• EXCELLENT ARTICLE PUBLIE PAR DA HERAULT =

    Vendredi 12 août 2011 5 12 /08 /Août /2011 16:49


    Par DESIRS D'AVENIR HERAULT

    En 2008, une occasion ratée de reprendre la main sur une crise aujourd’hui incontrôlable

    De près de loin, Blog de Jean-Louis Bianco. Le 8 août 2011

    L’ensemble des gouvernants occidentaux paient aujourd’hui le fait de n’avoir pris aucune mesure d’ampleur au moment de la crise de 2008.


    Comme le rappelle un excellent article de Martine Orange publié sur le site Mediapart, c’est « par idéologie, par incompétence, par peur, que les responsables politiques ont laissé passer ce moment unique pour reprendre le contrôle d’un système financier débridé ». Le (petit) répit gagné en 2009-2010 leur a laissé penser que tout pouvait recommencer comme avant.


    Le fait est que les gouvernements occidentaux, très majoritairement classés à droite, ont perdu la croyance dans le pouvoir public et dans leur capacité à agir. Ils « s’agenouillent devant la prétendue sagesse supérieure des marchés et se retirent dans le confort moral, en affirmant que la meilleure et la seule chose à faire est d’équilibrer les finances » de façon irréfléchie, c’est à dire en imposant la rigueur pour la rigueur, l’austérité. Précisément la plus mauvaise chose à faire dans cette tourmente.


    Les actifs financiers dans le monde représentent environ 220.000 milliards de dollars, soit plus de quatre fois le PNB mondial. Près de 150.000 milliards de dollars sont de la dette sous toutes les formes.


    Ces chiffres sont le produit d’un dérèglement du système monétaire, depuis l’abandon de l’étalon or le 15 août 1971. Quarante ans après, nous pouvons mesurer les effets d’un système, ayant largué tout repère avec l’économie réelle, où la création monétaire a été abandonnée aux mains de la finance privée, déchargée de tout contrôle des États.


    L’Union européenne a même désigné une banque centrale privée de la capacité d’être prêteur en dernier ressort, c’est-à-dire de pouvoir acheter directement la dette émise par les États. Comme le note Martine Orange, « Libres de toutes entraves, les banques s’en sont donné à cœur joie pour créer sans cesse plus d’argent, plus de dettes, sans rapport avec le réel. La finance est devenue un objet en soi ».


    La responsabilité des banques centrales dans ce dérèglement est immense puisqu’elles ont entretenu le crime et le vice, à partir du krak du 26 octobre 1987. Le tout nouveau président de la réserve fédérale américaine, Alan Greenspan déversa alors des tombereaux de liquidités à taux zéro. À chaque menace de ralentissement, la même politique a été relancée : il fallait à tout prix éviter le moindre ralentissement de la machine. Des milliards de dollars à coût nul ont été déversés dans le système, alimentant la création de la dette

    .

    Tandis que les banquiers centraux surveillaient à la loupe la moindre augmentation salariale, signe d’une dangereuse dérive inflationniste, ils n’ont vu ni la bulle Internet, ni les bulles immobilières, ni les bulles des actifs, ni la création monétaire produite par les méga fusions-acquisitions payées en papier – ce qui revenait à autoriser des entreprises privées à frapper monnaie. Tout cela était si euphorisant, le système était si parfait, que, dans les débuts des années 2000, la FED décida de ne plus tenir compte de l’indicateur M3 –celui de la création monétaire– dans sa surveillance…

    Et puis il y a eu la crise des « subprimes »… En urgence, les banques centrales ont redonné toutes les liquidités voulues et plus encore pour éviter l’écroulement : depuis 2008, l’endettement des États-Unis a augmenté de 2.000 milliards de dollars, celui de l’Italie de 300 milliards d’euros, celui de la France de 900 milliards – selon la version gouvernementale – ou 300 milliards – selon la version de la Cour des comptes –, rien que par les effets de la crise et des moyens mis en œuvre pour éviter l’effondrement du système financier.


    En contrepartie ? Rien.


    Pas un droit de regard, pas un compte à rendre, même pas une action. La France est allée en la matière jusqu’à la caricature, l’État n’étant même pas représenté dans les conseils d’administrations des banques sauvées.


    Martine Orange rappelle qu’il y avait pourtant des précédents dont les gouvernements auraient pu s’inspirer. « Au début des années 1990, la Suède s’est aussi trouvée au bord de l’effondrement de son système bancaire. L’État a repris le contrôle de tout. Toutes ses banques ont été nationalisées. L’ensemble des bilans a été nettoyé. Les mauvaises créances mises de côté dans des structures permettant de temporiser, certaines ont été annulées avec le temps, d’autres remboursées plus ou moins bien. Certaines banques ont été fermées. Les autres ont été recapitalisées puis remises sur le marché, mais avec une surveillance accrue des autorités bancaires. Le champ d’action a été strictement encadré et contrôlé. La Suède comme le Canada, qui a connu une mésaventure à peu près comparable, ont tous les deux échappé au séisme de 2008. »


    Si les autorités bancaires américaines ont un peu fait le ménage et ont obligé les banques à se recapitaliser, dans la zone euro, rien de tel. Pire, les normes prudentielles de Bâle III, supposées apporter un peu de sécurité, ont été repoussées à 2017 au mieux.


    Et les paradis fiscaux ? Ils prospèrent comme jamais, après la mascarade du retour dans le rang, couverte par l’OCDE.


    Les agences de notation ?  Vouées à nouveau aux gémonies après la dégradation des Etats-Unis, elles n’ont pas été inquiétées une seconde. Elles sont toujours autant irresponsables. L’Europe n’a même pas créé sa propre agence, comme elle l’avait promis.


    Quant à la spéculation, elle profite à vue d’œil. Aucune mesure n’a été prise, par exemple, pour interdire les ventes à découvert sur les dettes souveraines.


    Les pistes pour sortir de ce cauchemar existent pourtant. Ségolène Royal, candidate à la primaire ouverte à tous les Français des 9 et 16 octobre prochains, en a décliné plusieurs. Mais elles nécessitent du volontarisme politique et supposent de refuser de se plier à une « oligarchie financière ».

    Ainsi par exemple, l’interdiction des ventes à découvert sur les dettes souveraines, la réforme du statut de la BCE, la création d’un fonds souverain européen, celle d’une agence publique européenne de notation, la taxation des transactions financières, etc. Et l’acceptation, comme le propose l’économiste Kenneth Rogoff, d’une inflation modérée (4 à 6%) pour dissoudre les dettes dans le temps ? La question mérite d’être posée.


    Contre les dérives de la financiarisation à outrance et pour protéger la souveraineté de leurs peuples, Les États ont des armes… encore faut-il qu’ils s’en servent et refusent que la politique se plie à la finance.



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