui peut finalement être faussée de trois ou quatre points. Si celui qui est supposé être au premier tour perd trois ou quatre points, et celle qui n’est pas supposée être au second tour en gagner trois au quatre, eh bien vous savez…

    Jean-Jacques BOURDIN

    Vous n’êtes assuré de rien.

    François HOLLANDE

    Je ne suis assuré de rien et personne – tant mieux d’ailleurs – personne ne peut dire ce que va être ni l’ordre d’arrivée, ni le niveau des uns et des autres. Et je ne parle pas du troisième ou du quatrième.

    Jean-Jacques BOURDIN

    On va en parler.

    François HOLLANDE

    Mais je reviens sur cette soirée-là.

    Jean-Jacques BOURDIN

    Oui.

    François HOLLANDE

    À vingt heures, parce qu’on l’a su très tard, quand Lionel JOSPIN me confie que non seulement il vit cette situation avec douleur – on peut l’imaginer – mais qu’il va arrêter la vie politique et qu’il va l’annoncer le soir même aux Français, je suis Premier secrétaire, je sais ce qui va arriver : je vais être seul. Et j’ai été seul pour assumer toute la suite. Seul parce qu’il fallait bien dire le soir ou le lendemain que j’allais appeler mon Parti à voter Jacques CHIRAC, parce que c’était le candidat de la République contre l’ennemi de la République, l’extrême droite, celui qui mettait en cause ses valeurs. Et puis je me retrouve à la tête d’un Parti pleinement, avec, vous imaginez, une déception, une désillusion, une peur même de l’avenir. Eh bien j’ai redressé tout ça et je me suis forgé une conviction. C'est-à-dire que face à l’adversité, ce qui compte c’est de tenir bon et de ne rien lâcher.

    Jean-Jacques BOURDIN

    Alors 2005, moment difficile…

    François HOLLANDE

    Oui.

    Jean-Jacques BOURDIN

    Parce qu’une partie du Parti socialiste vote non au traité d’européen et là, après, vous ne les sanctionnez pas. Vous ne sanctionnez pas ceux qui ont voté non. Pourquoi ?

    François HOLLANDE

    Je les écarte de la direction, mais pourquoi je ne l’ai pas fait ?

    Jean-Jacques BOURDIN

    Pourquoi, oui ?

    François HOLLANDE

    Et pourquoi je ne le regrette pas ? parce que rien n’est pire qu’un Parti qui se divise et qui ensuite se sépare. Le Parti socialiste, c’est la force d’alternance. S’il n’était pas là, finalement face à l’UMP ou face au Front National, qui pourrait aujourd'hui représenter l’avenir ? On peut aimer ce Parti, on peut dire que la gauche n’a pas fait tout bien mais l’alternance, elle est profondément inscrite dans notre vie politique. Donc en ne séparant pas les uns par rapport aux autres, en ne faisant pas une scission, j’assume cette décision parce qu’elle me permet aujourd'hui d’être le candidat du Parti socialiste. De ceux qui ont voté oui et de ceux qui ont voté non. Autour de moi dans cette campagne –j’ai voté oui, donc j’assume cette décision – j’ai Laurent FABIUS, j’ai Jean-Pierre CHEVENEMENT, j’ai Robert HUE : ils avaient tous voté non. Eh bien aujourd'hui, ils sont derrière moi pour la campagne présidentielle.

    Jean-Jacques BOURDIN

    François HOLLANDE, j’ai une question directe à vous poser.

    François HOLLANDE

    Allez-y.

    Jean-Jacques BOURDIN

    Est-ce qu’en 2007, vous vous êtes effacé devant Ségolène ROYAL ?

    François HOLLANDE

    Je ne me suis pas effacé devant Ségolène ROYAL parce qu’elle était à l’époque ma compagne. Je me suis effacé devant Ségolène ROYAL parce que je considérais que les Français voulaient Ségolène ROYAL, et ils l’ont montré dans la primaire à l’époque réduite, mais ils voulaient Ségolène ROYAL comme candidate et que je n’avais pas pu l’être moi-même à cause de ce qui s’était produit lors du référendum de 2005. Il y a un moment, c’est le rôle d’un responsable politique de savoir s’il est en situation ou s’il n’est pas en situation. Je n’étais pas en situation. Je le suis aujourd'hui.

    Jean-Jacques BOURDIN

    Il y a un an, un peu plus d’un an, vous vous déclarez candidat. Est-ce que vous vous souvenez des moqueries il y a un an ? de ceux qui disaient : « Ah, ah ! François HOLLANDE candidat ? Non mais c’est Dominique STRAUSS-KAHN qui sera notre candidat ! » Vous vous souvenez de cela ?

    François HOLLANDE

    Je n’oublie rien.

    Jean-Jacques BOURDIN

    Oui.

    François HOLLANDE

    C'est-à-dire que cette idée que c’était forcément Dominique STRAUSS-KAHN qui devait être le candidat, je n’y ai jamais pensé. Non pas parce que j’avais en tête - je ne sais ce qui allait se produire – mais parce que…

    Jean-Jacques BOURDIN

    Vous ne saviez rien.

    François HOLLANDE

    Rien, à l’évidence.

    Jean-Jacques BOURDIN

    Vous n’aviez aucune indication, aucune information. Rien !

    François HOLLANDE

    Aucune. Mais personne ne l’avait, sinon c’eût été communiqué. Mais parce que j’étais convaincu à tort, à raison, que dans les primaires citoyennes j’aurais gagné. Je ne me suis pas lancé dans la campagne présidentielle pour figurer, pour négocier. Je me suis lancé dans la campagne présidentielle parce que je pensais que je pouvais gagner l’élection présidentielle.

    Jean-Jacques BOURDIN

    François HOLLANDE, il y a une phrase aussi que j’ai remarquée et qui a été beaucoup commentée : « Je n’aime pas les riches. Je n’aime pas les riches, j’en conviens. » Vous diriez toujours la même chose aujourd'hui ? 

    François HOLLANDE

    Non. Je ne le dirais pas de la même manière. Je n’aime pas la richesse indécente. Je n’aime pas la richesse héritée. Je n’aime pas la richesse arrogante.

    Jean-Jacques BOURDIN

    Mais vous, le représentant de la gauche caviar : c’est ce que disait Nicolas SARKOZY hier encore. Vous êtes le représentant de la gauche caviar ?

    François HOLLANDE

    Mais vous vous rendez compte… Je l’ai entendu bien sûr.

    Jean-Jacques BOURDIN

    Oui. Oui.

    François HOLLANDE

    Moi, vous avez dit, moi mes racines sont la petite bourgeoisie, la bourgeoisie. Mon père était médecin, ma mère assistante sociale. Je n’ai hérité de rien, ma mère est morte il y a maintenant deux ans : elle ne m’a pas laissé une fortune. J’habite un quartier, le XVème arrondissement…

    Jean-Jacques BOURDIN

    Vous payez quoi ? 6-7 000 euros d’impôt par an ? 10 000 euros à peu près.

    François HOLLANDE

    Oui, un peu moins. Une permanence à Tulle, voilà ma situation. J’ai d’ailleurs donné toute ma fortune – enfin, mon patrimoine ! - l’état de mes revenus, tout. Et je me fais appeler gauche caviar ? Regardez où d’autres habitent. Regardez comment ils vivent. Regardez leur train de vie, leurs revenus, leur patrimoine. Je n’accepte pas. Je reconnais ce que je suis. Je ne suis pas une personne de catégorie modeste, je ne suis pas comme les autres Français. J’ai un revenu de parlementaire, je suis une personne aisée, mais me faire traiter de gauche caviar par celui qui aujourd'hui est l’incarnation de la richesse insolente ? Non. Et qui a ses amis… Les amis ça compte beaucoup dans la vie. On les choisit, ses amis.

    Jean-Jacques BOURDIN

    On va en parler.

    François HOLLANDE

    Regardez avec qui je suis et regardez, si je puis m’exprimer, avec qui il est.

    Jean-Jacques BOURDIN

    On va en parler de vos nouveaux amis. Ils reviennent, là.

    François HOLLANDE

    Ce ne sont pas des amis, ceux-là.

    Jean-Jacques BOURDIN

    « Ce ne sont pas des amis. » Alors justement, tiens, tous ceux qui reviennent : Fadela AMARA, Martin HIRSCH il a toujours été socialiste, mais d’autres qui reviennent vers, qui viennent vers vous, qui se tournent vers vous. « Transhumance saisonnière des moutons », vous savez qui a dit ça ?

    François HOLLANDE

    Oui.

    Jean-Jacques BOURDIN

    C’est François BAYROU. Il a raison ?

    François HOLLANDE

    D’abord je n’ai rien sollicité, rien demandé, rien négocié. Ces personnes veulent voter pour moi ; et je vais dire quoi ? « Ne venez pas surtout. Ecartez-vous, laissez-moi tranquille. » Mais réfléchissons une seconde. Nous avons perdu les élections présidentielles en 2007. Ça veut dire que les Français majoritairement ils ont voté Nicolas SARKOZY. C’est un fait. Est-ce que je vais dire aux Français qui ont voté Nicolas SARKOZY la dernière et qui n’ont plus envie de le faire – ils sont un certain nombre : « Surtout ne venez pas. Surtout ne venez pas gêner le mouvement que j’organise parmi la gauche parce que je ne veux rester qu’avec des électeurs qui la dernière fois ont voté Ségolène ROYAL. » Ce serait absurde de le dire : aucune chance de gagner l’élection présidentielle. Pour que je devienne – je ne sais ce qu’il va se produire – pour que je devienne le prochain président, il convient que des électeurs qui ont pu se tromper en votant Nicolas SARKOZY la dernière fois fassent un autre choix cette fois-ci. Et moi je ne repousse personne. En revanche, je suis socialiste, je suis de gauche et je gouvernerai avec la gauche.

    Jean-Jacques BOURDIN

    On va en parler.

    François HOLLANDE

    Il n’y aura pas d’ouverture.

    Jean-Jacques BOURDIN

    Il n’y aura pas d’ouverture ?

    François HOLLANDE

    Non pas que je veuille ici écarter un certain nombre de…

    Jean-Jacques BOURDIN

    Votre Premier ministre sera un Premier ministre de gauche.

    François HOLLANDE

    Mon Premier ministre sera socialiste.

    Jean-Jacques BOURDIN

    Il sera socialiste. C’est clair.

    François HOLLANDE

    Voilà. Donc je dis tout, je ne cache rien. Et en même temps…

    Jean-Jacques BOURDIN

    Est-ce que vous pensez que… Oui. Allez-y. Allez-y.

    François HOLLANDE

    Le lendemain de l’élection présidentielle, si je suis élu, il y aura 48-49 % des Français qui n’auront pas voté pour moi. Je ne vais pas leur jeter un sort, les montrer du doigt, leur dire que je les stigmatise. Non. Je les associerai aussi non pas par un gouvernement, mais je les associerai aussi à la reconstruction et au redressement du pays.

    Jean-Jacques BOURDIN

    Est-ce que vous pensez que François BAYROU se prépare à être le Premier ministre de Nicolas SARKOZY ?

    François HOLLANDE

    Je n’en sais rien. Ça le regarde et s’il le fait, je ne le jugerai pas mal. Ça veut dire qu’il se sera retrouvé dans la démarche, dans les idées, dans les propositions de Nicolas SARKOZY. C’est son problème.

    Jean-Jacques BOURDIN

    Et Jacques CHIRAC. Est-ce que ça ne vous choque pas qu’on fasse voter Jacques CHIRAC alors que lui-même ne dit rien ?

    François HOLLANDE

    Moi, écoutez, je n’ai pas non plus sollicité ce type de…

    Jean-Jacques BOURDIN

    Vous n’avez aucun signe ? Aucun signe ?

    François HOLLANDE

    Je n’ai aucun signe. Je n’ai pas rencontré Jacques CHIRAC depuis…

    Jean-Jacques BOURDIN

    Ni sa fille, ni ses proches ?

    François HOLLANDE

    Personne. Vous vous rappelez de cette fameuse scène, que j’avais d’ailleurs plutôt regardée comme un trait d’humour, et pas comme un engagement. Je n’ai jamais voulu instrumentaliser, récupérer. Jacques CHIRAC, je l’ai combattu pendant toute une partie de ma vie. La première élection…

    Jean-Jacques BOURDIN

    Vous vouliez même fermer son musée.

    François HOLLANDE

    La première élection à laquelle…

    Jean-Jacques BOURDIN

    Non, c’est vrai ?

    François HOLLANDE

    Non. Je trouvais que le musée avait coûté fort cher.

    Jean-Jacques BOURDIN

    Il coûte toujours fort cher.

    François HOLLANDE

    Oui, et c’est le conseil général de la Corrèze qui l’assume. Voilà, mais on a fait des économies…

    Jean-Jacques BOURDIN

    C'est vous qui payez, oui. Et vous allez le fermer ou non ?

    François HOLLANDE

    Non, sûrement pas. C’est un équipement d’ailleurs très beau avec des œuvres qui sont tout à fait intéressantes mais la première élection à laquelle je me suis présenté en 1981, j’avais vingt-six ans, le candidat qui était en face de moi c’était Jacques CHIRAC. Et tout au long de ma vie, j’ai été souvent confronté à lui et quand j’étais Premier secrétaire du Parti socialiste avec Lionel JOSPIN Premier ministre, nous avions en face de nous Jacques CHIRAC président de la République. Mais j’ai toujours respecté la personne, parce que je considère que dans la vie politique, on peut ne pas être d’accord, on peut avoir quelquefois des mots qui dépassent les pensées, mais il y a un respect qui doit être dit à la personne qui a dirigé la France. Et si Nicolas SARKOZY avait eu le même respect à l’égard de Jacques CHIRAC, il n’y aurait pas aujourd'hui ces insinuations ou suppositions.

    Jean-Jacques BOURDIN

    Hier à votre place, ici-même, Nicolas SARKOZY a reproposé l’organisation de deux débats entre les deux tours, deux face à face. Vous êtes toujours contre ?

    François HOLLANDE

    D’abord j’ai dit qu’avant un premier tour, mieux vaut s’occuper du premier tour.

    Jean-Jacques BOURDIN

    Entre les deux qualifiés, évidemment. 

    François HOLLANDE

    Oui, mais personne ne sait qui seront les deux qualifiés. Vous vous imaginez ? Je vous répondrais en disant : « D’accord. Faisons deux débats, trois débats, quatre débats », je ne sais combien, et puis je ne suis pas au second tour. J’aurais l’air de quoi ?

    Jean-Jacques BOURDIN

    Non mais si vous êtes au second tour ?

    François HOLLANDE

    Si je suis au second tour, il y aura un grand débat.

    Jean-Jacques BOURDIN

    C'est tout ?

    François HOLLANDE

    C’est tout. Mais un grand débat qui durera le temps qu’il sera nécessaire.

    Jean-Jacques BOURDIN

    Mais pourquoi pas deux débats ?

    François HOLLANDE

    Mais pourquoi pas trois ?

    Jean-Jacques BOURDIN

    Ce qui permettrait d’éclairer les Français, mieux peut-être.

    François HOLLANDE

    Mais pourquoi pas trois ? pourquoi pas quatre ? Moi j’ai toujours été favorable à ce qu’il y ait des débats avant le premier tour. Si Nicolas SARKOZY avait voulu débattre avec moi, y compris dans cette campagne du premier tour, nous aurions pu le faire. Rien ne nous gênait. Il y aurait eu sans doute des temps d’antenne qui auraient dû être répartis différemment pour les autres. Donc pourquoi aller dans un mouvement de panique, parce qu’il doit sentir que ce n’est pas forcément bon pour lui dans cette dernière période, inventer je ne sais quel rendez-vous supplémentaire ? Mais nous prendrons tout le temps nécessaire, tous les sujets seront abordés, tous les grands enjeux seront précisés. Moi, je suis prêt à ce débat.

    Jean-Jacques BOURDIN

    Bien. François HOLLANDE, entre les deux tours, vous… Vous avez choisi déjà votre Premier ministre ?

    François HOLLANDE

    Non.

    Jean-Jacques BOURDIN

    Pas encore ?

    François HOLLANDE

    Non, parce que…

    Jean-Jacques BOURDIN

    Vous avez quelques idées, mais pas encore.

    François HOLLANDE

    J’ai des idées, mais parce que je considère qu’un choix de Premier ministre, c’est un choix qui est lié à une victoire politique.

    Jean-Jacques BOURDIN

    Bien.

    François HOLLANDE

    Je ne connais pas encore les conditions de l’élection donc je reste silencieux.

    Jean-Jacques BOURDIN

    Alors entre les deux tours, est-ce que vous donnerez le nom ?

    François HOLLANDE

    Non.

    Jean-Jacques BOURDIN

    Non ?

    François HOLLANDE

    Non. Alors ça, c'est un point très important…

    Jean-Jacques BOURDIN

    Je vous pose la question, François HOLLANDE, parce qu’il y a beaucoup de Français, beaucoup d’auditeurs de RMC qui nous demandent et qui nous disent : « Mais pourquoi est-ce qu’on ne connaîtrait pas l’équipe qui va gouverner la France, président, Premier ministre, entre les deux tours ? »

    François HOLLANDE

    Pour deux raisons. La logique de l’élection présidentielle, c'est que les Français choisissent une personne. Pas deux : une. Et que c'est cette personne-là qui décidera du nom du Premier ministre. Si je donnais un nom de Premier ministre, ça voudrait dire que les Français auraient voté aussi pour ce Premier ministre, et que d’une certaine façon il serait lié à moi et moi à lui pendant les cinq ans. Je m’y refuse. Je veux garder cette liberté non seulement de nommer le Premier ministre après l’élection, mais d’en nommer un autre au cours du mandat. Je n’exclus rien. Et la deuxième raison, c'est qu’il y a des élections législatives qui vont suivre l’élection présidentielle et ce sont ces élections législatives là aussi qui vont déterminer la majorité politique. Moi, je ne sais pas ce qu’elle sera. Ce sont les Français qui vont en décider, donc je ne donnerai pas le nom du Premier ministre parce que je le choisirai après le second tour et, si nécessaire, après les élections législatives.

    Jean-Jacques BOURDIN

     

    François HOLLANDE, le SMIC, hier sur France Inter vous disiez que vous étiez favorable à un coup de pouce pour le SMIC ?

    François HOLLANDE

     

    Oui ! C’était la tradition.

    Jean-Jacques BOURDIN

     

    Quand et combien ?

    François HOLLANDE

     

    Il y avait chaque année, après une évaluation, un coup de pouce qui était donné, depuis quatre ans plus rien, donc, au lendemain de l’élection présidentielle, ma méthode sera très simple : je réunirai une conférence sociale avec les partenaires sociaux et puis nous regarderons la situation économique, elle est difficile pour beaucoup de PME…

    Jean-Jacques BOURDIN

     

    Oui ! C’est le moins que l’on puisse dire.

    François HOLLANDE

     

    Donc on ne peut pas augmenter le SMIC de manière inconsidérée…

    Jean-Jacques BOURDIN

     

    Non ! Non.

    François HOLLANDE

     

    Non !

    Jean-Jacques BOURDIN

     

    Parce que tous les salaires qui sont légèrement au-dessus du SMIC…

    François HOLLANDE

     

    Oui !

    Jean-Jacques BOURDIN

     

    Doivent être augmentés aussi ?

    François HOLLANDE

     

    Oui ! Et puis, s’ils ne le sont, ça écrase…

    Jean-Jacques BOURDIN

     

    Parce que comment fait-on…

    François HOLLANDE

     

    Et s’ils ne le sont pas, ça écrase la hiérarchie salariale…

    Jean-Jacques BOURDIN

     

    Eh oui ! Eh oui.

    François HOLLANDE

     

    Donc… Voilà ! Nous ne pouvons pas faire autant qu’il serait souhaitable. Donc ce que je dirais c’est que nous allons faire un coup de pouce qui rattrapera un peu ce qui n’a pas été fait dans le passé, mais dans les limites de la situation économique - je l’entendrai cette situation économique de la part des partenaires sociaux – et je fixerai une règle pour l’avenir, c'est-à-dire que le SMIC sera chaque année non seulement réévalué par rapport aux prix pour éviter la perte de pouvoir d’achat mais lié à la croissance, si la croissance a été bonne il est légitime que les salariés y retrouvent une part, s’il n’y a pas eu de croissance, ça peut arriver, par exemple cette année la croissance va être de 0,5 – 0,7, on ne peut pas non plus donner un coup…

    Jean-Jacques BOURDIN

     

    Donc on augmente de 0,7 le SMIC en plus ?

    François HOLLANDE

     

    Non ! Une part d’ailleurs de ce 0,5…

    Jean-Jacques BOURDIN

     

    Une part même !

    François HOLLANDE

     

    Puisque les salaires…

    Jean-Jacques BOURDIN

     

    Oui ! Ca ne fait pas grand-chose.

    François HOLLANDE

     

    Eh bien !

    Jean-Jacques BOURDIN

     

    Jean-Luc MELENCHON a calculé, il dit 2,70 euros par mois.

    François HOLLANDE

     

    Oui ! Mais quand on fait ça on ne fait plus rien alors ? On dit c’est 20% ou c’est 3%. Non ! On peut trouver, je pense, des règles. Ce qui compte c’est qu’il y ait des mécanismes qui soient connus d’avance, que ça ne soit pas le bon vouloir, l’arbitraire, c'est-à-dire qu’on puisse avoir de manière claire – et pour les salariés et pour les employeurs - une augmentation du SMIC qui tienne compte des prix, ça c’est le principe de base, et de la croissance, parce quand il y a de l’activité économique, quand il y a des bénéfices, il est normal que les salariés trouvent leur part.

    Jean-Jacques BOURDIN

     

    Bien !

    Tout vous sépare, j’ai regardé vos deux programmes de très près, mais tout vous sépare de Jean-Luc MELENCHON, beaucoup : le SMIC à 1.700 euros net pour lui, une Europe… des barrières douanières aux frontières...

    François HOLLANDE

     

    Oh ! On peut regarder ce qui nous sépare.

    Jean-Jacques BOURDIN

     

    Enfin il y a tant de choses qui vous séparent.

    François HOLLANDE

     

    On peut…

    Jean-Jacques BOURDIN

     

    Est-ce que vous pouvez gouverner ensemble ?

    François HOLLANDE

     

    On peut regarder ce qui nous sépare, on peut regarder ce qui rapproche.

    Jean-Jacques BOURDIN

     

    Oui ! Ce qui vous rapproche, oui.

    François HOLLANDE

     

    J’ai été dans le même parti que Jean-Luc MELENCHON…

    Jean-Jacques BOURDIN

     

    Oui ! Eh bien oui, oui, oui.

    François HOLLANDE

     

    Donc il y avait beaucoup de choses qui nous unissaient.

    Jean-Jacques BOURDIN

     

    Oui ! Oui, oui.

    François HOLLANDE

     

    Mais prenons ces deux points…

    Jean-Jacques BOURDIN

     

    Oui !

    François HOLLANDE

     

    Le SMIC c’est une question non pas de principe…

    Jean-Jacques BOURDIN

     

    De raison !

    François HOLLANDE

     

    Je voudrais augmenter autant qu’il serait possible les salaires mais j’ai une obligation moi, si je deviens le prochain président de la République, je dois réussir, je ne suis pas là simplement pour faire une belle élection, pour faire un beau premier tour, en disant : « Regardez ! J’ai fait une très belle préparation d’élection présidentielle, une très belle campagne », non je dois réussir, je ne dois pas simplement gagner l’élection présidentielle. Ce n’est pas… Tout à l’heure vous me posiez la question : est-ce que c’est une obsession ou est-ce que c’est une volonté que vous avez d’avoir enfin la présidence de la République comme trophée ? Moi je ne cherche pas un trophée, je cherche à améliorer la vie de mes concitoyens et à faire avancer la France.

    Sur le second sujet, les barrières, bien sûr que je veux une Europe qui soit ferme et qui ne soit pas ouverte, qui ne soit pas offerte, mais, en même temps, je ne la veux pas fermée, fermer les frontières… d’ailleurs faudrait-il encore que les autres pays nous suivent, mais enfin nous nous mettrions dans une situation impossible au plan international, nous avons besoin de commercer, de vendre nos produits à l’extérieur et, en plus, 2/3 de nos échanges se font dans l’Union européenne, donc ça ne servirait même pas à nous protéger suffisamment. En revanche, là encore nous avons un point commun avec Jean-Luc MELENCHON, pas forcément exprimé de la même manière, je n’accepterai pas le traité budgétaire tel qu’il a été signé au mois de mars, je ne l’accepterai pas…

    Jean-Jacques BOURDIN

     

    Comment ferez-vous ?

    François HOLLANDE

     

    Non pas parce que…

    Jean-Jacques BOURDIN

     

    Comment ferez-vous ?

    François HOLLANDE

     

    Eh bien je dirai – et je pense que mon message a été entendu – donc que j’accepte les disciplines, que je fais en sorte, que je ferai en sorte que la dette de la France soit diminuée et je dirai, s’il n’y a pas un volet de croissance, si nous ne mettons pas des moyens, si nous ne levons pas des emprunts pour soutenir des grands projets d’infrastructures, des projets industriels, écologiques en Europe, eh bien nous aurons, et l’austérité, et la dette, c'est-à-dire que sans croissance il n’est pas possible de réduire la dette.

    Jean-Jacques BOURDIN

     

    Mais la croissance, la croissance on peut l’encourager…

    François HOLLANDE

     

    L’encourager !

    Jean-Jacques BOURDIN

     

    On peut l’accompagner, on peut… mais elle ne se décrète pas la croissance.

    François HOLLANDE

     

    L’ai-je dit ?

    Jean-Jacques BOURDIN

     

    Vous avez vu le FMI !

    François HOLLANDE

     

    L’ai-je dit ?

    Jean-Jacques BOURDIN

     

    1%, vous prévoyez 1,7 en 2013, comme Nicolas SARKOZY d’ailleurs, vous avez la même prévision de croissance et vous vous basez sur la…

    François HOLLANDE

     

    Oui ! Parce que je pense que c’est la plus…

    Jean-Jacques BOURDIN

     

    Oui !

    François HOLLANDE

     

    La plus sérieuse. Mais…

    Jean-Jacques BOURDIN

     

    Mais n’est-ce pas optimiste ? N’est-ce pas…

    François HOLLANDE

     

    Mais si, si, je renonçais à l’objectif de croissance…

    Jean-Jacques BOURDIN

     

    Oui !

    François HOLLANDE

     

    Si je disais : « Eh bien, finalement, mettons en place partout en Europe des politiques d’austérité, celles qui sont pour l’Espagne, en Italie, je ne vous parle même pas de la Grèce, au Pays Bas »… Bon ! Et alors nous serions dans une croissance qui ne serait pas simplement faible, mais nulle, vous savez que pour le premier semestre de l’année 2012 nous sommes en récession en Europe, l’économie américaine a repris une progression de 2% en commerce...

    Jean-Jacques BOURDIN

     

    En France nous ne sommes pas en récession !

    François HOLLANDE

     

    Nous sommes à  0,5 !

    Jean-Jacques BOURDIN

     

    Oui ! 0,5.

    François HOLLANDE

     

    Le commerce mondial progresse de 3,5, il n’y a qu’en Europe, il n’y a qu’en Europe qu’il y a cette faible croissance. Et je vais me présenter dans une élection présidentielle, en disant : « Vous voyez ce n’est pas de chance, ce n’est pas de notre faute, mais il n’y a qu’un continent où ça ne va pas, c’est l’Europe », moi je suis candidat à la présidence de la République pour que ça change aussi en Europe. Et vous savez il y a beaucoup de chefs de gouvernement, qui sont plutôt conservateurs, qui espèrent la victoire...

    Jean-Jacques BOURDIN

     

    J’ai même vu le Financial Times qui…

    François HOLLANDE

     

    Qui espèrent la victoire, en se disant...

    Jean-Jacques BOURDIN

     

    Qui estimait que vous aviez raison.

    François HOLLANDE

     

    Parce qu’ils se disent : « Ca va enfin changer et bouger en Europe ».

    Jean-Jacques BOURDIN

     

    Bon ! Oui, mais avez-vous entendu dans cette campagne, vous l’avez entendu, cette résignation des Français : «  de toute façon, quel que soit l‘élu, ça ne changera rien «, vous l’avez entendu ça ? 

    François HOLLANDE

     

    Mais si je ne l’avais pas entendu, je n’aurais pas fait campagne.

    Jean-Jacques BOURDIN

     

    Oui ! Oui.

    François HOLLANDE

     

    Car j’ai eu tant de témoignages de ces hommes et de ces femmes, parfaitement d’ailleurs accueillants, qui m’ont dit : « Eh bien on vous aime bien ou… enfin on vous aime moins bien, ça peut arriver, mais est-ce que vous pourrez ? Est-ce que ce n’est pas trop dur ? » et puis même certains qui votent à gauche, qui me disent : « Eh bien, si gnous gagnons, est-ce que nous allons pouvoir y parvenir ? Est-ce que ce n’est pas, maintenant face à une mondialisation qui est libérale, une Europe qui est affaiblie, une France qui est amoindrie, est-ce qu’il y a encore une possibilité d’agir ? Eh bien oui ! Et donc tout ce que je propose est sur le redressement productif, l’industrie et ce que je propose sur l’éducation, l’éducation c’est à notre portée, c’est nous qui décidons, on me dit : « Oh ! La, la, vous allez créer 60.000 postes, vous vous rendez compte, on n’a pas les moyens », mais je regarde la situation des écoles, partout, dans les quartiers les plus difficiles, dans les zones rurales, dans nos centres villes, mais il y a un espoir considérable qui est donné à l’école et, hélas, c’est un découragement et donc ces 2 milliards et demi à la fin du quinquennat ce n’est pas de l’argent perdu, c’est un investissement. Je compare souvent ces chiffres au bouclier fiscal de Nicolas SARKOZY, il a coûté 2 milliards et demi, ma proposition sur l’école elle représente 2 milliards et demi, moi je protège les enfants, lui il a protégé les plus fortunés.

    Jean-Jacques BOURDIN

     

    Cotisations retraite qui vont augmenter, hein ?

    François HOLLANDE

     

    Hum !

    Jean-Jacques BOURDIN

     

    Beaucoup d’impôts d’ailleurs qui vont…

    François HOLLANDE

     

    Non !

    Jean-Jacques BOURDIN

     

    Avec votre programme, François HOLLANDE ?

    François HOLLANDE

     

    Les impôts des plus favorisés, je l’admets.

    Jean-Jacques BOURDIN

     

    Oui ! Mais les autres aussi ?

    François HOLLANDE

     

    Il n’y a qu’un seul prélèvement qui touchera tous les Français, c’est les 0,1%, je dis bien 0,1% de cotisations supplémentaires pour financer le départ à 60 ans de ceux qui ont cotisé 41 années.

    Jean-Jacques BOURDIN

     

    Est-ce qu’il y a trop d’assistés en France ?

    François HOLLANDE

     

    Il y a trop…

    Jean-Jacques BOURDIN

     

    Toutes les enquêtes le disent ?

    François HOLLANDE

     

    Il y a trop de personnes qui sont sans travail, il y a trop de personnes qui sont démunies, il y a 8 millions de pauvres dans notre pays, pas tous d’ailleurs des assistés…

    Jean-Jacques BOURDIN

     

    Non !

    François HOLLANDE

     

    Des travailleurs pauvres, des femmes qui élèvent seules leurs enfants, qui travaillent à temps partiel, 80% du temps partiel ce sont des femmes qui les exercent ces contrats là. Donc, quand on dit assistés, c’est ceux qui touchent une prestation ? Mais beaucoup de Français touchent une prestation ! Y compris même les plus favorisés, ils touchent…l

    Jean-Jacques BOURDIN

     

    Mais qu’est-ce que vous demandez pour eux ?

    François HOLLANDE

     

    Et donc quel est mon devoir ?

    Jean-Jacques BOURDIN

     

    Pour équilibrer les choses…

    François HOLLANDE

     

    Mon devoir c’est de faire en sorte…

    Jean-Jacques BOURDIN

     

    Parce que mettez-vous à la place du Français qui travaille, qui gagne le SMIC, qui gagne 1.093 euros par mois net le SMIC et qui, à côté, voit quelqu’un qui ne travaille pas mais qui touche plus que lui, ça peut arriver…

    François HOLLANDE

     

    C’est très rare ! Mais…

    Jean-Jacques BOURDIN

     

    Ca peut arriver ! C’est ça.

    François HOLLANDE

     

    Ce qui compte ce n’est pas tellement la réalité, c’est l’impression.

    Jean-Jacques BOURDIN

     

    Oui !

    François HOLLANDE

     

    L’impression que certains…

    Jean-Jacques BOURDIN

     

    Mais oui !

    François HOLLANDE

     

    Vivent de prestations quand d’autres…

    Jean-Jacques BOURDIN

     

    D’autres travaillent.

    François HOLLANDE

     

    Ne vivent que de leur travail et que, en plus, ceux qui vivent de leur travail…

    Jean-Jacques BOURDIN

     

    Oui !

    François HOLLANDE

     

    Vont payer plus d’impôts que les autres…

    Jean-Jacques BOURDIN

     

    Oui !

    François HOLLANDE

     

    Ils vont avoir moins de bourse que les autres…

    Jean-Jacques BOURDIN

     

    Oui !

    François HOLLANDE

     

    Ils vont avoir moins d’avantages pour leurs enfants.

    Jean-Jacques BOURDIN

     

    Et comment faites-vous ?

    François HOLLANDE

     

    Alors ce que je fais c’est que… d’abord je permets à ceux qui sont au travail d’avoir une amélioration de leurs conditions de vie et puis ceux qui sont prestataires, je ne les laisse pas dans cette situation, donc chômeur aura un contrat avec Pôle Emploi qui l’amènera à partir d’une formation, à partir d’un suivi et d’un accompagnement, à retrouver dans les meilleurs délais possibles un emploi. Je ne propose pas un référendum, j’agirai tout de suite, pas la peine d’aller opposer les Français entre eux. Deuxième… le RSA qui est versé, il doit y avoir non pas 8 heures, 7 heures ou 1 journée de travail qui est demandée à ceux qui le touchent, mais il doit y avoir un parcours là encore d’insertion, j’augmenterai considérablement le nombre de contrats d’insertion, c'est-à-dire que celui qui a le RSA, eh bien, il aura une proposition si on n’a pas pu le raccompagner vers l’emploi de contrat d’insertion pour qu’il puisse travailler…

    Jean-Jacques BOURDIN

     

    Et une obligation ?

    François HOLLANDE

     

    Eh bien il aura forcément cette…

    Jean-Jacques BOURDIN

     

    Forcément !

    François HOLLANDE

     

    Parce que vous savez ce n’est pas non plus facile de vivre peut-être avec une prestation, mais, sans dignité liée au travail, sans le regard des autres qui vous considèrent… donc moi je pense aussi à ces Français là, qui doutent même de leur place dans la société, donc ceux-là ils seront accompagnés dans un parcours d’insertion.

    Jean-Jacques BOURDIN

     

    Je vais terminer, comme j’ai terminé hier avec Nicolas SARKOZY, sur l’Afghanistan. Pourquoi, parce que la France est en guerre – et on oublie complètement, on oublie totalement que la France est en guerre…

    François HOLLANDE

     

    Moi je ne l’ai pas oublié !

    Jean-Jacques BOURDIN

     

    Tiens ! On a perdu des soldats, d’ailleurs rappelez-nous combien de soldats avons-nous perdus ?

    François HOLLANDE

     

    83 !

    Jean-Jacques BOURDIN

     

    83 ! Vous avez révisé ?

    François HOLLANDE

     

    Non ! Mais je le savais. Je voulais dire 82, mais il y en a un dernier qui, hélas, vient de mourir.

    Jean-Jacques BOURDIN

     

    Exactement ! François HOLLANDE, est-ce que vous promettez… vous promettez que la France va quitter l’Afghanistan avant la fin 2012, mais est-ce possible ? Est-ce possible ?

    François HOLLANDE

     

    Il y a toujours des experts qui vous disent : « Vous ne pourrez pas. »

    Jean-Jacques BOURDIN

     

    Mais matériellement ?

    François HOLLANDE

     

    Il y a un moment, il y a une volonté politique. Dès l’élection présidentielle, le premier rendez-vous international qu’aura le prochain président, ce sera le Sommet de Chicago, Sommet de l’OTAN.

    Jean-Jacques BOURDIN

     

    Sommet de l’OTAN ! 20 mai.

    François HOLLANDE

     

    Je n’ai pas là non plus caché mon jeu, je n’ai rien dissimulé, j’ai prévenu. J’irai donc au Sommet de l’OTAN, je ne connais pas Barack OBAMA, je dirai à ceux qui sont là et à Barack OBAMA qui sera donc en face de moi, je dirai : « J’ai dit aux Français que je retirais les soldats Français d’Afghanistan d’ici la fin de l’année et je le fais dès à présent. », alors peut-être que le 31 décembre il en restera encore quelques-uns et que ce sera au mois de janvier, mais je me mets l’objectif qu’il n’en reste plus à la fin du mois de décembre. Est-ce que je le fais simplement par calcul politique ? Non ! Je l’ai fait parce que j’ai, dès 2008, dit que la mission de la France en Afghanistan, à mes yeux, était terminée et que d’avoir décidé, comme Nicolas SARKOZY, de renvoyer mille soldats français de plus en Afghanistan était une faute, donc cette faute sera réparée.

    Jean-Jacques BOURDIN

     

    Une dernière question, François HOLLANDE. Vous faites partie du paysage politique depuis bien longtemps. On a la sensation que les Français ne vous connaissent pas, pourquoi selon vous ?

    François HOLLANDE

     

    Parce que je ne suis pas dans l’exhibition ! Jamais. J’ai une certaine retenue, une certaine réserve.

    Jean-Jacques BOURDIN

     

    Pudeur ?

    François HOLLANDE

     

    Pudeur, on peut le dire. Tout le monde connaît ma vie, y compris ma vie personnelle aujourd'hui - et j’en suis très heureux de cette vie - mais je ne fais rien qui puisse être une façon de m’inviter chez les autres, je n’aime pas l’intrusion, je n’aime pas donner une intimité à voir. Si les Français me connaissent mieux maintenant, ils connaissent mieux ma démarche, ma conception, ma méthode. J’avais dit, ça avait fait gausser aussi, vous vous rappelez j’avais dit : « Je veux être un candidat normal », eh bien oui  je serai, si les Français le décident, un président normal.

    Jean-Jacques BOURDIN

     

    Bien ! François HOLLANDE était notre invité ce matin. Merci.


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