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Enfin on rentre dans le dur, dans le précis. Donc, Hollande souhaite taxer à 75%, les salaires supérieurs à un million d'euros par an. Même s'il l'a formulé sur TF1 avec une certaine imprécision (volontaire ?) sans doute ce taux de 75% est-il, dans son esprit, un taux marginal, c'est à dire s'appliquant seulement à la partie du salaire dépassant ce seuil de un million par an. Il aura le temps de le préciser. Toujours est-il qu'il a fait passer une délicieuse soirée à son ami Cahuzac, invité une heure plus tard sur France 2, et qui n'était manifestement pas au courant (1). |
Sur l'efficacité réelle de la mesure, je confesse mon incompétence, et me contente de vous renvoyer aux analyses du spécialiste PS Thomas Piketty. Considérant que les hausses de ce type sont impuissantes à corriger l'injustice de l'impôt sur le revenu, lui
ne démord pas de sa propre proposition (2) de fusion impôt sur le revenu-CSG.
Mais cette annonce a le mérite de faire sortir de ses niches (non fiscales) la petite meute de défenseurs des milliardaires martyrisés. Préparez-vous à les entendre. Vous les entendez déjà: les riches vont fuir le pays. Sur France Inter, ce matin, Baroin prophétisait déjà l'apocalypse: rendez-vous compte: leurs entreprises vont devoir les augmenter!
Sans surprise cependant, c'est notre ami Jean-Michel Aphatie qui a frappé le premier, dès poltron-minet, décochant contre Hollande son ironie gazouillante.
Sacré Aphatie ! Le
Méritocrate républicain de RTL, Canal+ et Gala (3), qui recevait ensuite Alain Juppé, sollicita sa réaction. Et répéta par deux fois une information stupéfiante: sur la proposition de Hollande, les auditeurs de RTL seraient
"partagés". La chose était manifestement inattendue. L'auditorat de RTL est d'habitude un corps unanime, qui considère unanimement, dans sa sagesse immanente, que la France ne peut pas accueillir toute la misère du monde (encore qu'elle doive être généreuse) ou que les profs se la coulent douce, tout de même, par rapport à d'autres (encore qu'ils ne font pas un métier facile, reconnaissons-le).
Mais cette fois, les auditeurs étaient "partagés". Entendez: certains d'entre eux, manifestement insensibles à la bonne parole aphatienne
parfumée au cassoulet (oups, je n'ai rien dit), ne considéreraient pas forcément spoliatoire et confiscatif un système dans lequel un heureux salarié gagnant un million d'euros par an, ne bénéficie plus, après impôts, abattements, et niches,
qued'environ 400 000 euros disponibles. Peut-être même cette mesure lui parait-elle juste. Il reste du travail à Aphatie. Mais il sait faire. Et c'est précisément la raison pour laquelle les plus prestigieux médias se le disputent.
Daniel Schneidermann