• COURAGE ET BRAVO AUX FRALIB =

    Cyril LAZARO

     
    Dimanche 12 août 2012 7 12 /08 /Août /2012 13:45

    En vacances dans l'usine occupée, les "Fralibiens" peaufinent leur projet de coopérative

    Un salarié de l'usine Fralib de Géménos, dont l'identité est dissimulée sous un masque, surveille l'entrée de l'usine

    Un salarié de l'usine Fralib de Géménos, dont l'identité est dissimulée sous un masque, surveille l'entrée de l'usine

     

    Un projet de coopérative ouvrière qui prend forme et un moral renforcé: les "Fralibiens", ces salariés de Gémenos (Bouches-du-Rhône) en lutte contre la fermeture de leur site de production, passent leur second été de vacances à surveiller "leur" usine.

    Une centaine des 182 anciens employés s'oppose bec et ongles au projet du géant anglo-néerlandais Unilever. D'irréductibles Marseillais devenus, au fil de leurs 680 jours de mobilisation, un emblème du combat contre les délocalisations.

    Jour et nuit, ils occupent leur usine qui était la seule en France à fabriquer les thés Lipton et les infusions Elephant dont la production a été transférée en Pologne.

    Aujourd'hui, ils proposent un projet de société coopérative et participative (Scop, nouvelle dénomination des coopératives ouvrières de production), leur "solution alternative" face aux quatre ou cinq dossiers actuellement en lice pour maintenir l'emploi et reprendre l'activité à Gémenos.

    Pour eux, un seul mot d'ordre: "Le thé de l'Eléphant est né il y a 120 ans à Marseille, L'Eléphant est français, en Provence il doit rester".

    Rompant avec la litanie des annonces de plan sociaux, le monde politique commence à trouver l'activisme des Fralibiens séduisant. Le 25 mai, une visite d'Arnaud Montebourg, le ministre du Redressement productif, a relancé le dossier. Et la semaine dernière, le président socialiste de la communauté urbaine de Marseille Eugène Caselli a annoncé le rachat des locaux et machines.

    Objectif: contraindre le groupe à se rasseoir à la table des négociations et envisager enfin de céder la marque Elephant aux salariés.

    Une solution inlassablement rejetée par le président d'Unilever France, Bruno Witvoet. Mais en face, les Fralibiens ont prouvé leur détermination, faisant annuler par la justice les deux premiers plans de sauvegarde de l'emploi (PSE), puis attaquant le troisième (procédure en appel).

    Coopérative ouvrière contre multinationale

    Menés par un duo inséparable de CGTistes, Olivier Leberquier et Gérard Cazorla, les salariés ont multiplié les actions auprès du grand public, et fort d'un véritable élan populaire, ils peaufinent leur dossier.

    "Au début, on ne savait pas trop sous quelle forme (juridique) monter notre projet. Puis au fil des rencontres, on a compris que la Scop, c'est la forme qui correspond le plus à nos exigences", explique M. Cazorla.

    Olivier Leberquier détaille la philosophie du projet: "on souhaite revenir à des achats de produits locaux, des arômes naturels, des plantes produites en Provence, tout ce qu'Unilever a abandonné".

    Non seulement, leur projet a reçu toute l'attention d'Arnaud Montebourg, mais deux cadres de l'industrie agroalimentaire sont apparus dans le jeu avec des propositions qui pourraient bien débloquer la situation.

    L'un, Yves Stunic, propose aux Fralibiens, en spécialiste "avec 25 ans d'expérience", de se tourner vers les marques de distributeurs.

    L'autre, Jean-Pierre Jouve, un quadragénaire passé par des grands groupes (Lustucru, Kodak, Sara Lee...), a déjà fait "un tour de table" auprès d'investisseurs, et se dit prêt à injecter 15 millions d'euros pour "acheter la marque Elephant" et organiser "les achats, le marketing et la vente" dans une structure qui serait adossée à la Scop.

    Une nouvelle entité qui permettrait de "créer de 30 à 60 emplois" de plus. Pour M. Jouve, en visite mardi à Gémenos, la cession de la marque est "une condition nécessaire" pour la viabilité du projet. "Quand on s'appelle Unilever, que l'on gère des marques mondiales, on a une responsabilité sociale vis-à-vis de ses employés", lance-t-il.

    Par Hugues JEANNEAUD Source courrier-picard.fr
     

    L'ex-M. Lustucru en visite chez Fralib pour sauver l'Éléphant

    Jean-Pierre Jouve, ancien cadre du roi des pâtes veut investir 15 M€ pour conserver la marque à Gémenos

    Ils misent sur l'Éléphant pour relancer l'activité sur le site de Gémenos.

    Ils misent sur l'Éléphant pour relancer l'activité sur le site de Gémenos.

     

     

    Hier après-midi, le collectif des salariés de Fralib en lutte depuis près de deux ans a reçu, dans son usine de thés de Gémenos, un partenaire potentiel qui serait prêt à investir et à s'associer avec la Scop dans le cadre de la mise en oeuvre de son projet alternatif.

    Jean-Pierre Jouve, ancien directeur général adjoint en charge du commerce et marketing de Lustucru Rivoire & Carret à Boulogne-Billancourt, a démissionné de son poste en mars dernier après avoir participé au retournement financier du roi des pâtes "sans casser des têtes".

    "L'Éléphant aurait été avalé par Lipton"

    L'ancien cadre serait prêt à mettre "15 Mde fonds privés sur la table" pour "sauver l'Éléphant à condition qu'Unilever libère la marque locale prise en otage qui fait partie du patrimoine français". Pour la multinationale, ce ne serait pas une si grande concession d'après lui puisque, "de toute façon, L'Éléphant aurait été avalé par Lipton". Arrivé à 14 h 30, Jean-Pierre Jouve a pris le temps de boire un café avec les représentants des syndicats CGT CFE-CGC, élus et représentants au CE Fralib Gémenos, pour faire le point sur ce projet commun dont ils avaient déjà discuté à deux reprises.

    Jean-Pierre Jouve a ensuite visité l'usine aux côtés du délégué syndical Olivier Leberquier, du secrétaire CGT du CE Gérard Cazorla, de Cynthia Sanchez-Martin, responsable de l'union locale CGT d'Aubagne et sa région ainsi que de Gérard Affagard, délégué CFE-CGC, entre autres. "Si j'étais déjà convaincu de la viabilité de ce projet, je le suis d'autant plus maintenant et je n'ai pas peur de m'associer à la lutte" des Fralib, a-t-il déclaré.

    "Organiser une rencontre pour la rentrée ministérielle"

    Après une réunion de travail de près de deux heures, les deux parties semblaient optimistes. "Son objectif est le même que le nôtre, ont assuré Gérard Cazorla et Olivier Leberquier. Nous allons interpeller Paul Polman, le président d'Unilever Monde sur la cession de la marque, puisque le Pdg France a estimé que le débat était clos, ainsi que M. Hollande qui a pris des engagements envers nous pendant sa campagne.

    Par le biais de Mme Carlotti nous espérons organiser une rencontre pour la rentrée ministérielle du 22 août. Le problème des bâtiments, du terrain et des machines est réglé, il ne reste que ceux de la marque et des volumes à négocier avec Unilever pour relancer l'activité du site. M. Jouve estime qu'il est en capacité de le faire en un mois. Ce qui prouve la crédibilité de notre projet, contrairement à ce que le groupe et le gouvernement précédent affirmaient".

    Un autre atout

    D'autant que le projet alternatif misait sur 5 M€ et que l'on parle aujourd'hui de 15 M€. Sur les 182 salariés menacés depuis le 28 septembre 2010, 78 employés de Fralib se sont engagés à travailler pour la Scop et Jean-Pierre Jouve envisage de créer "une trentaine d'emplois dans les secteurs commerciaux et achat de matières premières pour être indépendants, et de dégager une production de 1 000 à 2 000 t (au lieu des 700 t envisagées, NDLR) afin d'être pérennes".

    La pérennité de l'activité passe donc maintenant par l'Éléphant car, pour Jean-Pierre Jouve, "créer une marque à partir de zéro nécessite 25 M€ sur 6 ans. La solution la plus simple et la meilleure reste ce dernier petit effort de la part d'Unilever". Un autre atout dans la manche des Fralib, c'est le cadre dirigeant de l'industrie agroalimentaire - ex-Nestlé et Duc - Yves Stunic, qui pourrait également s'associer au projet en ouvrant la porte des marques de distributeurs à l'Éléphant.

    Le vent a bel et bien tourné pour les Fralib. Hier matin, ils étaient aussi sur le marché et les plages de La Ciotat pour interpeller riverains et estivants et distribuer leurs tracts en appelant, entre autres, au boycott de la marque Lipton.


    Côté ministère

    Le ministre du Redressement productif, Arnaud Montebourg, s'était félicité de l'acquisition du terrain, des équipements et des bâtiments de l'entreprise Fralib par la communauté urbaine de Marseille en déclarant que "cette étape rend désormais possible des projets de réindustrialisation du site, dont plusieurs sont en cours d'examen". Il avait également appelé "tous les acteurs concernés à la coopération pour assurer à l'usine et à ses salariés des perspectives industrielles viables et pérennes".

    Contacté, le ministère a informé Arnaud Montebourg de la visite de Jean-Pierre Jouve à Gémenos mais le ministre du Redressement productif étant cette semaine en congés, il devrait réagir dès son retour à cette nouvelle étape de la lutte des salariés de Fralib. Une lutte qui dure depuis 680 jours pour le maintien de l'outil industriel et des emplois à Gémenos, face au groupe Unilever qui souhaitait délocaliser son activité.

    Natahlie CORNAND Source laprovence.com

     

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