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    Extractions de requins

    Pascal Deynat : « Des mesures démagogiques et scientifiquement inutiles »

    13 août 2012 Toniox

    Suite aux nombreuses attaques de requins que l’île de La Réunion a connues ces derniers mois, notamment celle survenue le 6 août, Futura-Sciences s’est intéressé à la situation de notre île, avec le témoignage d’un spécialiste, Pascal Deynat. Voici des extraits de cet article.

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    <p>Selon les statistiques officielles, rapportées par Pascal Deynat, les zones de « spots » qu'affectionnent les surfeurs seraient également prisées par les grands requins prédateurs, car 31% des attaques ont lieu dans les 15 premiers mètres du rivage.
(photo Imaz Press Réunion)</p>

    Selon les statistiques officielles, rapportées par Pascal Deynat, les zones de « spots » qu’affectionnent les surfeurs seraient également prisées par les grands requins prédateurs, car 31% des attaques ont lieu dans les 15 premiers mètres du rivage. (photo Imaz Press Réunion)

     

    La fréquence des attaques des requins survenant chaque année à La Réunion semble augmenter ces dernières années, elle aurait été multipliée par deux depuis 1980, sait-on pourquoi ?
    - La présence des requins au large de La Réunion est connue depuis toujours et des précautions élémentaires sont constamment observées par la population locale. Malgré tout, le développement de nouveaux loisirs et d’une clientèle désireuse d’en « avoir pour son argent » ont parfois induit des comportements à risque, comme pratiquer des activités aquatiques au lever ou au coucher du soleil, périodes où les requins sont les plus actifs. Les concours de surf ouverts annuellement ont drainé sur place un nombre croissant d’estivants, augmentant par là même les probabilités de rencontres avec des prédateurs marins.

    Pourquoi les requins s’attaquent-ils aux surfeurs ?
    - Selon les statistiques officielles, les surfeurs ne représentent que 8% des attaques totales dans le monde, bien loin des 34% sur les nageurs, mais les zones de « spots » qu’affectionnent les surfeurs sont également prisées par les grands requins prédateurs, 31% des attaques ayant lieu dans les 15 premiers mètres du rivage. Si une source puissante de nourriture les y attire, comme les colonies de phoques en Afrique du Sud, les rejets organiques, les décharges ou les abattoirs, le risque d’attaques sera démultiplié, souvent par confusion avec les proies habituelles. La zone des vagues est particulièrement dangereuse, car les eaux turbides provoquent un remaniement continuel des particules en suspension, empêchant le requin de discriminer sa proie. Les squales sont principalement attirés par l’hémoglobine, la bétaïne ou la triméthylamine, mais en l’absence de tels stimuli olfactifs, ce sont essentiellement les ondes de basses fréquences, assimilées à celles d’un poisson en détresse, qui conditionneront l’attaque et la morsure d’investigation. C’est la raison pour laquelle la majorité des surfeurs sont attaqués alors qu’ils se rendent sur les lieux de la vague en battant des mains et des pieds. À titre indicatif, les blessures se répartissent en 40% au niveau des mollets et des genoux, 33% sur les cuisses, 23% sur les bras, 18% sur les pieds et 15% sur les mains.

    L’existence de la Réserve naturelle marine de La Réunion est mise en cause, qu’en pensez-vous ?
    - Contrairement à ce que l’on pense, les océans sont de véritables déserts nutritifs et la majorité de la biomasse marine est concentrée aux alentours du rivage et de la pente continentale. Dans le cas de La Réunion, la Réserve naturelle peut constituer un premier élément d’attrait pour les requins, mais également pour tous les autres prédateurs primaires ou secondaires. À partir du moment où la vie se développe sans nuisance anthropique, les relations entre proies et prédateurs s’effectuent de la même manière qu’elles le feraient sur terre. Les requins, placés au sommet de la chaîne alimentaire en tant que super-prédateurs, continuent donc à se nourrir d’une manière ancestrale sans pour autant avoir la volonté d’inscrire de la viande humaine à leur menu.

    Que pensez-vous des mesures demandées, comme le morcellement de la Réserve naturelle, ou prévues, telles que l’abattage de 20 requins ?
    - Le morcellement de la Réserve naturelle ne servira à rien d’autre qu’à satisfaire les surfeurs et acteurs du tourisme local au détriment de la protection de la faune sous-marine qui pourrait bien plus profiter financièrement à l’île par le développement de l’écotourisme encadré. Il faut en revanche étudier avec attention les fermes aquacoles et évaluer leurs rejets de manière impartiale sur une longue distance et en fonction des courants, ainsi que raccorder la totalité de l’île au réseau du tout-à-l’égout, avec stations d’épurations obligatoires. Ne pas contrôler les sources de nourriture potentielles et ne pas modifier la manière dont les eaux usées sont rejetées en mer consisterait à sonner la cloche du déjeuner en évoquant la fatalité tout en se voilant la face pendant encore de longues années. Il faut de même former les acteurs locaux à l’éco-civisme et à la responsabilité, éduquer et enseigner la biologie de la faune locale, respecter un milieu dans lequel l’Homme n’a rien à faire et bannir les comportements à risque. Il ne viendrait en effet à l’idée de personne de pratiquer le parapente en survolant un volcan en activité ou de jouer au rugby sur un terrain miné. Les mesures évoquées par la préfecture concernant l’extraction de 20 spécimens pour « analyse scientifique » sont démagogiques et scientifiquement inutiles. Cette manœuvre ne vise qu’à tenter de prouver que les requins ne sont pas atteints de ciguatéra pour pouvoir les chasser et les consommer, seule possibilité de les massacrer sans tomber dans les protestations des associations écologiques et en recueillant les vivats des surfeurs. La majorité des grands requins étant intoxiqués par les métaux lourds, le mercure, le PCB et les pesticides issus des activités humaines (et bien plus préoccupants pour la santé publique que la seule ciguatéra), ces mesures ne constituent que de la poudre aux yeux. Pourquoi en ces conditions ne pas éradiquer de la zone tous les consommateurs primaires et secondaires qui accumulent eux-mêmes les toxines dans leur organisme et qui sont pourtant consommés régulièrement par la population locale ?


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