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Quand Alain Minc applaudit François Hollande

 

C’est le propre des systèmes oligarchiques : ceux qui en profitent ne connaissent aucune sanction et survivent à toutes les alternances. Alain Minc est l’un de ceux-là, qui après avoir soutenu Nicolas Sarkozy et fait des affaires sous son quinquennat, s’autorise à applaudir des deux mains François Hollande, pour la politique économique.

Ce qui risque de beaucoup plaire dans les rangs socialistes : si même l’entremetteur du capitalisme parisien chante les louanges du chef de l’Etat, c’est vraiment qu’il a mis le cap à droite toute…

Entendre Alain Minc se mêler au débat public suscite, certes, toujours un effet de sidération. Alors qu’il a ruiné quasiment toutes les entreprises dont il s’est occupé, du groupe Cerus de l’industriel italien Carlo de Benedetti jusqu’au journal Le Monde ; alors qu’il n’a cessé d’émettre des opinions soit disant savantes qui, du pronostic de la finlandisation de l’Europe à la veille de … l’effondrement du Mur, jusqu’à l’impossibilité d’une crise financière majeure énoncée à la veille… de la crise économique historique débutant en 2007 ; alors qu’il a été condamné une première fois pour « plagiat servile » et qu’il fait face à une nouvelle plainte, on se demande par quel mystère il se trouve encore des journalistes pour l’interroger et recueillir ses avis.

En d’autres pays, comme dans les pays anglo-saxons, ces échecs à répétition et cette condamnation pour plagiat aurait disqualifié son auteur, qui aurait été, en plus des autres condamnations, contraint à une totale abstinence médiatique. Mais en France, non ! Dans notre système oligarchique, il n’y a jamais de sanction, ni économique, ni intellectuelle…

Ainsi donc, Alain Minc peut chaque semaine - et même le plus souvent plusieurs fois par semaines car il est des médias très accueillants pour ce genre de personnage – délivrer ses remarques sentencieuses sur l’actualité. Autant le dire ! Le plus souvent, cela ne présente guère d’intérêt, car le conseiller de Nicolas Sarkozy et conseiller de quelques grandes fortunes françaises, ratiocine perpétuellement les mêmes fausses évidences. Comme le fait un autre de ses compères, Jacques Attali.

Mais à titre exceptionnel, peut-être faut-il accorder un moment d’attention aux dernières sorties que vient de faire Alain Minc, à l’occasion d’un entretien publié cette semaine par l’Express, et que l’on peut consulter ici. Non pas pour l’intérêt de ce qu’il dit, mais pour ce que ses propos révèlent de l’embardée droitière de la politique économique conduite par François Hollande.

C’est en effet un véritable satisfecit que délivre au chef de l’Etat celui qui a si longtemps conseillé Nicolas Sarkozy : « Les socialistes, pour la première fois, reconnaissent le monde tel qu'il existe. Avant, ils se comportaient d'une manière qui montrait qu'ils l'avaient compris, mais ils ne voulaient pas l'assumer idéologiquement. C'était la "parenthèse", même au moment où Pierre Bérégovoy menait une politique si intelligemment libérale. C'était toujours la parenthèse lorsque Lionel Jospin nous inventait son : "Oui à l'économie de marché, non à la société de marché." Là, les choses sont dites. Au fond, Mitterrand nous avait débarrassés du communisme, Hollande nous débarrasse du socialisme. C'est, pour la France, un pas en avant gigantesque. » 

Et plus loin, Alain Minc ajoute : « Vous permettez à quelqu'un qui a été brocardé pendant des décennies au nom du "cercle de la raison" de triompher un peu! Dieu sait si Jacques Chirac m'avait critiqué à ce titre en 1995. Je me réjouis que Hollande entre dans le "cercle de la raison" ».

Le propos retient donc l’attention, d’autant qu’Alain Minc n’est pas le premier de la garde rapprochée de Nicolas Sarkozy à saluer la politique néo-libérale conduite par François Hollande. Déjà, voici quelques jours, une autre éminence grise du sarkozisme, Raymond Soubie, conseiller social à l’Elysée sous le précédent quinquennat, avait salué chaleureusement l’actuel chef de l’Etat (lire mon article ici): « Le président a affirmé très fortement la primauté de la politique de l'offre, à un degré jamais atteint jusqu'ici. Cela me semble très juste. Il a compris que l'inversion du chômage passait par plus de créations d'emplois des entreprises, plus d'investissement et plus de confiance de leur part. La procédure du pacte de responsabilité n'est pas d'une clarté aveuglante, mais elle me semble bonne dans son principe. »
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