• 20/05/16

    Deux scénarios post-implosion de l’économie

    Michel de Kemmeter
    Mis en ligne lundi 25 avril 2016, 12h51

    Chaque semaine, Michel de Kemmeter vous invite à plonger dans de nouvelles dimensions de l’économie et de la société.

     

    Que se pourrait-il se passer quand la dette implosera ?

    À en croire, le proverbe lorrain « la vision préserve de la peur », mieux vaut donc préparer quelques scénarios. On ne sait jamais.

    Depuis la crise de 2008, la dette globale a doublé, l’économie mondiale est entrée en stagnation et en récession. Les déficits augmentent, les recettes anciennes buggent. Même les pays émergents battent de l’aile. Les scandales viennent flotter à la surface, partout, tous les jours ou presque. Les grands groupes se posent la question si leurs entreprises sont « future-proof », et si dans la négative, combien de temps cela prendra pour les mettre à jour… et avec qui et quelle expertise. Les burn-outs vont quadrupler en 4 ans, et c’est 1 emploi sur deux qui disparaîtra en 10 ans. De plus, les monnaies soi-disant « fortes », n’ont jamais été aussi fragiles.

    Trop de questions complexes sans réponse. Il y a des fous avec flambeaux qui se promènent dans le magasin de pétards.

    Scénario 1 : Transition « Hard »

    Une bombe explose au mauvais moment au mauvais endroit. Un crash d’une banque systémique. Un scandale « too big to fail »…

    4H : Les banques collapsent en chaine, les comptes sont tous bloqués pour une durée indéterminée, les ATM ne sortent plus de cash.

    8H : Les cartes de débit et crédit sont bloquées, peu importe combien il y a sur les comptes.

    24H : C’est la ruée vers les magasins de vivres.

    48H : Les approvisionnements alimentaires stoppent.

    72H : Coupures d’électricité, d’eau potable, approvisionnements de carburants stoppés après 4 jours.

    1 semaine : Réseaux de communication interrompus… l’économie et les services publics sont totalement stoppés. Faillites en chaîne.

    La corruption aussi s’arrête. Une autre émerge : les mafias en tous genres.

    Mobilisation de l’armée et de la protection civile.

    Le chaos.

    Les gens descendent dans les rues.

    2 semaines – en continu : vols, pillages de vivres, carburants, eau potable…

    Les gouvernements démissionnent, n’ont pas de solution à offrir autre que d’envoyer l’armée. Ils n’ont pas de plan B.

    4 semaines : des groupuscules s’organisent localement, partagent ressources en échange de protection.

    Beaucoup de morts par homicide, de peur, de maladie mentale, froid, faim, soif, et pétage de plombs.

    Plusieurs politiciens, hauts administrateurs, dirigeants, gradés, dirigeants religieux et investisseurs se font lyncher chez eux ou en rue.

    8 semaines : des petites coopératives s’auto-organisent, pour l’alimentation, l’éducation, les soins de santé, habitats partagés.

    16 semaines : une nouvelle économie émerge lentement mais sûrement, pilotée par un leadership local.

    32 semaines : des échanges à l’échelle des provinces, des régions, se créent.

    64 semaines : l’éducation, l’agriculture, l’habitat, la sécurité, la santé, l’artisanat s’organisent de façon structurée, en réseau, à partir du local et des expertises et spécialités du cru.

    Mais en parallèle, des mafias et groupuscules continuent d’errer et pillent les villages… qui sont protégés par des milices auto-organisées.

    Un nouveau monde émerge, contraint et forcé.

    Scénario 2 : Transition « Soft »

    Des petits chocs successifs sur les bourses et dans les capitales se succèdent un peu partout.

    Un réveil collectif des dirigeants et communautés de citoyens s’opère, autour de quelques visionnaires responsables.

    24H : De toutes nouvelles coalitions se créent entre parties prenantes de dirigeants et communautés citoyennes. Des « Centres de Transition Economique » sont créés dans les capitales et ailleurs.

    72H : Des « masterminds » s’organisent avec les grandes entreprises, politiques, investisseurs, ambassades, experts et communautés citoyennes.

    2 semaines : Des investissements massifs sont faits dans l’observation des économies en transition dans des villes test, les expériences historiques sont étudiées, et modélisées.

    4 semaines : jeunes, experts et leaders construisent des plans B, adaptés aux territoires divers.

    4 mois : Des apprentissages sont faits et cartographiés, mis en forme en « Road Books de Transitions Economiques ».

    Le tout est mis sur les réseaux et dans les écoles.

    6 mois : Des expériences pilotes de transition ambitieuses sont lancées dans 50 villes du monde

    10 mois : Un feedback de ces expériences est centralisé dans un centre global où chacun peut venir, se connecter, amener ses idées et concepts ainsi que ses témoignages.

    Une bombe explose au mauvais moment au mauvais endroit. Un crash d’une banque systémique. Un scandale « too big to fail »…

    Les gouvernements locaux et fédéraux annoncent d’une même voix : « Nous sommes préparés, nous avons déjà construit plusieurs plans B ensemble. Un beau plan d’un monde dont nous rêvons finalement tous : durable, collaboratif, offrant un avenir pour tous, reconnaissant l’excellence et la valeur unique de chacun. Maintenant, c’est à vous de dérouler cette nouvelle société. Retrouvez vos leaders locaux, et engagez-vous sur cette reconstruction. Tout est déjà là, prêt à être utilisé. »
    La mobilisation se fait dans le calme, dans l’enthousiasme d’un monde plein de promesses.

    À vous de choisir.

    Tout peut encore changer.

    Mais comme nous sommes occupés, personne, non, personne – croyez-moi, j’ai été voir à toutes les portes – ne prépare ce plan B pour l’instant.

    • Ni les dirigeants religieux (j’ai été au Vatican, rencontré les clubs de dirigeants catholiques, musulmans, et juifs),
    • ni l’académique (j’ai presté à et rencontré plus de douze universités européennes),
    • ni le politique (j’ai rencontré plusieurs douzaines de dirigeants politiques de tous les niveaux et pays),
    • ni les scientifiques,
    • ni les militaires,
    • ni les dirigeants du business et de la finance,
    • ni encore les super-riches.

    Ils sont tous trop occupés à protéger leurs acquis et leurs ego, à court terme. Toujours à court terme. Ce manque de vision, de bon sens commun, de pragmatisme, de réalisme, va leur coûter si cher que la majorité ne s’en remettra pas.

    Les derniers seront les premiers – et les premiers seront les derniers.

    Sachez que, qu’on le veuille ou non, la métamorphose est déjà en cours, avec ou sans nous.

    Il n’est jamais trop tard pour s’inscrire en tant qu’acteur de changement. Ce sera une aventure fascinante pour chacun, car chacun sera obligé d’amener le meilleur de soi au monde.

    Bonne merde à tous.

    Michel de Kemmeter
    Mis en ligne lundi 25 avril 2016, 12h51

    Ps : d’ici là, venez participer à notre Summit le 20 mai :

    Un sommet annuel où se rencontrent entrepreneurs, experts et leaders autour de nouveaux modèles économiques de création de valeur et de croissance durable.

    2014 : Louvain la Neuve- « Perspective offertes par l’économie Systémique »

    2015 : Louvain la Neuve- « Nouveaux modèles : experts et témoignages »

    2016 : Bruxelles- « Construire Demain »

     

    Avec :

    Lilou Macé, Michel Bauwens (P2PFoundation), Etienne de Callataÿ, Ministre Céline Fremault, Laurent Ledoux (SPMobilité), Anis Bedda (TransformaBXL), Martin Latulipe, Alex Houtart, Pr. Christian Ghymers (Ichec), Geert Gielens (Belfius), Daniel Kropf (UEF), Philippe Van Impe (Data Innovation Hub), Eric Van Hoof (EY), Philippe Lambrecht (FEB-The Shift), Frederik Leloup (Beci), Olivier de Bonhome (ODB), Kris Vander Velpen (KUL, Vlerick), Eric Gillet (Equal-Partners), Jean Blavier (RTBf, L’Echo), Manfred Hellrigl (Office of Future Questions), …

    et surtout – VOUS !  

    Vous êtes la personne la plus importante car c’est vous l’acteur de changement – assez de blabla – 2016 est l’année de l’action.

    Personne d’autre ne le fera à notre place.

    Vous êtes expert, leader, étudiant, dirigeant, citoyen, attaché économique, concerné par l’économie et le changement de société … nous vous attendons à cette journée unique.

    Pourquoi

    • La conscience collective est arrivée à un point où il est évident que de nouveaux modèles doivent faire leur entrée, mais pas n’importe comment. On ne part pas à l’aventure en forêt vierge non préparé.
    • Chacun n’a qu’une partie de la perception de la situation globale. Mettre ensemble des experts, entrepreneurs, leaders, managers, jeunes, autour de la même quête : « Comment allons-nous faire, concrètement, pour réinventer notre économie ? »
    • Ce n’est qu’en croisant les générations, cultures, expertises, perceptions, que des choses totalement nouvelles et durables peuvent émerger. Il en est grand temps.
    • Il y a des choses extraordinaires qui se passent déjà sous les radars. Profitons de leur expériences. Ne réinventons pas la roue.
    • La Belgique, et Bruxelles en particulier, est attendue sur une dynamique comme celle-là. Notre économie-serre ne durera pas éternellement.
    • Construisons ensemble des outils et pistes d’avenir – des exemples pilote, rassemblant les meilleurs pratiques planétaires, de façon pragmatique et structurée. Ceci suivi d’actions de terrain et fondements académiques.

    Programme: cliquer ci dessous

    https ://www.eventbrite.com/e/sommet-de-leconomie-systemique-3-2016-tickets-19951575700

    Michel de Kemmeter


    source / http://www.lesoir.be/1191349/article/demain-terre/economie-positive/2016-04-25/deux-scenarios-post-implosion-l-economie

     
    Posté par Jocegaly à

  • Perspectives énergétiques de British Petroleum pour 2016 : une évaluation de scénario de référence raisonnable ?


    Par Roger Boyd  – Le 19 avril 2016 – Source resilience.org

    La publication annuelle Perspectives énergétiques de BP 1 fournit un bon examen objectif allant de pair avec l’enthousiasme du mouvement autour de la croissance verte, tandis qu’il offre dans le même temps un tableau hautement optimiste des ressources en combustible liquide et de l’acceptation du gaz naturel en tant que ressource respectueuse du climat.

     
    Examen objectif de la croissance verte

    Tant que le taux de croissance économique mondial annuel (accroissement du produit intérieur brut – PIB) sera plus élevé que la baisse mondiale annuelle en intensité énergétique (quantité d’énergie requise pour chaque unité de PIB), il faudra plus d’énergie d’année en année. Les perspectives de BP supposent une croissance historique moyenne du PIB mondial de 3,5%, ce qui représente plus que le doublement du PIB mondial d’ici 2035, et une réduction annuelle historique en intensité énergétique de 2,1% (contre 1,5% au cours des deux dernières décennies). La première dépasse la seconde, et la consommation énergétique globale augmente approximativement d’un tiers. Si la différence n’est pas compensée par une diminution de l’intensité des émissions de carbone dans la consommation d’énergie (la quantité d’émissions de carbone par unité d’énergie), principalement par l’augmentation de la consommation de carburants non fossiles, alors les émissions de carbone continueront de s’accroître. Cette compensation ne se fait pas, de sorte que les émissions de carbone persistent à grimper, à un taux simplement moins élevé qu’auparavant (0,9% par an, contre 2,1% par an durant la dernière décennie).

    Il existe des limites financières, infrastructurelles, sociales, politiques, etc. quant à la capacité du secteur de l’énergie renouvelable à développer sa production, et ainsi réduire l’intensité des émissions de carbone liées à la consommation énergétique. En outre, le secteur renouvelable produit de l’électricité, ce qui compte pour moins de la moitié de la consommation d’énergie (BP envisage une augmentation des 42% actuels à 48% d’ici 2035). Durant la période de prévision, les énergies renouvelables seront les sources d’énergie connaissant la croissance la plus rapide, se développant à un taux de croissance annuelle de 6,6% pour accroître leur part de production énergétique de 3% à 9% d’ici 2035. Même avec des augmentations en hydroélectricité de 0,9% par an, et en nucléaire de 1,8% par an (principalement à cause d’une multiplication par 9 en Chine et du redémarrage des réacteurs du Japon), la consommation énergétique accrue nécessite toujours une utilisation d’énergie fossile plus importante. Le charbon augmente de 0,5% par an (principalement à cause de l’industrialisation de l’Inde basée sur le charbon), le pétrole de 0,9% par an, et le gaz naturel de 1,8% par an. Il en résulte au final une augmentation annuelle de 0,9% des émissions de carbone, ce qui constitue un progrès, mais dont on ne peut se satisfaire à l’heure où des réductions sont nécessaires.

    L’une des prévisions les plus surprenantes concerne la croissance en nombre des voitures et des véhicules utilitaires passant de 1,2 milliard à 2,4 milliards, en tenant compte des pays non-membres de l’OCDE, dont le nombre de véhicules triple pour passer de 0,5 milliard à 1,5 milliard. BP prévoit que la voiture moyenne sera capable de voyager sur 80,5 km avec un gallon d’essence, contre 48 km aujourd’hui, mais là encore, l’efficacité accrue est largement contrebalancée par la croissance en nombre de véhicules. L’impression générale qui ressort du rapport est qu’entre aujourd’hui et 2035, l’Europe et l’Amérique du Nord pourraient ne tenir qu’un rôle secondaire dans la dynamique de la consommation énergétique mondiale. Quel que soit le nombre de centrales au charbon qui fermeront dans ces régions, ou le nombre de leurs habitants qui conduiront des voitures électriques, ce qui se passe en Chine, en Inde et dans d’autres pays en voie de développement, décidera du système énergétique mondial. Une autre observation intéressante est que vers la fin de la période de prévision, de multiples pays d’Europe pourraient avoir atteint un niveau d’énergies renouvelables intermittent, où le défi d’intégration au réseau électrique deviendra un obstacle grandissant. Ce qui donne du poids à une thèse selon laquelle lorsqu’une société réduit drastiquement ses émissions de carbone, l’ampleur et la difficulté des changements requis pèsent plus lourd.

    En résumé, un triplement de la contribution des énergies renouvelables, conjointement avec un record historique de réduction de l’intensité énergétique, ne peut contrebalancer la croissance du PIB. Il en résulte une augmentation continue des émissions de carbone jusqu’en 2035.

    Optimisme quant aux projections de ressources en carburant liquide

    Le document prévoit que les ressources mondiales en carburant liquide vont s’accroître de 19 millions de barils par jour (mbj), conduites par le schiste et d’autres pétroles de réservoirs étanches, les eaux profondes du Brésil, ainsi que les sables bitumineux et les biocarburants du Canada. Dans leur ensemble, elles vont augmenter de 16 mbj, de concert avec l’OPEP, rehaussant la production de 7 mbj, et compensant les baisses de production dans les pays d’Europe et d’Asie Pacifique. On ne trouve dans le document aucune mention de la réduction d’énergie nette, ni de l’augmentation du coût énergétique de l’extraction de l’énergie du sol (ou de la culture de l’énergie) et de la baisse de l’énergie brute par unité de production.

    En dehors de la production d’éthanol brésilien, les biocarburants ont tendance à consister en un processus de conversion d’énergie plus qu’en une production énergétique, fournissant peu ou pas d’énergie nette en tenant compte de l’apport énergétique. Les gaz naturels liquéfiés (les GNL) ne sont pas du pétrole brut, et ne contiennent qu’environ 60% de l’énergie par volume, alors qu’ils nécessitent des processus de raffinage divers. En considérant les GNL, les biocarburants et autres liquides de gaz naturel qui représentent 9 des 19 mbj d’augmentation de liquides de gaz naturel envisagés, il en résulte une surestimation significative de l’énergie fournie. Il faut ajouter à cela le coût relativement élevé du pétrole de schiste, des ressources en eau profonde et des sables bitumineux, ainsi que l’épuisement des puits de pétrole brut conventionnel à moindre coût énergétique. La question reste ouverte de savoir quelle quantité d’énergie nouvelle nette sera fournie à la société, et sera donc disponible pour mener la croissance économique en dehors du secteur de l’énergie.

    Une hypothèse supplémentaire est celle de la capacité à investir les gigantesques quantités d’argent requises pour développer ces sources de carburants liquides, dont beaucoup nécessitent de larges investissements, combinés à un laps de temps significatif de flux de liquidités négatifs. De tels investissements dépendent hautement des hypothétiques prix futurs des carburants liquides. L’extrême volatilité des prix des deux dernières décennies pourrait induire des prévisions de prix bien plus prudentes, réduisant le nombre de projets qui peuvent être financés avec succès. Les problèmes financiers actuellement rencontrés par l’industrie des carburants liquides (ainsi que leurs investisseurs et banquiers), après une période de vastes investissements, pourraient également créer une situation invitant à des investissements bien plus mesurés. Cela pourrait considérablement limiter, voire différer, toute future réponse à une augmentation des prix des carburants liquides.

    Le résultat net pourrait être une augmentation de moindre ampleur de la production de combustibles liquides bruts, ainsi qu’une hausse encore plus faible de l’énergie nette fournie. Cela limitera la croissance du PIB, et impliquera peut-être aussi des prix plus élevés menant à de meilleurs gains d’efficacité énergétique et carbone. Il pourrait en résulter une légère réduction des émissions de carbone, à travers la période induite par une croissante économique plus faible et des prix de carburants liquides plus élevés.

    Le gaz naturel comme carburant transitoire

    Étant donné la capacité avérée de l’industrie énergétique nord-américaine à externaliser les coûts environnementaux et sociaux de la production de gaz de schiste2, les hypothèses quant à la production future semblent raisonnables. En particulier si les exportations de gaz naturel font évoluer les prix nord-américains vers un niveau plus proche de celui des prix les plus élevés dans d’autres régions. Des hypothèses d’augmentation significative en Chine semblent également pertinentes, étant donnée la capacité de son état à passer outre les oppositions locales aux développements du gaz de schiste, et l’urgence de réduire la pollution de l’air due aux centrales électriques alimentées au charbon3. BP envisage une hausse significative de la production de gaz de schiste à 5,6% par an, ainsi qu’une augmentation de la part de sa production globale de gaz naturel de 11% à 24% d’ici 2035. Il est prévu que la grande majorité de cette hausse provienne d’Amérique du Nord et de Chine. Comme pour les combustibles liquides, il n’y a aucune estimation de l’énergie nette. Étant donnée la forte intensité énergétique de la production de gaz de schiste, particulièrement dans les régions arides et retirées où la plupart des réserves chinoises se situent, l’énergie nette supplémentaire fournie pourrait s’avérer nettement inférieure à la hausse de la production brute. Cela ne peut que s’exacerber avec l’épuisement des sources conventionnelles d’énergie à moindre coût.

    Il y a une quantité croissante de recherches qui établissent que le gaz naturel est au moins aussi mauvais, si ce n’est pire, pour le changement climatique, que le charbon, en prenant en compte les émissions de méthane au niveau des sites de production et dans l’ensemble du réseau de distribution 4 5. Toute diminution de sulfates atmosphériques et de particules bloquant le soleil générée par l’incinération de charbon, pourrait également intensifier le changement climatique régional en permettant une conservation accrue des radiations solaires dans l’atmosphère terrestre.6 7. Si cette réalité venait à alerter les militants écologistes et le grand public, la construction de sites de production électrique alimentée au gaz naturel pourrait se heurter à la même opposition que la construction de centrales au charbon. Dans la mesure où une importante augmentation de l’usage de gaz naturel est attendue en Europe et en Amérique du Nord, où la société civile et les militants écologistes pourraient peser plus, cela pourrait atténuer la croissance de la consommation de gaz naturel. En Chine et au Moyen-Orient, de telles pressions émanant de la société civile pourraient être vigoureusement contenues.

    Alternatives

    Les perspectives de BP envisagent quelques options différentes.  Si on observe un taux de croissance moins élevé du PIB (non induit par des contraintes relatives à l’approvisionnement en combustibles fossiles), cela suppose que les prix les plus bas des combustibles fossiles auront tendance à dépasser ceux des énergies renouvelables, hydrauliques et nucléaires, avec pour conséquence une baisse des émissions de carbone qui sera moins importante que celle des énergies brutes dans la consommation énergétique. Une diminution de 3,5 % à 3 % de la croissance annuelle est supposée réduire les émissions de carbone de seulement 7 %, au cours de la période prévisionnelle de 20 ans relative au scénario de base (elles continuent d’augmenter de 13 %). En extrapolant de manière simpliste, pour maintenir les émissions stables durant la période, une croissance annuelle de 2 % serait nécessaire. Étant donnés les taux de croissance plus élevés attendus dans les pays en voie de développement, un tel scénario pourrait donner lieu à une stagnation prolongée en Europe et en Amérique du Nord.

    Dans un scénario où le prix du carbone serait fixé à 100 dollars la tonne au sein de l’OCDE et 50 dollars la tonne en dehors de l’OCDE (en dollars de 2015), conjointement avec d’autres initiatives politiques et réglementaires en faveur du climat, BP prévoit que le secteur de l’énergie renouvelable croîtra à un rythme de 9 % par an (doublant de volume tous les 8 ans !). Sa part dans l’approvisionnement énergétique mondial augmentera de 3 % à 15 % d’ici 2035. On estime que les émissions de carbone en 2035 seront inférieures de 8 % aux niveaux de 2014. Cela constituerait toujours une diminution insuffisante pour prévenir un changement climatique dangereux, et cela ne tient pas compte des effets de contrepoids d’une utilisation accrue des gaz naturels (c’est-à-dire les émissions accrues de méthane). On ne trouve dans l’analyse aucune évaluation des répercussions sur les secteurs industriels à grande consommation d’énergie, tels que la production d’acier et de ciment, ou des divergences entre pays quant au prix du carbone. Ce ne sont pas de bonnes nouvelles pour l’Europe et l’Amérique du Nord.

    Les énergies renouvelables ont tendance à avoir une énergie nette moindre en comparaison des combustibles fossiles, particulièrement lorsque les coûts d’équilibrage de production intermittente (variations du vent et du soleil) sont prises en compte8. Avec un tel accroissement de l’utilisation d’énergies renouvelables à faible énergie nette (de 3 % à 15 %), et des sources de combustibles à plus faible énergie nette, la véritable augmentation de l’énergie à disposition de la société pourrait s’avérer significativement moins consistante que la hausse de la production énergétique brute. Cela tendra à limiter la croissance du PIB. De surcroît, des changements aussi importants dans les sources d’approvisionnement énergétiques auront des effets financiers et économiques majeurs, qui ralentiront la croissance économique. Les actuelles organisations en charge de fournir l’énergie, l’infrastructure énergétique en place et les modèles de gestion pourraient être grandement dévalués, voire même rendus complètement obsolètes. Alors que des niveaux de transition de plus en plus importants sont envisagés, l’ampleur de ces effets va s’accroître de façon exponentielle et les dislocations économiques et sociales en résultant deviendront toujours plus problématiques.

    Conclusions (les miennes, pas celles de BP)

    L’économie mondiale rejette actuellement environ 10 milliards de tonnes de carbone dans l’atmosphère chaque année. On a estimé qu’alors que dès 2011, 269 milliards de tonnes supplémentaires amèneraient les concentrations atmosphériques de dioxyde de carbone à excéder 450 parties par million (ppm), niveau fixé par le Groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat (GIEC) comme susceptible d’induire une probabilité inacceptable d’effets délétères du changement climatique9. Un simple calcul donne à appréhender 2038 comme l’année où la société humaine aura épuisé son budget carbone, compte tenu des taux actuels d’émissions. Étant données les probables rétroactions accroissant les émissions naturelles de dioxyde de carbone et de méthane, conjointement à l’impact probable d’une disparition de la calotte glacière dans l’océan Arctique en période estivale, provoquant l’absorption de l’énergie solaire plutôt que sa réflexion vers l’espace, et les émissions accrues de méthane dues à l’utilisation de gaz naturel, cette date critique pourrait advenir bien plus tôt dans cette décennie.
    Le rapport de BP montre qu’eu égard aux niveaux historiques de croissance économique, même un décollage fulgurant du secteur des énergies renouvelables ne réduira pas significativement les émissions de carbone. Des réductions conséquentes en émissions de carbone nécessiteraient à la fois un vaste développement du secteur des énergies renouvelables et une restriction de la croissance économique. Cela suppose que l’objectif 450 ppm soit valide. Cet objectif a été de plus en plus la cible de critiques le considérant trop élevé, des niveaux aussi modestes que 350 ppm ont ainsi été proposés10. Ce dernier objectif demanderait des transitions économiques qu’on n’a vues que dans les économies étatisées des deux guerres mondiales, allant de pair avec des pertes financières et économiques combinées à des troubles sociaux majeurs. Le niveau des 400 ppm a déjà été franchi. C’est le sujet sensible dont peu de gens veulent débattre,  et c’est très certainement la raison pour laquelle les rapports du GIEC admettent de plus en plus la réalité d’un dépassement de l’objectif des 450 ppm, avec les futures technologies non éprouvées captant le dioxyde de carbone à la source, rejetant le dioxyde de carbone directement hors de l’atmosphère, ou encore le stockant de manière fiable.

    Il y a également un silence assourdissant concernant l’accroissement rapide de l’exploitation de sources d’énergies renouvelables ayant rendement net faible, combiné à un déclin de l’énergie nette des sources de combustibles fossiles, ce qui pourrait entraver sensiblement l’augmentation de l’énergie disponible et ainsi le développement de la croissance du PIB11. Pour une société humaine qui se trouvera déjà aux prises avec une transition massive dans son infrastructure énergétique, avec en sus les effets croissants du changement climatique, ce sera un paramètre supplémentaire qui suscitera des tensions économiques et sociales.

    En considérant les actuelles tendances à l’inertie qui règnent au sein de nos sociétés, il se pourrait qu’une réalité profondément inconfortable fasse que le scénario de base de BP soit, dans les faits, assez fidèle au cours que les choses suivront pendant un certain temps. Seule une secousse majeure au système, ou une série de secousses, qui infirmerait foncièrement le statu quo, semble à même de détourner la société de la trajectoire qu’elle suit à l’heure actuelle.

    Roger Boyd

    Note du Saker Francophone
    
    Il faut noter que ce document et son analyse par Resilience.org, se basent sur l'acceptation inconditionnelle du réchauffement climatique anthropique et de l'hypothèse que c'est le carbone qui en est le vecteur et qu'il faut donc le taxer. Il existe d'autres visions du changement climatique.

    Traduit par François, relu par nadine pour le Saker Francophone

    Notes

     
    1. British Petroleum (2016), BP Energy Outlook 2016 Edition: Outlook to 2035, British Petroleum. Accessible ici ↩
    2. Josh Fox (2013), Gas Land Part 2, Docurama ↩
    3. Jaeah Lee & James West (2014), America’s Fracking Boom Comes To China, The Atlantic. Accessible ici ↩
    4. Robert W. Howarth (2015), Methane emissions and climatic warming risk from hydraulic fracturing and shale gas development: implications for policy, Energy and Emission Control Technologies. Accessible ici ↩
    5. Daniel Zavala-Araiza (2015), Reconciling divergent estimates of oil and gas methane emissions, Proceedings of the National Academy of Sciences. Accessible ici ↩
    6. Tom Wigley (2011), SWITCHING FROM COAL TO NATURAL GAS WOULD DO LITTLE FOR GLOBAL CLIMATE, STUDY INDICATES, AtmosNews. Accessible ici ↩
    7. Associated Press (2011), China’s pollution temporarily slowed climate change, CBC News. Accessible ici ↩
    8. Weißbach et al.. (2013), Energy intensities, EROIs (energy returned on invested), and energy payback times of electricity generating power plants, Energy Vol. 52 April 2013. Accessible ici ↩
    9. Roz Pidcock (2013), Carbon briefing: Making sense of the IPCCs new carbon budget, Carbon Brief. Accessible ici ↩
    10. James Hansen et. al. (2008), Target Atmospheric CO2: Where Should Humanity Aim?, The Open Atmospheric Science Journal. Accessible ici ↩
    11. Charles Hall et. al. (2014), EROI of different fuels and the implications for society, Energy Vol. 64. Accessible ici ↩

  • 20 Mai 2016

    Publié par El Diablo

    Union Européenne et /ou capitalisme ? BREXIT OR NOT BREXIT ? (le point de vue de Françis Arzalier)

    Les communistes français peuvent s’honorer d’avoir dès sa fabrication, en traités successifs après la seconde guerre mondiale, combattu l’Union Européenne supranationale, parce qu’elle était une machine de guerre au service du patronat transnational. Car l’objectif de l’UE, dès le départ, consiste à raboter les frontières nationales et les protections sociales conquises au fil des siècles par les luttes des travailleurs, et à obstinément réduire ceux-ci à l’état de consommateurs et de main d’œuvre corvéable à merci, d’un pays à l’autre. Les Communistes d’aujourd’hui, fidèles à leur idéal, et pas seulement au nom galvaudé d’un parti, combattent toujours cette UE néfaste de nature, et refusent le mirage illusoire d’une « autre Europe » qui naîtrait, on ne sait comment, du seul fait qu’elle serait «  de gauche » !

    -Ils ne peuvent donc que se féliciter de voir les divers peuples de l’Europe basculer progressivement vers l’opposition à l’UE. Tous les observateurs politiques le relèvent, les indices se multiplient, à commencer par ce référendum du 6 avril, par lequel plus de 60% des électeurs des Pays-Bas ont dit non au projet de traité entre l’UE et L’Ukraine des nationalistes pro-occidentaux qui rêvent d’une guerre contre la Russie, et qui inonderait le marché du travail néerlandais de salariés ukrainiens sous-payés. Et déjà se profile le prochain référendum au Royaume Uni, qui pourrait l’entraîner à sortir de l’Europe supranationale (Brexit, selon les médias). L’UE étant une calamité, tous les coups qui lui sont portés sont une victoire populaire.

    -Mais faut-il aller jusqu’à s’en féliciter sans analyse, aspirer même à un processus identique, anti UE en France ? On ne peut négliger que la campagne référendaire aux Pays-Bas a été surtout animée et gagnée par des mouvements d’extrême droite, xénophobes, dénonçant « l’invasion étrangère » comme bous émissaire de tous les maux de la société. En Angleterre, c’est aussi la droite la plus conservatrice qui fait écho aux discours anti étrangers de l’UKIP, les partis de gauche et syndicats ne se sont guère engagés pour le « non », et le caractère capitaliste de l’Union ne fait guère partie du débat dans l’opinion. Soyons clairs, une majorité de « non » à Amsterdam n’a rien changé à l’insertion de la société néerlandaise dans le capitalisme transnational, dont la responsabilité ne fut pas ou peu évoquée dans le débat préalable au vote. Au Royaume Uni, le résultat du référendum de juin 2016, même s’il entraînait la sortie de l’UE, ce que l’on peut souhaiter, n’effacera pas les conséquences des « réformes » ultra libérales de la mégère conservatrice Thatcher dès 1979, et de son successeur le souriant travailliste Tony Blair : privatisation, précarisation des contrats de travail, lutte à mort contre les syndicats, l’un des pires bilans du capitalisme en Europe, au détriment des travailleurs.

    -L’UE doit être combattue pour ce qu’elle est, le visage et l’instrument du capitalisme transnational. Il serait infantile d’espérer le vaincre en collaborant avec les partis nationalistes, xénophobes et d’extrême droite, qui en dénoncent les effets par démagogie, mais en approuvent le principe : la loi inexorable du marché. Au demeurant, il n’est pas vrai, contrairement à l’assertion de quelques journalistes et politiciens en quête d’électeurs, que le projet El Khomry de régression sociale soit seulement le fait des « technocrates ultra libéraux de l’UE », malgré les gouvernements et parlements nationaux de l’Europe. Et cela pour une raison fort simple : les dirigeants de l’UE, le Portugais Barroso il y a quelques années, le Polonais Tusk aujourd’hui, le commissaire français Moscovici, etc, ne tiennent leurs pouvoirs supranationaux que des politiciens qui dirigent les États d’Europe. A Bruxelles, Paris, Berlin ou Rome…, ils partagent tous et appliquent tous la même idéologie libérale, le fondamentalisme du marché capitaliste, la croyance que la libre concurrence des capitaux, des marchandises, des mains d’œuvres, suffit à assurer le bonheur des peuples de l’Europe et du monde. Et peu importe que les uns soient des politiciens de droite, et d’autres membres des partis socialistes. Ce ne sont là que querelles subalternes pour l’exercice du pouvoir, amusettes pour le public, pour un même objectif : renforcer l’exploitation de ceux qui ne vivent que de leur travail par les minorités qui possèdent et profitent des patrimoines et des capitaux investis. Les réformes parrainées en France par Macron, El Komry, Hollande, Valls et le MEDEF, ne sont que la reprise de celles « libérales » effectuées auparavant par divers gouvernements d’Europe :

    -celles réalisées aux forceps par madame Thatcher au détriment du prolétariat britannique il y a trente ans déjà, et peaufinées par Tony Blair après 1997 ;
    -celles, drastiques, faites en Espagne par le conservateur Rajoy en 2012, qui, pour diminuer le nombre des chômeurs indemnisés, a simplifié le licenciement des salariés en CDI, dans un paysage social ravagé ; plus de 4 millions de personnes sont toujours officiellement au chômage, soit plus de vingt pour cent de la population active ;
    -celles baptisées « à l’américaine » Jobs Act, appliquées à l’Italie en 2015, par le « démocrate de gauche » Renzi, qui ont consisté essentiellement à multiplier les emplois à temps partiel avec des contrats précaires, à « flexibiliser » encore un peu plus les salariés de la péninsule…

    L’Union Européenne, en l’occurrence, n’a pas initié ces réformes. Ses animateurs se contentent de les approuver, ils croient aux mêmes dogmes du marché capitaliste des capitaux, des marchandises et des hommes. De ces constats découle une évidence en trois volets complémentaires :
    -dénoncer les conséquences du capitalisme, en oubliant de condamner dans son principe l’Union Européenne et ses traités, qui en est l’émanation, est un non-sens politique, ou une escroquerie opportuniste ;
    -mais dénoncer l’UE supranationale sans combattre en chaque pays le capitalisme qui lui a donné naissance, relève de la malhonnêteté politicienne ;
    -C’est pourquoi les Communistes ne sauraient en aucun cas « faire un bout de chemin » avec des organisations nationalistes, d’extrême droite, xénophobes, qui détournent le combat contre l’UE vers des boucs émissaires, au profit de l’exploitation capitaliste.

    Francis ARZALIER

    le 25 avril 2016.

     

    SOURCE:


  • 20 Mai 2016

    Publié par El Diablo

    Le PARDEM (Parti de la démondialisation) ne se place pas dans le clivage gauche-droite

    par le Parti de la démondialisation (Pardem)
     
    Le 17 mai 2016.
     
    Aujourd’hui, 17 mai 2017, deux grands quotidiens français, Le Monde et l’Humanité, ont mis à leur Une la question de la gauche. Le premier se demande « Peut-on encore sauver la gauche ? ». Le second donne deux pages au secrétaire national du PCF, Monsieur Laurent, qui affirme « Remettons la gauche debout ! ». Le Parti de la démondialisation, quant à lui, conteste la pertinence du clivage gauche-droite qui est aujourd’hui devenu vide de sens. Sur l’essentiel, les principaux partis de gauche et de droite sont d’accord. Mais qu’est-ce que c’est, selon nous, l’essentiel ? C’est avoir la bonne analyse des rapports de force planétaires et comprendre ce qu’est la mondialisation néolibérale car c’est elle qui imprime sa dynamique, particulièrement en Europe avec l’Union européenne et l’euro.

     
    Le projet néolibéral est une autre façon d’organiser le capitalisme.
     

    Théorisé dès les lendemains de la Seconde Guerre mondiale, il va se déployer à partir de la fin des années 1960 et se généraliser au début des années 1980. Son but essentiel est la suppression discrète et progressive de la souveraineté des États-nations, c’est-à-dire la destruction de la démocratie et de la politique. Tel est en effet le moyen le plus efficace pour interdire toute possibilité de politiques qui pourraient contrevenir aux intérêts des classes dominantes incarnés en particulier dans les firmes multinationales. Il fallait stopper la progression des acquis sociaux et démocratiques depuis le New Deal américain en 1933, le Front populaire français en 1936, les économies mixtes en Europe de l’Ouest au lendemain de la Seconde Guerre mondiale, les luttes syndicales et de libération nationale des pays colonisés dans les années 1960-1970.
     
    La mondialisation néolibérale repose sur trois piliers : le libre-échange qui met en concurrence les systèmes sociaux, la libéralisation financière qui place l’économie réelle et les finances publiques sous la domination des marchés financiers, les traités internationaux et les institutions multilatérales qui sont les gardiens de l’ordre néolibéral mondial, avec l’Union européenne et l’euro comme chef d’œuvre. L’agencement de ces trois piliers vise à permettre l’activité la plus libre possible pour les firmes multinationales.
     
    À aucun moment, les cinq universitaires interrogés par Le Monde, ni Monsieur Laurent du PCF, n’évoquent ces aspects décisifs ? Le libre-échange ? Connaît pas. La globalisation financière ? On n’y peut rien. Les traités internationaux néolibéraux ? La France ne peut pas s’isoler…
     

     
    Dans les articles du Monde et de l’Humanité de ce jour, la mondialisation néolibérale, et son avatar européen, n’existe pas.
     
    Personne n’en parle. C’est un non-sujet. C’est un détail qui ne mérite même pas d’être évoqué.
     

    Quelle insouciance ! Quelle irresponsabilité ! Comment est-il possible d’être aussi aveuglé ? Comment nier que la mondialisation néolibérale, la domination des firmes multinationales occidentales et des marchés financiers, ainsi que les politiques de l’Union européenne, ont limité considérablement les marges de manœuvre des États ?
     
    La lecture du
    Monde et de l’Humanité de ce jour est pathétique et confirme qu’il faut fuir – de toute urgence – cette « gauche » incapable de faire face au capitalisme néolibéral. On nous dira que nous sommes plus sévères avec la gauche qu’avec la droite. Oui ! Pour deux raisons. D’abord, la droite est fidèle à elle-même : la défense traditionnelle des classes dominantes. Elle fait son boulot. Quant à la gauche d’aujourd’hui, elle a renoncé à la défense des classes dominées. Bien sûr, elle manie le pathos pour sauvegarder les apparences (« l’humain d’abord »). Mais comment placer « l’humain d’abord » sans remettre en cause la mondialisation néolibérale, l’Union européenne, l’euro ? C’est une arnaque ! Ensuite, beaucoup de membres du Pardem ont eu le cœur à gauche, et parfois pendant longtemps. Ils ne se reconnaissent plus dans cette gauche.

     
    Le clivage fondamental n’est plus entre la gauche et la droite, mais entre l’oligarchie et le peuple.
     
    Il est entre les ultra-riches et tous les autres. Entre les classes dominantes et les clases dominées, entre les classes exploiteuses et les classes exploitées.
     

    Le Monde, ce jour, a interrogé cinq universitaires.
     
    Michel Wieviorka, sociologue, juge qu’ « un cycle s’achève pour une gauche entrée en phase vraisemblablement terminale ». Les causes ? Une série de constats sans originalité : « elle a dirigé le pays sans vision, à grand renfort de com, de sondages et de jeux politiciens… ». Tout cela n’est pas faut, mais le sociologue ne cherche pas à comprendre les causes profondes de ces dérèglements.
     

    Laurent Bouvet, professeur de sciences politiques, estime que la cause principale de cette faillite est « l’économisme ». L’économisme est en effet un gros défaut du Parti socialiste, mais le professeur de science politique ne cherche pas à comprendre ce qui se cache derrière.
     

    Jean-Louis Laville, économiste et sociologue, croit que la gauche se redressera par « les communs et l’économie sociale et solidaire ». Nul ne contestera l’intérêt de l’économie sociale et solidaire. Mais ne faire que cela, c’est renoncer aux politiques macro-économiques, c’est refuser la rupture avec la mondialisation néolibérale. C’est accepter de n’agir que dans les marges.
     

    Gilbert Cette, professeur associé en économie, considère, par exemple concernant le salaire minimum, que la gauche refuse d’en sortir. Il se trompe, le PS est devenu très « moderne » sur ce sujet.
     

    Fabienne Brugère, professeur de philosophie, dénonce l’abandon de « quatre mots qu’un projet socialiste devrait articuler » : care, justice, futur, citoyenneté. So what ?


     
    Monsieur Laurent ne veut plus de François Hollande, mais il veut encore du Parti socialiste
     
    Monsieur Laurent, le responsable du PCF, dans l’Humanité de ce jour, cultive le même mutisme que ces doctes professeurs, dont l’univers est vide de mondialisation néolibérale, de classes dominantes, d’Union européenne, d’euro… Il dit deux choses.
     
    D’abord, son projet politique est de s’appuyer sur les 58 députés PS, EELV et PCF qui ont voté contre le projet de loi El Khomri. Il pense qu’une nouvelle alliance de gauche est possible sur ces bases, pour les élections de 2017.
     
    Ensuite, il confirme que le PCF veut « rompre avec le libéralisme ». C’est bien. Mais comment est-ce possible sans rompre avec la mondialisation néolibérale et son chef d’œuvre qu’est l’Union européenne ?
     
    Pour le Pardem, tout projet qui tente de réenchanter la notion de « gauche » (Parti de « gauche »… Front de « gauche »… Autre « gauche »…) se heurte désormais immanquablement à un scepticisme d’acier de la part du peuple, très majoritairement, qui refuse de se laisser berner une nouvelle fois en mettant au pouvoir une élite de gauche, qu’elle soit nouvelle, plurielle, seconde, se présentant sous le vocable d’un parti ou d’un front, ceci ou cela…
     

     


  • 19 Mai 2016

    Publié par El Diablo

    Vues de la manifestation parisienne du 19 mai 2016 (photos: el diablo)
    Vues de la manifestation parisienne du 19 mai 2016 (photos: el diablo)

    Vues de la manifestation parisienne du 19 mai 2016 (photos: el diablo)

    Jeudi 19 mai, près de 400 000 personnes ont rejoint les manifestations contre la loi Travail, soit près du double de mardi dernier, des dizaines de milliers d’autres étaient sur les barrages et les piquets de grève. 6 raffineries sur 8 sont arrêtées ; la grève est reconduite dans des ports comme Nantes-Saint Nazaire ou Rouen ;

    1 cheminot sur 3 est en grève ; chez Rhodia, 16 sites sur 18 sont en grève, les salarié-e-s des aéroports de Paris sont en grève reconductible, la mobilisation des routiers s’étend... Et ce ne sont que quelques exemples !

    Et le Premier Ministre ose parler d’essoufflement ! Il ose s’interroger sur la pertinence des manifestations ! Les salarié-e-s, vent debout contre la loi Travail, les 70% de la population opposés au projet de loi, les milliers de manifestants bravant les discours alarmistes sur les manifs viennent de lui apporter une réponse magistrale.

    Ils ont pris leurs responsabilités, ce qui est loin d’être le cas du gouvernement.

    Oui, irresponsable de parier sur le pourrissement d’un mouvement !

    Oui, irresponsable d’entretenir un climat anxiogène !

    Oui, irresponsable de dresser les citoyens les uns contre les autres !

    Oui, irresponsable de s’obstiner à vouloir imposer une loi qui fait l’objet d’un tel rejet !

    Que dire enfin du Premier Ministre qui voudrait opposer manifestations sociales et initiatives sportives et culturelles. Toutes doivent pouvoir se dérouler sans limitation des libertés individuelles et collectives.

    Les travailleur-euses, les retraité-e-s, les privé-e-s d’emploi ont le droit de faire entendre leur voix en toute sécurité ! C’est ça l’Etat de droit, c’est ça la démocratie !

    Monsieur Valls, cessez vos provocations, n’ayez pas peur du débat, ne perdez pas votre sang froid !

    La CGT continuera pour sa part à prendre ses responsabilités, avec pour volonté, dans le cadre unitaire le plus large possible, le retrait de la loi Travail. Sa détermination est entière. Elle appelle l’ensemble des salarié-e-s à poursuivre la mobilisation, à se rassembler en assemblées générales, à participer aux grèves et manifestations.

    Ensemble, gagnons le retrait de la loi Travail et la conquête de nouveaux droits, un code du travail du XXIème siècle.

    La CGT

    Montreuil, le 19 mai 2016

     

    SOURCE: