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Vendredi 2 décembre 2011 5 02 /12 /Déc /2011 17:02
Par DESIRS D'AVENIR HERAULTÀ Toulon, Sarkozy a multiplié les gages aux AllemandsLe Point.fr - 01/12/2011 - Marc Vignaud
Dans son discours, le président a multiplié les gages à nos voisins outre-Rhin. La zone euro sera allemande, ou ne sera pas.
Trois ans après son discours de Toulon sur la crise financière, Nicolas Sarkozy s'est de nouveau livré à l'exercice jeudi, depuis le Zénith de la ville. Devant environ 6 000 personnes, le chef de l'État, candidat à sa succession sans le dire, a tenté de tracer des perspectives en pleine crise de la dette souveraine européenne, qui menace de faire exploser la zone euro. Avec un leitmotiv, la convergence franco-allemande comme seul salut pour l'Europe de demain.
Et pour mieux faire passer la pilule, le président prend des accents que Jean-Luc Mélenchon ne renierait pas : c'est "la mondialisation sans règles autres que celles qui garantissaient la liberté du commerce" qui est, selon lui, à l'origine de la crise. Celle de la finance en 2008, celle de l'économie qui a suivi et celle de la dette publique européenne. "L'idéologie du laisser-faire a triomphé au point de faire oublier au monde toutes les leçons qui avaient été tirées de la grande dépression des années trente. La globalisation financière s'est installée pour compenser artificiellement les ravages que la mondialisation sans règle provoquait dans les économies des pays développés", assène le président. L'influence de sa plume, Henri Guaino, est sensible.
Le fil d'Ariane de la convergence franco-allemande
Les Français, eux, sont soigneusement exonérés de responsabilités : "Depuis trente ans, [ils] ne consomment pas plus qu'ils ne gagnent. Au contraire, ils épargnent. Les ménages français sont parmi ceux qui, dans le monde, épargnent le plus." Cela les exonère-t-il pour autant de faire des efforts ? Non. Car, "depuis trente ans, ceux qui travaillent et qui sont proportionnellement de moins en moins nombreux ont vu peser lourdement sur leurs revenus la charge de ceux, de plus en plus nombreux, qui vivent plus longtemps, de ceux qui font des études de plus en plus longues, de ceux qui sont au chômage, de ceux que les accidents de la vie ont plongés dans la détresse", explique Nicolas Sarkozy.
Une manière de défendre sa réforme des retraites et de taper sur ceux qui veulent l'annuler, mais surtout de préparer les esprits à l'adaptation douloureuse du modèle social français. Sur ce point, le président reste assez ambigu, de peur de braquer l'électorat. Il s'abrite donc derrière la nécessaire convergence franco-allemande. Sans dire clairement que nos voisins outre-Rhin ont accepté durant des années des modérations salariales, une réduction des indemnisations chômage, une limitation des cotisations sociales employeurs... Dans la bouche de Nicolas Sarkozy, cela donne : "On n'éduque pas, on ne soigne pas comme hier" ou "on ne peut pas financer notre protection sociale comme hier". Là, l'influence du secrétaire général adjoint de l'Élysée, Xavier Musca, partisan de coller à l'Allemagne, reprend le dessus, mais discrètement.
Réduction des déficits douloureuse
Le président est en revanche plus clair sur la nécessaire réduction des déficits pour rassurer les marchés. "Nous devons éliminer nos mauvaises dépenses, celles qui sont inutiles, celles que l'on peut supprimer sans diminuer la qualité du service public, celles que l'on peut compenser par un effort raisonnable de productivité, celles qui sont le fruit d'une mauvaise gestion, d'un mauvais contrôle, celles que l'on a laissées dériver par manque de courage pour réformer ou par défaut d'anticipation." Reste à savoir comment aller plus loin que ce qui a déjà été fait... Les critiques contre la révision générale des politiques publiques montrent que ce ne sera pas facile. Mais Nicolas Sarkozy ne veut rien lâcher, en particulier sur le non-remplacement d'un fonctionnaire sur deux partant à la retraite.
Même lorsqu'il sonne la mobilisation générale pour l'emploi en convoquant un sommet avec les partenaires sociaux en janvier à l'Élysée, le président prépare, là aussi, subtilement les esprits à des efforts. "Il faudra avoir le courage d'affronter les grandes questions et de lever les tabous sur les freins à la compétitivité. Chacun sera jugé sur son courage", lance-t-il. Encore la convergence franco-allemande...
Une nouvelle Europe
Une convergence qui lui permet de dessiner la nouvelle Europe qu'il entend bâtir avec Angela Merkel. La France et l'Allemagne soutiendront la rédaction d'un nouveau traité. À ceux de sa majorité qui craignent un abandon de souveraineté, Nicolas Sarkozy donne des gages : l'Europe qu'il appelle de ses voeux n'est pas fédéraliste, mais "intergouvernementale", clame-t-il. En clair, les chefs d'État et de gouvernement garderont la haute main sur la Commission. Mais ils devront décider de leur politique à la majorité qualifiée.
Reste que, selon ses détracteurs, le président s'est couché devant la vision allemande. Et c'est vrai qu'il s'est employé à rassurer Angela Merkel : "La solidarité ne doit pas être un encouragement au laxisme", prévient-il. Une manière de préparer les esprits à un renforcement du contrôle des budgets nationaux encore plus strict que celui prévu par les réformes de ces derniers mois. "Nous devons discuter ensemble de nos politiques budgétaires, non pour qu'elles soient les mêmes partout, alors que les situations sont différentes, mais pour qu'elles se rapprochent, au lieu de s'écarter les unes des autres. Examinons en commun nos budgets. Instaurons des sanctions plus rapides, plus automatiques et plus sévères pour ceux qui ne respectent pas leurs engagements. Renforçons les dispositifs de prévention pour que les dérives que nous avons connues ne se reproduisent plus."
Contre une Europe ouverte à tous les vents
Nicolas Sarkozy plaide aussi avec fermeté pour une Europe plus protectrice : "L'Europe ouverte à tous les vents, l'Europe qui ne se protège par contre les dumpings, l'Europe qui ouvre ses marchés sans exiger la réciprocité de la part de ses concurrents, l'Europe qui laisse entrer des produits de pays qui ne respectent pas les règles sociales ou environnementales, ça ne peut plus durer. L'Europe doit négocier pied à pied la défense de ses intérêts commerciaux", explique-t-il, comme pour séduire l'électorat qui a voté non au traité constitutionnel de 2005.
Au final, dans la vision de Nicolas Sarkozy, il y aura d'un côté l'Union européenne à 27 et de l'autre la zone euro à 17, dotée d'une solidarité sans faille (ce qui implique que la Grèce reste le seul pays à subir un défaut partiel) et dont les membres devront converger. Il devrait en dire plus, lundi, sur la façon d'y parvenir. La chancelière allemande sera alors à Paris pour dévoiler des propositions communes.
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