"Je vais être forte pour toi ma fille et pour toutes les autres femmes dans le monde. Je ne veux pas que ce qui m'est arrivé arrive à d'autres femmes", a-t-elle confié lors d'une conférence presse à Brooklyn, avant de remercier tous les soutiens qu'elle a reçus depuis le début de l'affaire.
"Avec ma fille, je pleure tous les jours (...) Nous n'arrivons pas à trouver le sommeil", a-t-elle dit devant une centaine de journalistes, avant d'expliquer prendre la parole "pour que les gens comprennent que beaucoup de choses que l'on dit sur moi ne sont pas vraies.
Au cours de cette allocution de trois minutes, la Guinéenne de 32 ans a affirmé que sa fille de 15 ans lui avait demandé "d'arrêter de pleurer". "Je me dis: +Dieu, pourquoi moi? Pourquoi moi?+", a-t-elle conclu.
En costume pantalon sombre et chemisier blanc, parlant doucement, manifestement nerveuse, Nafissatou Diallo n'a répondu à aucune question.
Avant de prendre la parole jeudi, la Guinéenne avait donné en début de semaine des longues interviews à l'hebdomadaire Newsweek et à la télévision ABC, pour demander que DSK "aille en prison". De telle sorties médiatiques, de la part d'une victime présumée, sont très inhabituelles dans une affaire qui n'a pas encore donné lieu à un procès.
La jeune femme a quitté le centre, traquée par des caméras, avant la fin de la conférence de presse qui se poursuivait avec des responsables de la communauté noire de New York.
Son avocat Kenneth Thompson, prenant la parole avant elle, a déclaré: "nous prenons position pour toutes les femmes qui ont été victimes d'agressions sexuelles autour de la planète".
Il a ensuite affirmé que sa cliente engagerait des poursuites au civil pour demander des dommages et intérêts, "si les procureurs ne portent pas cette affaire devant un tribunal" dans le cadre de la procédure pénale en cours.
L'avocat a aussi estimé que Tristane Banon, qui a porté plainte pour tentative de viol contre DSK en France, "dit la vérité". L'avocat de cette dernière a rencontré le procureur de New York la semaine dernière mais les conséquences judiciaires de cette rencontre ne sont pas encore connues.
Même si des doutes sont apparus sur la crédibilité de l'accusatrice et que Dominique Strauss-Kahn a été libéré sur parole, l'ancien ministre a toujours interdiction de quitter les Etats-Unis et il est toujours inculpé de sept chefs d'accusation, notamment tentative de viol, agression sexuelle et séquestration, qui peuvent lui valoir de nombreuses années de prison.
L'intervention publique de Nafissatou Diallo s'est déroulée dans un centre communautaire chrétien situé à Canarsie, un quartier pauvre du sud de Brooklyn (sud-est de New York) au lendemain de l'audition, pendant huit heures, de la victime présumée dans les bureaux du procureur de Manhattan.
La jeune femme, musulmane, était accompagnée, outre de son avocat, du pasteur A.R. Bernard, directeur de ce centre et de plusieurs dirigeants d'organisations de défense des femmes. Une quarantaine de personnes d'origine africaine se trouvaient debout derrière le podium aux côtés de Mme Diallo.
"Toute la communauté guinéenne est derrière elle et la soutient", a affirmé un responsable de la communauté guinéenne de New York, en français. "Notre culture" est très "dure" avec les victimes des agressions sexuelles, a-t-il dit pour souligner son courage.
La prochaine audience consacrée à l'affaire DSK, initialement fixée au 18 juillet, puis au 1er août, a été de nouveau repoussée au 23 août.
Mercredi, l'audition de Nafissatou Diallo a notamment porté sur une conversation téléphonique qu'elle a eue au lendemain des faits présumés avec un ami emprisonné en Arizona pour une affaire de drogue.
Début juillet, le New York Times avait révélé l'existence de cette conversation au cours de laquelle Nafissatou Diallo aurait affirmé en parlant de DSK: "Ce type a beaucoup d'argent, je sais ce que je fais".
Cette conversation est l'un des éléments clés qui a fait vaciller l'accusation, entraîné la libération sur parole de DSK, et jeté une ombre sur les motivations réelles de cette femme qui affirme avoir été agressée sexuellement le 14 mai dans une suite de l'hôtel Sofitel de New York.
A la sortie du bureau du procureur, Me Thompson a nié les propos rapportés. "Certaines choses ont été mélangées dans cette citation qui a été donnée au New York Times", a-t-il déclaré. "Nous avons écouté cet enregistrement et il montre que la victime n'a jamais prononcé ces mots".