• Un magnifique article =

    La pierre et la Vie
    Un incendie affectant la cathédrale Notre-Dame de Paris fait vibrer l’émotion publique, offre aux hommes politiques des occasions d’empathie avec l’Histoire, le roman national, les ombres de Victor HUGO, de Paul CLAUDEL, avec huit siècles émaillés d’affrontements, de célébrations solennelles.
    Même notre ami révolutionnaire Jean-Luc MÉLENCHON parle en instantané sur YOUTUBE, avec talent et lyrisme, de « deuil » et invite à une interruption de la vie politique durant un certain temps.

    Inversement, les hommes du Pouvoir imaginent déjà l’incidence de l’incendie sur leur cote de popularité au nom de l’unité nationale et du rassemblement des Français dans le drame.

    Bien sûr, les émotions sont sincères et légitimes.
    Les monuments parlent avec la voix des siècles et nous l’entendons tous.
    Des précédents existent car les guerres détruisirent bien des édifices chargés de symboles religieux et nationaux.
    La plupart furent restaurés à Reims, Dresde, Rouen, Strasbourg ou Metz, puisque l’Homme peut toujours rebâtir ce que l’Homme a édifié.
    Aussi, loin de minimiser la portée symbolique du « drame » -car je songe qu’avec la charpente de cette église se sont consumés des bois de chênes qui poussèrent il y a plus de mille ans aux alentours de PARIS- je songe que nulle destruction matérielle n'est aussi dramatique que la fin d’une vie.
    Du temps, du travail, de l’argent répareront les dommages d’un bâtiment.
    Ni le temps, ni l’effort des Hommes, ni l’argent ne triompheront de la mort d’un être.
    Oui, LAMARTINE a raison : les objets inanimés ont une âme qui s’attache à notre âme et la force d’aimer, mais une vie anéantie ne se répare pas à la différence d’un objet de pierre et de bois.

    Affirmons-le clairement : il faut respecter et vénérer les chefs-d’œuvres légués par le passé.

    La perte d’un monument ou d’un témoin de l’Histoire justifie notre déploration.
    Mais la Vie prévaut toujours.
    Je me souviens de l’indignation mondiale très légitime lorsque les fanatiques talibans d’Afghanistan massacrèrent les statues géantes de Bouddha, témoin d’une autre religion que celle qui brûlait leurs cervelles.
    Je partage cette condamnation quasi-universelle devant cette manifestation de barbarie obscurantiste.

    Mais je trouve plus grave encore la lapidation de la femme adultère, les mutilations et mises à mort des homosexuels, les coups de fouets aux apostats.

    Un vivant m’est plus précieux qu’une statue.
    Une cathédrale est endommagée et un pays vibre d’émotion.
    Normal.
    Mais que dire devant la mort d’un être vivant ?
    L’homme le plus riche de France, détenteur de soixante milliards d’euros, fera don de deux cent millions pour réparer la cathédrale de PARIS.
    Le troisième champion de la fortune nationale offre cent millions d’euros.
    Qui paie ?
    La collectivité via le crédit d’impôt.

    Quel regret que la Vie ne suscite pas la même générosité des charitables !

    Personnellement, en apprenant l’incendie, j’ai osé penser aux oiseaux qui nichaient sur les hauteurs de l’édifice.
    Les oiseaux n’intéressent pas les hommes politiques ni les oligarques.
    Je sais que la Vie est la première valeur et que toute mort est irréparable.
    Un palais ou une cathédrale peuvent renaître. Pas un être dont le cours du temps est achevé.

    Alors toujours, la vie d’abord.

    Gérard CHAROLLOIS
    CONVENTION VIE ET NATURE 
    UNE FORCE POUR LE VIVANT