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    C'est Nabum

    post non vérifié par la rédaction

    Une peine ineffable.

    Se serrer la ceinture.

     





    Il est un garçon dans l'une de mes classes qui depuis la rentrée de janvier traîne sa misère. Il ne sourit pas, se plait à l'écart de ses camarades. Pendant les cours, il est prostré, silencieux. Rien ne trouve grâce à ses yeux, sa mise au travail est fort compromise d'autant plus qu'il a toujours eu une belle réticence aux travaux de plume.


    Nous avons pourtant établi, il me semble, une relation de confiance. En dépit de ses immenses difficultés scolaires, il a apprécié le lien que nous avons su tisser. Il a trouvé un professeur qui l'acceptait avec tout ces « dys » qui font son quotidien scolaire : dyslexie, dysorthographie et sans doute d'autres agréments de ce type. Écrire lui est un calvaire, lire n'est jamais simple non plus.


    C'est ainsi que nous avons pris l'habitude d'échanger à l'écart des autres, de se dire quelques mots après le tumulte d'une classe où ses condisciples ne le comprennent pas vraiment. Ce n'est pas parce qu'écrire lui est presque impossible qu'il n'est pas en mesure de comprendre les choses, de mettre des mots qui sortent plus facilement de sa bouche qu'il ne les couche sur un papier.


    Mais depuis quinze jours, c'est une tombe. Il ne cède rien de son chagrin ineffable. C'est un traîne-misère, il a allure à vous donner l'envie de prendre vos jambes à votre cou afin cette fuir cette détresse qui ne veut pas éclater. Ceux qui ne se sont jamais retrouvésface à un mur qui pleure en dedans, ne peuvent comprendre ce que se passe entre nous !


    J'ai fini par trouver, à force d'interrogations, de demandes, de sollicitations à laisser filer enfin le flot de son sac à misère. J'avais bien quelques pistes, il me fallait trouver la clef pour ouvrir les portes de l'aveu. Il est arrivé, brutal, féroce, monstrueux à qui espère vivre dans un monde qui se targue d'un peu d'humanité.


    Sa mère est en prison, juste à quelques mètres des fenêtres de sa chambre. C'est encore plus abominable ! Il peut la voir, parfois lui parler. Lui seul, à 14 ans dans cet appartement sans adulte, elle de l'autre côté du monde des honnêtes gens, punie pour un forfait qu'elle souhaita sceller lors de notre dernière rencontre.


    Son fils a enfin lâché le morceau, avoué la faute d'une mère qui lui vaut de vivre seul plus d'un mois durant. La prison, cette mesure répressive que tant de gens appellent de leurs vœux, la prison vous dis-je, pour ne pas avoir attaché sa ceinture, refuser obstinément de faire ce geste au volant. C'est tout aussi idiot que ça peut être dérisoire. La dame a perdu des points jusqu'à n'en avoir plus. Elle a aussi été assommée d'amendes qui sont toujours du même montant qu'on soit riche ou bien misérable.


    Elle ne peut payer, elle voulut conduire encore quand son permis n'était plus valable. Elle ne pouvait honorer des amendes qui s'enflent de retards, de majorations et de mises en demeure. Quand on n'a pas le sou, le peu qu'on a encore, on le garde souvent pour nourrir les siens. Elle est allée jusqu'au bout de sa logique, celle qu'elle crut bonne pour le bien de son fils. Elle a brisé la patience d'une société qui aime l'enfermement, qui se rassure quand les malheureux, les différents et les dangereux se trouvent ensemble, derrière des murs épais.


    C'est la muraille de notre indifférence qui prive mon élève de sa mère. Un mois d'incarcération pour elle, un mois d'emmurement pour lui. Il est seul. Une voisine bienveillante le nourrit puis il s'enferme bien vite dans son silence du matin au soir, en attendant que notre société ait son comptant de vengeance.


    J'ai mal d'avoir découvert la vérité. J'aurai préféré n'en rien savoir, continuer à m'imaginer forfaiture épouvantable, crime affreux qui justifie l'incarcération d'une mère et la punition d'un fils. Cette histoire est hélas totalement vraie. Il me l'a confiée comme une bouteille à la mer, je n'ai pas le droit de la garder pour moi. Faites en bon usage et posez-vous à votre tour les questions qui conviennent sur cette prison qu'on nous sert à longueur de lois.


    Carcéralement sien.


    J'ai lu ce billet à J..., le garçon de l'histoire qui m'a donné l'autorisation de le publier. Je vous fais don de ce fragment de vie brisée au nom de la fiscalité routière, la mesure la plus inéquitable qui soit !


    Vidéo :

    l'enfant seul par oxmopuccino


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