• samedi 17 octobre 2015

    Nigeria: des bombes de fabrication française utilisées par Boko Haram

    Selon une organisation qui milite pour l’éradication des bombes à sous-munitions, armes destructrices et interdites, le groupe islamiste Boko Haram possède des armes à fragmentation provenant de stocks de l’armée française. Boko Haram utilise ces armes pour commettre des attentats.

    bokoharam

    «Le haut-commandement militaire a découvert que les terroristes de Boko Haram utilisaient ces instruments létaux, visant des colonnes de véhicules, des marchés, des lieux de cultes ou des troupes », a indiqué le porte-parole du Quartier général de la Défense nigérian Rabe Abubakar.

    Pour M. Abubakar, des caches de ce type d’armes avaient été découvertes récemment dans l’Etat d’Adamawa, dans le nord-est du pays.

    L’organisation Cluster Munition Coalition (CMC) qui milite pour l’éradication des bombes à fragmentation a révélé l’information expliquant que des photographies postées sur le compte Twitter du Quartier général de la Défense nigérian démontrent que les sous-munitions retrouvées par l’armée proviennent de bombes BLG-66 de fabrication française.

    Les bombes à fragmentation sont interdites par une convention internationale depuis 2010, car particulièrement meurtrières pour les populations civiles. Il s’agit de bombes larguées d’avion ou tirées au canon, qui libèrent à basse altitude des centaines de charges explosives qui dévastent une large zone. Le Nigeria a signé mais n’a pas ratifié cette convention.

    Pour les autorités militaires, il s’agit de vieux stocks de bombes à fragmentation britanniques BL-755.

    Les militants de Boko Haram ont démantelé des bombes pour récupérer les sous-munitions et les utiliser pour équiper des kamikazes avec des vestes d’explosifs, pour des voitures piégées, ou des engins explosifs au passage d’un convoi, selon l’expert Bob Seddon, ancien de l’armée britannique.

    Boko Haram a multiplié ces derniers mois les attentats-suicides et les attaques, tuant au moins 1.600 personnes depuis début juin au Nigeria et aux pays voisins. (selon "Oeil d'Afrique")

     
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  • La Russie à Hollande : Brade toujours et mets les voiles


    La Russie répond à la nouvelle tentative du président français de vendre des navires à Moscou


    Par Tyler Durden – Le 15 octobre 2015 – Source ZeroHedge


    Deux mois après que le président français François Hollande, sous la forte pression de l’Otan, ait décidé d’abandonner un accord pour la livraison des deux porte-hélicoptères Mistral à la Russie qui ont été vendus à l’Égypte à la place (La même Égypte dont les réserves de change sont en chute libre, dont le système fiscal est en plein désarroi, qui vient de dévaluer sa monnaie, et qui ne pourrait se permettre cet achat de $1,1 Mds si la CIA [Ou l’Arabie Saoudite ? NdT] n’avait pas remis à son dictateur militaire, le cash dans une enveloppe), le même président français a annoncé mercredi qu’«il prévoit de vendre de nouveaux navires de guerre à la Russie dans un proche avenir».

    Cité par Associated Press lors d’une visite au chantier naval de Saint-Nazaire dans l’ouest de la France, Hollande a dit que «ça allait bien avec la Russie, qui a accepté d’annuler le contrat. Je pense même que nous aurons des partenariats pour de nouveaux navires». Il n’a pas précisé si ces navires pourraient être des navires militaires. Plus d’info sur AP:

    Hollande est venu à bord d’un des navires de guerre qui avait été initialement baptisé le Vladivostok, en référence au port russe. L’inscription sur la coque a été effacée et remplacée par de la peinture grise.

    La vente des Mistrals était censée être la plus grande vente d’armes jamais effectuée par un pays de l’Otan à la Russie, jusqu’à ce que l’affaire tombe à l’eau en raison de la crise en Ukraine. La France a remboursé les $950 millions  ($1 Mrd) déjà versés par la Russie et a vendu les navires à l’Égypte, qui a signé un contrat de $950 millions la semaine dernière.

    «Je devais les vendre à un pays qui avait besoin d’assurer sa propre sécurité mais ne menace personne», a déclaré Hollande.

    Les navires d’assaut peuvent chacun transporter 16 hélicoptères de combat, 700 soldats et jusqu’à 50 véhicules blindés. Ils sont livrables aux autorités égyptiennes d’ici mars 2016.

    Les navires sont censés arriver en Égypte à l’été 2016, mais d’abord ils doivent être déséquipés des systèmes de commandement, de contrôle et de communication développés par la Russie.

    La Russie a réagi promptement avec le message simple et bref qui suit :

    Paris cherche à vendre de nouveaux navires à la Russie comme le président Français François Hollande l’a déclaré lors de sa visite au chantier naval de Saint-Nazaire. Le président, toutefois, a négligé de mentionner si la Russie était réellement désireuse d’acheter un tel matériel à la France.

    Ou, pour résumer tout ce qui précède: «Brade et mets les voiles». [Sale away : jeu de mot sur Sail away, NdT]

    Traduit par Hervé, relu par jj pour le Saker Francophone


  • Gavés de propagande, les Russes ? Encore un mensonge de l’Ouest !


    Par Nina Kouprianova – Le 11 octobre 2015 – Source : Fort Russ

     

    Le cliché de la propagande d’État russe dans les médias occidentaux grand public a la vie dure ; il se porte même très bien ces derniers temps. Cette insistance manifeste sa propre perte de contrôle, au moment où les anciens modèles de télé d’informations câblées perdent du terrain, que le paysage médiatique se diversifie, et que des plateformes Web variées permettent à des internautes plus jeunes et expérimentés de trouver de nouvelles sources d’information. Cette sorte d’accusation répétitive a aussi pour but de délégitimer les émissions internationales en langue russe et d’expliquer le soutien massif dont jouit M. Poutine dans son pays.

     

    Cette notion s’appuie sur plusieurs suppositions qui sont liées entre elles :

    • les pays occidentaux n’ont pas de médias d’État ;
    • les médias privés sont impartiaux ;
    • les médias d’État ne peuvent pas présenter des points de vue opposés et sont de ce fait inférieurs aux médias privés ;
    • les spectateurs, auditeurs et lecteurs, le grand public et même le public éduqué, ne sont pas capables d’analyser l’information qu’ils reçoivent.

    Examinons les inconsistances de ces suppositions diffusées par ceux qui se considèrent eux-même comme le modèle du journalisme consciencieux, capable d’établir et de critiquer les procédures d’analyse et d’investigation pour tout le monde. Aussi allons-nous procéder à l’examen du paysage médiatique russe, en nous intéressant aux sujets politiques, économiques et sociaux (donc, tout ce qui ne relève pas du divertissement). Mettons-nous d’accord pour définir la propagande : ce n’est pas seulement une information que l’on diffuse, qui appuie un point de vue partisan – personne n’est immunisé contre cela – mais c’est plutôt une information que l’on transmet et qui induit délibérément en erreur, une information qui peut omettre un élément important, alors que les preuves du contraire sont justement facilement accessibles.

     

    Traduction du tweet : ISIS, Poutine et l'Iran sont libres de devenir cinglés alors que toutes les nations occidentales diminuent leurs moyens de défense. 

    Primo, l’Occident possède et gère des médias d’État – financés par les impôts – certains d’entre eux visant spécifiquement certaines audiences à l’étranger et faisant depuis des lustres une concurrence déloyale à Russia Today – l’épouvantail habituel des accusations que l’on a rappelées au début. La BBC pour la Grande-Bretagne, la CBC pour le Canada, la Deutsche Welle pour l’Allemagne, ainsi que PBS et bien sûr Voice of America pour les États-Unis, sont parmi les exemples les plus frappants. Donc, l’argument au sujet de la propagande sur les médias d’État qui permet d’opposer toujours l’Ouest libre à la Russie autoritaire se contredit dès le départ. Après tout, si l’hypothèse au sujet du manque de pluralisme s’applique seulement aux médias d’État, alors cela s’applique aussi aux réseaux européens et américains.

    Deuxio, l’idée que de grandes sociétés privées versent des milliards aux médias sans être citées dans les émissions, ni intéressées par la ligne éditoriale, idéologique, ou les plannings publicitaires [par générosité désintéressée donc, NdT], va à l’encontre de toute la logique de ces entreprises fondées sur le profit financier. En fait, depuis quelques dizaines d’années, le nombre de sociétés possédant et gérant des chaînes et réseaux majeurs et des maisons de presse aux États-Unis, a passé de 50 à 6. Ce qui veut dire que les mêmes entreprises mettent en avant les mêmes intérêts, ou même les points de vue personnels de leurs propriétaires, grâce à une large diversité de chaînes, réseaux et organes de presse, cette diversité faisant écran de fumée.

    Tertio, le contenu et les analyses des médias privés occidentaux sur la géopolitique ou les relations internationales non seulement se ressemblent tous comme deux gouttes d’eau, mais, de plus, suivent fidèlement les éléments de langage de Washington et Bruxelles. Regardez la montée de la diabolisation de la Russie, d’une manière générale, et de Poutine, spécialement ces dernières années. Alors que le thème «la Russie est finie» a fait son chemin depuis le premier mandat de M. Poutine, le retour du pays sur la scène internationale, après l’effondrement des années 1990, notamment avec la négociation sur les armes chimiques en Syrie en 2013, a fait croître ces critiques sans fondement et, parfois même, des informations carrément risibles ont explosé de manière exponentielle.

    Puis vint l‘inutile campagne de dénigrement des jeux Olympiques de Sotchi, la couverture du Maïdan comme une-protestation-pacifique, l’occupation de la Crimée en dépit du référendum, les invasions quasi-quotidiennes de l’Ukraine par la Russie, la mise en accusation de M. Poutine pour la destruction du MH17 à peine quelques minutes après le crash, la critique de l’opération anti-terroriste de la Russie en Syrie, alors qu’elle se fait sur demande du gouvernement syrien.

     

    Traduction des tweets : 
    Julia Loff - La Russie vise des cibles non ISIS, renforçant ainsi ISIS.
    Marc Adomanis - Pour info, le groupe "non-ISIS" est al-Quaïda

    Bien sûr, plusieurs de ces représentations des faits ont été démenties plus tard, mais la première impression a été donnée pour causer le plus grand tort possible.

    L’effet chambre d’écho ne signifie pas nécessairement que les journalistes occidentaux coopèrent avec leur gouvernement, même s’ils le font parfois, comme dans le cas de l’interview de Julian Assange à 60 Minutes en 2011.

     

    Traduction du tweet : 60 minutes m’assure qu’ils ont soulevé de nombreuses questions et préoccupations que nous avons suggérées pendant l’interview

    Ce que cela signifie c’est que dans certains cas les intérêts des grandes sociétés et ceux de l’État coïncident – ainsi, quand le fils du vice-Président américain, Joe Biden, intègre le conseil d’administration d’une société ukrainienne de gaz  – ou simplement que les journalistes travaillent au sein du même milieu idéologique. Bien sûr, ce n’est pas une excuse pour passer sous silence les faits qui pourraient déranger la ligne éditoriale, ne pas apprendre la langue du pays, alors que l’on clame sa propre expertise supposée, ou, pour cette raison, ne jamais se rendre sur place.

    Maintenant, regardons le paysage médiatique russe, et tout d’abord la soi-disant opposition. La station de radio Echo of Moscow (Ekho Moskvy), TV Rain (Dojd), Novaia Gazeta, Gazeta.Ru, le journal Grani, parmi d’autres, sont les exemples les plus frappants de médias d’idéologie libérale, copiant servilement l’opinion occidentale dominante, et parfois même allant bien au-delà.

    Certaines célébrités et personnalités des médias, comme Xenia Sobchak, actuellement sur TV Rain, promeuvent cet ordre du jour au travers des réseaux sociaux à des centaines de milliers d’abonnés. Ces médias répètent sans cesse des informations et des arguments qui sont presque identiques à ceux qui diabolisent la Russie à l‘Ouest – depuis l’invasion de l’Ukraine jusqu’au non-bombardement de État islamique en Syrie. Certains sont affiliés à des médias occidentaux subventionnés, comme Voice of America pour Grani et TV Rain.

    Ces plateformes représentent les opinions de moins de 10% de la population russe, essentiellement des jeunes urbains aisés. Ce sont eux qui sont surreprésentés et idéalisés dans les médias occidentaux.

    En même temps, il y a d’autres types de médias d’opposition ou, du moins, ceux qui contestent certaines décisions-clés du Kremlin, et dont les opinions ne sont jamais écoutées à l’Ouest. Parmi eux, le journal traditionaliste et conservateur Zavtra  et sa chaîne TV Den’, connus pour leur attitude critique envers les traits idéologiquement libéraux de la Russie post-soviétique. Au début des années 1990, Eltsine, le chouchou démocrate des Occidentaux, est allé jusqu’à interdire cette publication.

    Aujourd’hui, il soutient ce qu’il décrit comme une trajectoire patriotique. Pour autant, cela ne coïncide pas nécessairement avec les actions du Kremlin. Certains de ses contributeurs militent pour une intervention militaire en Ukraine pour renverser le gouvernement post-Maïdan – après que celui-ci a attaqué le Donbass – contrairement aux efforts de Moscou, pour faire respecter les traités Minsk-1 et Minsk-2. Donc, les médias occidentaux surreprésentent une seule sorte d’opposition – celle qui répète comme un perroquet la bonne parole [celle de l’Occident] – et ignorent complètement l’autre.

    Et tout cela suit la tendance qui consiste à réduire la soi-disant société civile russe aux libéraux idéologiquement pro-Ouest et à se focaliser sur les Orthodoxes conservateurs, les monarchistes et les Cosaques, parce qu’ils sortent des clous médiatiques.

    La plupart des médias russes sont possédés par l’État ou affiliés. Et comme tels, ils adhèrent à la trajectoire générale du Kremlin. Mais nous avons déjà vu que les médias privés fonctionnent de la même manière. Et n’oublions pas non plus que cette politique est soutenue par l’immense majorité des Russes, tournant autour des 80% depuis 2014. Plus important encore, n’allez pas croire que les points de vue opposés restent inaudibles, ni que les invités des émissions politiques n’aient pas de liberté de parole.

    C’est tout le contraire.

    Des émissions politique aux heures de grande écoute donnent la parole à des avis divers, souvent en direct, ce qui veut dire qu’il n’y a aucune ligne à suivre. Comparez cette pratique à la censure partielle de la récente interview de M. Poutine donnée aux médias américains. Les intervenants à la télévision d’État russe peuvent être des journalistes, des faiseurs d’opinion et même des responsables politiques venus des États-Unis, d’Allemagne, de Tchéquie, de Finlande, de Pologne, de Grèce, de Turquie, des États baltes, d’Ukraine et de Syrie, sans oublier l’opposition libérale tant chouchoutée à l’Ouest.

    Certains représentent leurs intérêts nationaux, d’autres des points de vue totalement opposés à ceux du Kremlin. Voulez-vous assister à un débat entre Syriens sur la situation politique du pays? Ou voir des représentants du Donbass discuter avec des analystes politiques kiéviens ? Channel 1 ou Rossiia seront ravies d’exaucer vos souhaits.

    Voici maintenant une petite sélection d’intervenants étrangers venus débattre à la télévision d’État russe ces dernières années, plusieurs d’entre eux étant très critiques à l’égard du Kremlin.

    L’analyste politique Nizar Bush (Syrie) débat avec Raed Jaber (Syrie), journaliste à Al Hayat [quotidien arabe basé à Londres, proche des thèses occidentales, NdT], au cours de Time Will Tell (Vremiia Pokajet), sur Channel 1 :

    Nizar Bush

    Raed Jaber

    Robert Pszczel, directeur opérationnel du bureau d’information de l’Otan à Moscou, apparaît souvent à Sunday Evening (Voskresnyi Vecher) with Vladimir Soloviev, sur Rossiia Channel, ainsi que Simon Shuster (États-Unis), du Time.

    Robert Pszczel

    Simon Shuster

    Ulrich Heyden (Allemagne), de Der Freitag, est venu à Politics (Politka) , sur Channel 1.

     

     

     

    Alexei Venediktov

    Alexei Venediktov, un journaliste idéologiquement libéral avec beaucoup de sympathie pour l’Ouest, qui travaille à Echo of Moscow, a été invité à Norkin’s List (Spisok Norkina) , sur NTV Channel.

     

    Fouad Abbasov

    Fouad Abbasov, de l’agence de presse Ihlas (Turquie) s’exprime à Time Will Tell (Vremiia Pokajet), sur Channel 1.

     

     

    Michael Bohm

    Michael Bohm (États-Unis), Moscow Times, Al Jazeera, Echo of Moscow et autres, sont invités au Right To Be Heard (Pravo Golosa), sur TVC Channel (Photo : Korotchenko) [Ce sont des organes de presse pro-occidentaux ou pro-américains, NdT]

     

    Les tweets qui suivent viennent tous de Igor Korotchenko, expert militaire, et de ses interventions à la télévision, seulement pour ces derniers mois.

    Michael Bohm a été reçu sur le plateau de Time Will Tell (Vremiia Pokajet), sur Channel 1, «crachant sur Assad».

     

    Traduction du tweet : Michael Bohm sur canal 1, dans le programme "Le temps nous dira" aboyant sur Bachar al-Assad

    Korotchenko ajoute :

    Boris Nadejdin, politicien idéologiquement libéral et commentateur pro-occidental, argumentant à Sunday Evening (Voskresnyi Vecher) with Vladimir Soloviev, sur Rossiia Channel.

     

    Traduction du tweet : Rencontre avec Boris Nadejdine en marge du programme "Une soirée avec Vladimir Soloviev"

    Nikolai Zlobin (à gauche), un analyste politique russo-américain au Center on Global Interests à Washington, s’exprimant à Sunday Evening (Voskresnyi Vecher) with Vladimir Soloviev, sur Rossiia Channel :

     

    Traduction du tweet : Pas dupe l'Amérique! Le communiste Leonid Kalashnikov et l'analyste politique américain Nikolai Zlobin sur le plateau de V. Solovyov

    Michael Bohm et le journaliste tchèque Jiri Just sont sur le plateau de Time Will Tell (Vremiia Pokajet), sur Channel 1.

     

    Traduction du tweet : Nous sommes inséparables – Michael Bom et Jiri Joost

    Michael Bohm et l’analyste politique ukrainien Vyacheslav Kovtun, partisan de l’actuel pouvoir à Kiev, sur la chaîne Ostankino.

     

    Traduction du tweet : Vous regardez la transmission avec Michael Bohm, Kovtun et Vyacheslav?

    Vyacheslav Kovtun à l’émission Vesti.doc TV, sur Rossiia Channel.

     

    Traduction du tweet : Le programme "Vesti.doc" analyste politique ukrainien Vyacheslav et Kovtun.

    Olesya Yakhno, une analyste politique ukrainienne, elle aussi partisane du régime actuel à Kiev, se trouve à Time Will Tell (Vremiia Pokajet), sur Channel 1 :

     

    Traduction du tweet : une nouvelle image de la politologue ukrainienne Olesya Yahno – tout en jaune.

    Il est important de noter que nombre d’entre eux, ainsi que d’autres intervenants, sont des invités réguliers (chaque semaine, voire chaque jour) de la télévision d’État russe, au-delà de cette rapide sélection. Maintenant, voyez-vous souvent leurs homologues russes – hauts fonctionnaires, faiseurs d’opinion, journalistes – sur les chaînes occidentales de télévision, particulièrement ceux qui représentent l’opinion largement majoritaire en Russie ?

    Evguenii Poddubnyi sur Rossiia Channel, en Syrie, septembre 2015. Source : Instagram @epoddubny

    Quand on en arrive à l’information directe, les journalistes russes se rendent sur place. Des correspondants de guerre bien connus, comme Dmitrii Stechine et Sacha Kots du quotidien Komsomolskaia Pravda ou Evguennii Poddubnyi de Rossiia Channel ont été sur toutes les zones de conflit au Moyen-Orient, en Afrique du Nord, en Asie Centrale et en Ukraine. C’était tout simplement la norme professionnelle partout. Mais récemment, les choses ont changé. Prenez le conflit en Ukraine, par exemple. Depuis des mois, la plupart des agences de presse occidentales récupèrent leur information des déclarations du gouvernement de Kiev – alors qu’il est engagé dans une opération militaire contre ses propres citoyens dans le Donbass – au lieu d’aller sur place. Et quand ils le font, la plupart choisissent de rester dans le confort de leur hôtel, louant les services de pigistes locaux pour faire le sale boulot, comme le raconte Sacha Kots :

    «A Donetsk, tout un hôtel est rempli de journalistes occidentaux, et je n’en ai jamais vu un seul dehors, c’est-à-dire au front, dans les positions de la milice. Leur méthode de travail : trouver des pigistes locaux qui sortent pour faire les photos et ramener quelques vidéos. [Ces journalistes] racontent ensuite les émotions et le vécu de quelqu’un d’autre.»

     

    Sasha Kots et Dmitrii Steshin, pour le journal Komsomolskaia Pravda, février 2015, Debaltsevo

    Bien sûr, les relations internationales et la géopolitique ne sont pas les seuls sujets, contrairement à ce que certains voudraient vous faire croire.

    De fait, plusieurs parmi les émissions politiques les plus regardées, comme la quotidienne déjà mentionnée Time Will Tell (Vremiia Pokajet), coupent souvent leur temps d’antenne en deux parties, avec un temps de nouvelles entre les deux. Depuis la hausse des prix alimentaires, certains échecs dans l’éducation scolaire et la qualité des soins médicaux jusqu’à la mise en examen d’un autre gouverneur corrompu, des dizaines d’experts et des spectateurs échangent des commentaires acharnés, soutenus par toutes sortes de statistiques.

    Time Will Tell (Vremiia Pokajet), sur Channel 1, critique les autorités régionales pour leurs dépenses excessives en billets d’avion.

    Et ceux qui écrivent de l’étranger? Tous ces programmes sont accessibles d’un clic sur les sites Web des chaînes du pays, 1TV.ru, NTV.ru et RUSSIA.tv, parmi d’autres, ou sur Youtube, tranquillement chez soi, de n’importe quel endroit du monde. Tirez-en vos propres conclusions. Notamment: pourquoi tant de commentateurs sur la Russie dans les médias occidentaux passent-ils sous silence des informations cruciales sur le paysage médiatique russe?

    Et que dire des téléspectateurs, auditeurs et lecteurs russes, dont de nombreux Occidentaux raillent l’incapacité à avoir un esprit critique ?

    Primo, ce pays figure en bonne place dans les classements internationaux pour le niveau de son enseignement.

    Deuxio, ses citoyens sont portés à se méfier des médias, à cause de leur longue expérience derrière le Rideau de fer. Bien que nous devons noter que cela se passait en URSS, ce n’était pas seulement que l’information disséminée n’était pas exacte, mais qu’elle était souvent interprétée selon une lecture idéologique, très particulière et inapplicable.

    Tertio, les Russes les plus jeunes sont des utilisateurs expérimentés du Web, et nombreux sont ceux qui parlent des langues étrangères. Bien sûr, il y a un grand nombre de plateformes très connues en Russie qui traduisent les contenus étrangers pour ceux qui ne connaissent pas ces langues. Ces plateformes, comme InoSMI (médias étrangers) et InoTV (télévisions étrangères), traitent de nombreux articles et vidéos fort peu favorables à la Russie, dans la ligne du climat délétère antirusse qui sévit dans les médias officiels de l’Ouest. Maintenant, combien de médias russes sont traduits sur les médias occidentaux, pour proposer d’autres points de vue ?

    Les médias russes ne sont pas parfaits. Mais d’une manière générale, ils représentent une réelle diversité de contenus sociaux, économiques et politiques, et la plupart d’entre eux sont disponibles sur les médias d’État.

    C’est ainsi que les citoyens russes sont mieux informés sur l’opinion publique occidentale, que les Occidentaux ne le sont sur l’opinion publique russe. Certains découvriront cela avec étonnement, mais seulement s’ils sont passés à côté de cette vérité depuis 20 ans : le Kremlin a choisi non seulement de persuader l’opinion avec une censure ferme, mais aussi de laisser s’établir un débat sain.

    Nina Kouprianova

    Traduit par Ludovic, relu par jj et Diane pour le Saker Francophone  (vous avez la traduction des tweets, mais si vous voulez voir les originaux , allez sur le site du SF)


  • 16/10/15

    SYRIE - Alain Chouet : nos ministres sont-ils mal conseillés ou naïfs sur la Syrie?

     

    Sur le FIGARO

     

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    Je vous propose une analyse d'Alain Chouet, ancien haut-responsable de la DGSE, et spécialiste de la Syrie, pays où il se rend depuis 40 ans. Une analyse iconoclaste sur les événements dramatiques qui se déroulent sur le terrain depuis un an et demi, et plus largement sur les acteurs qui tirent les ficelles dans les coulisses des révoltes arabes en cours. On peut ne pas être d'accord, mais son point de vue argumenté et étayé est à verser au débat.

    L'expression "printemps arabe" est censée faire référence au « Printemps des peuples » de 1848. Depuis la révolte de Sidi Bouzid, le 17 décembre 2010, la contagion s'est étendue de la Tunisie successivement à l'Égypte, à la Libye, à Bahrein, au Yémen et enfin en Syrie.


    Contrairement à ce qui a pu être dit, ces contestations populaires, d'une ampleur et d'une intensité très variables, n'ont pas été le fait des "réseaux sociaux", dans des pays où l'accès à Internet est réduit à une minorité de personnes "branchées" et où les moyens de blocage du Net sont très développés. Même si les aspirations de ces divers peuples visaient à chasser des dirigeants corrompus pour favoriser l'instauration d'une démocratie, les manifestants en reprenant le slogan « Dégage ! » (« Erhal » en arabe) entendaient réclamer un meilleur partage des richesses pour améliorer leurs conditions de vie, obtenir des emplois et retrouver une certaine dignité (« karama » en arabe).

    En fait, ces révoltes, révolutions ou encore « réveil arabe » ont en commun d'avoir été financées par le Qatar et d'autres monarchies du Golfe et d'avoir été encadrées par les Frères musulmans. Le résultat ne s'est pas fait attendre : on en voit déjà les effets en Tunisie, en Libye et bientôt en Égypte.

    La question que l'on est en droit de se poser est : par quel miracle, les Européens ont-ils pu soutenir à ce point des mouvements qui vont à la fois à l'encontre des intérêts mêmes de ces populations et aussi des nôtres. Si la démocratisation de ces pays ne nous laisse pas indifférent, les voir retomber dans une nouvelle forme de soumission plus insidieuse n'augure rien de bon pour l'avenir. Depuis plus d'un an, ce printemps arabe n'en finit pas.

    La Syrie est le dernier pays à avoir été pris dans une tourmente qui a mis le pays à feu et à sang. Les pires conjectures formulées au premier semestre 2011 concernant les mouvements de révolte arabes deviennent aujourd’hui réalité. Je les avais largement exposées dans divers ouvrages et revues à contre courant d’une opinion occidentale généralement enthousiaste et surtout naïve. Car il fallait tout de même être naïf pour croire que, dans des pays soumis depuis un demi-siècle à des dictatures qui avaient éliminé toute forme d’opposition libérale et pluraliste, la démocratie et la liberté allaient jaillir comme le génie de la lampe par la seule vertu d’un Internet auquel n’a accès qu’une infime minorité de privilégiés de ces sociétés. Une fois passé le bouillonnement libertaire et l'agitation des adeptes de Facebook, il a bien fallu se rendre à l'évidence. Le pouvoir est tombé dans les mains des seules forces politiques structurées qui avaient survécu aux dictatures nationalistes parce que soutenues financièrement par les pétromonarchies théocratiques dont elles partagent les valeurs et politiquement par les Occidentaux parce qu'elles constituaient un bouclier contre l'influence du bloc de l'Est : les forces religieuses fondamentalistes. Et le « printemps arabe » n'a mis que six mois à se transformer en « hiver islamiste ».

    En Tunisie et en Égypte, les partis islamistes, Frères musulmans et extrémistes salafistes se partagent de confortables majorités dans les Parlements issus des révoltes populaires. Ils cogèrent la situation avec les commandements militaires dont ils sont bien contraints de respecter le rôle d'acteurs économiques dominants mais s'éloignent insidieusement des revendications populaires qui les ont amenés au pouvoir.

    Constants dans leur pratique du double langage, ils font exactement le contraire de ce qu’ils proclament. En, Égypte, après avoir affirmé sur la Place Tahrir au printemps 2011 qu'ils n'aspiraient nullement au pouvoir, ils revendiquent aujourd'hui la présidence de la République, la majorité parlementaire et l'intégralité du pouvoir politique. En Tunisie, et après avoir officiellement renoncé à inclure la charia dans la constitution, ils organisent dans les provinces et les villes de moyenne importance, loin de l'attention des médias occidentaux, des comités de vigilance religieux pour faire appliquer des règlements inspirés de la charia.

    Ce mouvement gagne progressivement les villes de plus grande importance et même les capitales où se multiplient les mesures d'interdiction en tous genres, la censure des spectacles et de la presse, la mise sous le boisseau des libertés fondamentales et, bien sûr, des droits des femmes et des minorités non sunnites. Et ces forces politiques réactionnaires n'ont rien à craindre des prochaines échéances électorales.

    Largement financées par l'Arabie et le Qatar pour lesquels elles constituent un gage de soumission dans le monde arabe, elles ont tous les moyens d’acheter les consciences et de se constituer la clientèle qui perpétuera leur domination face à un paysage politique démocratique morcelé, sans moyens, dont il sera facile de dénoncer l'inspiration étrangère et donc impie. La Libye et le Yémen ont sombré dans la confusion. Après que les forces de l'OTAN, outrepassant largement le mandat qui leur avait été confié par l'ONU, ont détruit le régime du peu recommandable Colonel Kadhafi, le pays se retrouve livré aux appétits de bandes et tribus rivales bien décidées à défendre par les armes leur pré carré local et leur accès à la rente. L'éphémère « Conseil National de transition » porté aux nues par l'ineffable Bernard Henri Lévy est en train de se dissoudre sous les coups de boutoir de chefs de gangs islamistes, dont plusieurs anciens adeptes d'Al-Qaïda, soutenus et financés par le Qatar qui entend bien avoir son mot à dire dans tout règlement de la question et prendre sa part dans l’exploitation des ressources du pays en hydrocarbures.

    Au Yémen, le départ sans gloire du Président Ali Abdallah Saleh rouvre la porte aux forces centrifuges qui n'ont pas cessé d'agiter ce pays dont l'unité proclamée en 1990 entre le nord et le sud n'a jamais été bien digérée, surtout par l'Arabie Séoudite qui s'inquiétait des foucades de ce turbulent voisin et n'a eu de cesse d'y alimenter la subversion fondamentaliste. Aujourd'hui, les chefs de tribus sunnites du sud et de l'est du pays, dont certains se réclament d'Al-Qaïda et tous du salafisme, entretiennent un désordre sans fin aux portes de la capitale, Sanaa, fief d'une classe politique traditionnelle zaydite – branche dissidente du chiisme – insupportable pour la légitimité de la famille séoudienne. Seul le régime syrien résiste à ce mouvement généralisé d'islamisation au prix d'une incompréhension généralisée et de l'opprobre internationale.

    Avant de développer ce sujet, je crois devoir faire une mise au point puisque d'aucuns croient déceler dans mes propos et prises de positions des relents d'extrême droite et de complaisance pour les dictatures. Je me rends régulièrement en Syrie depuis 45 ans et y ai résidé pendant plusieurs années. Je ne prétends pas connaître intimement ce pays mais je pense quand même mieux le connaître que certains de ces journalistes qui en reviennent pleins de certitudes après un voyage de trois ou quatre jours.

    Mes activités m'ont amené à devoir fréquenter à divers titres les responsables des services de sécurité civils et militaires syriens depuis la fin des années 70. J'ai pu constater qu'ils ne font ni dans la dentelle ni dans la poésie et se comportent avec une absolue sauvagerie. Ce n'est pas qu'ils ont une conception différente des droits de l'homme de la nôtre. C'est qu'ils n'ont aucune conception des droits de l'homme…

    Leur histoire explique en grande partie cette absence. D'abord, ils puisent leur manière d'être dans quatre siècles d'occupation par les Turcs ottomans, grands experts du pal, de l'écorchage vif et du découpage raffiné. Ensuite, ils ont été créés sous la houlette des troupes coloniales françaises pendant le mandat de 1920 à 1943, et, dès l'indépendance du pays, conseillés techniquement par d'anciens nazis réfugiés, de 1945 jusqu'au milieu des années 50, et ensuite par des experts du KGB jusqu'en 1990. Tout ceci n'a guère contribué à développer chez eux le sens de la douceur, de la tolérance et du respect humain.

    Quant au régime syrien lui-même, il ne fait aucun doute dans mon esprit que c'est un régime autoritaire, brutal et fermé. Mais le régime syrien n’est pas la dictature d'un homme seul, ni même d'une famille, comme l'étaient les régimes tunisien, égyptien, libyen ou irakien. Tout comme son père, Bashar el-Assad n'est que la partie visible d'un iceberg communautaire complexe et son éventuel départ ne changerait strictement rien à la réalité des rapports de pouvoir et de force dans le pays. Il y a derrière lui 2 millions d'Alaouites encore plus résolus que lui à se battre pour leur survie et plusieurs millions de minoritaires qui ont tout à perdre d'une mainmise islamiste sur le pouvoir, seule évolution politique que l'Occident semble encourager et promouvoir dans la région.

    Quand je suis allé pour la première fois en Syrie en 1966, le pays était encore politiquement dominé par sa majorité musulmane sunnite qui en détenait tous les leviers économiques et sociaux. Et les bourgeois sunnites achetaient encore – parfois par contrat notarié – des jeunes gens et de jeunes filles de la communauté alaouite dont ils faisaient de véritables esclaves à vie, manouvriers agricoles ou du bâtiment pour les garçons, bonnes à tout faire pour les filles.

    Les Alaouites sont une communauté sociale et religieuse persécutée depuis plus de mille ans. Je vous en donne ici une description rapide et schématique qui ferait sans doute hurler les experts mais le temps nous manque pour en faire un exposé exhaustif. Issus au Xè siècle aux frontières de l'empire arabe et de l'empire byzantin d'une lointaine scission du chiisme, ils pratiquent une sorte de syncrétisme mystique compliqué entre des éléments du chiisme, des éléments de panthéisme hellénistique, de mazdéisme persan et de christianisme byzantin. Ils se désignent eux mêmes sous le nom d’Alaouites – c'est à dire de partisans d'Ali, le gendre du prophète - quand ils veulent qu’on les prenne pour des Musulmans et sous le nom de Nosaïris – du nom de Ibn Nosaïr, le mystique chiite qui a fondé leur courant – quand ils veulent se distinguer des Musulmans. Et – de fait – ils sont aussi éloignés de l'Islam que peuvent l'être les chamanistes de Sibérie. Et cela ne leur a pas porté bonheur….

    Pour toutes les religions monothéistes révélées, il n’y a pas pire crime que l'apostasie. Les Alaouites sont considérés par l'Islam sunnite comme les pires des apostats. Cela leur a valu au XIVè siècle une fatwa du jurisconsulte salafiste Ibn Taymiyya, l'ancêtre du wahhabisme actuel, prescrivant leur persécution systématique et leur génocide. Bien que Ibn Taymiyyah soit considéré comme un exégète non autorisé, sa fatwa n'a jamais été remise en cause et est toujours d'actualité, notamment chez les salafistes, les wahhabites et les Frères musulmans.

    Pourchassés et persécutés, les Alaouites ont dû se réfugier dans les montagnes côtières arides entre le Liban et l'actuelle Turquie tout en donnant à leurs croyances un côté hermétique et ésotérique, s'autorisant la dissimulation et le mensonge pour échapper à leurs tortionnaires. Il leur a fallu attendre le milieu du XXè siècle pour prendre leur revanche. Soumis aux occupations militaires étrangères depuis des siècles, les bourgeois musulmans sunnites de Syrie ont commis l'erreur classique des parvenus lors de l'indépendance de leur pays en 1943.

    Considérant que le métier des armes était peu rémunérateur et que l'institution militaire n'était qu'un médiocre instrument de promotion sociale, ils n'ont pas voulu y envoyer leurs fils. Résultat : ils ont laissé l'encadrement de l'armée de leur tout jeune pays aux pauvres, c'est à dire les minorités : Chrétiens, Ismaéliens, Druzes, Chiites et surtout Alaouites. Et quand vous donnez le contrôle des armes aux pauvres et aux persécutés, vous prenez le risque à peu près certain qu'ils s'en servent pour voler les riches et se venger d'eux. C'est bien ce qui s'est produit en Syrie à partir des années 60.

    Dans les années 70, Hafez el-Assad, issu d'une des plus modestes familles de la communauté alaouite, devenu chef de l'armée de l'air puis ministre de la défense, s'est emparé du pouvoir par la force pour assurer la revanche et la protection de la minorité à laquelle sa famille appartient et des minorités alliées – Chrétiens et Druzes - qui l'ont assisté dans sa marche au pouvoir. Ils s'est ensuite employé méthodiquement à assurer à ces minorités – et en particulier à la sienne - le contrôle de tous les leviers politiques, économiques et sociaux du pays selon des moyens et méthodes autoritaires dont vous pourrez trouver la description détaillée dans un article paru il y maintenant près de vingt ans.

    Face à la montée du fondamentalisme qui progresse à la faveur de tous les bouleversements actuels du monde arabe, son successeur se retrouve comme les Juifs en Israël, le dos à la mer avec le seul choix de vaincre ou mourir. Les Alaouites ont été rejoints dans leur résistance par les autres minorités religieuses de Syrie, Druzes, Chiites, Ismaéliens et surtout par les Chrétiens de toutes obédiences instruits du sort de leurs frères d'Irak et des Coptes d'Égypte.

    Car, contrairement à la litanie que colportent les bien-pensants qui affirment que « si l'on n'intervient pas en Syrie, le pays sombrera dans la guerre civile »…. eh bien non, le pays ne sombrera pas dans la guerre civile. La guerre civile, le pays est dedans depuis 1980 quand un commando de Frères musulmans s'est introduit dans l'école des cadets de l'armée de terre d'Alep, a soigneusement fait le tri des élèves officiers sunnites et des alaouites et a massacré 80 cadets alaouites au couteau et au fusil d'assaut en application de la fatwa d'Ibn Taymiyya.

    Les Frères l'ont payé cher en 1982 à Hama – fief de la confrérie - que l'oncle de l'actuel président a méthodiquement rasée en y faisant entre 10 et 20.000 morts. Mais les violences intercommunautaires n'ont jamais cessé depuis, même si le régime a tout fait pour les dissimuler. Alors, proposer aux Alaouites et aux autres minorités non arabes ou non sunnites de Syrie d'accepter des réformes qui amèneraient les islamistes salafistes au pouvoir revient très exactement à proposer aux Afro-américains de revenir au statu quo antérieur à la guerre de sécession. Ils se battront, et avec sauvagerie, contre une telle perspective.

    Peu habitué à la communication, le régime syrien en a laissé le monopole à l'opposition. Mais pas à n'importe quelle opposition. Car il existe en Syrie d'authentiques démocrates libéraux ouverts sur le monde, qui s'accommodent mal de l'autoritarisme du régime et qui espéraient de Bashar el-Assad une ouverture politique. Ils n'ont obtenu de lui que des espaces de liberté économique en échange d'un renoncement à des revendications de réformes libérales parfaitement justifiées.

    Mais ceux-là, sont trop dispersés, sans moyens et sans soutiens. Ils n'ont pas la parole et sont considérés comme inaudibles par les médias occidentaux car, en majorité, ils ne sont pas de ceux qui réclament le lynchage médiatisé du « dictateur » comme cela a été fait en Libye. Si vous vous vous informez sur la Syrie par les médias écrits et audiovisuels, en particulier en France, vous n'aurez pas manqué de constater que toutes les informations concernant la situation sont sourcées « Observatoire syrien des droits de l'homme » (OSDH) ou plus laconiquement « ONG », ce qui revient au même, l'ONG en question étant toujours l''Observatoire syrien des droits de l'homme. L'observatoire syrien des droits de l'homme, c'est une dénomination qui sonne bien aux oreilles occidentales dont il est devenu la source d'information privilégiée voire unique. Il n'a pourtant rien à voir avec la respectable Ligue internationale des droits de l'homme. C'est en fait une émanation de l'Association des Frères musulmans et il est dirigé par des militants islamistes dont certains ont été autrefois condamnés pour activisme violent, en particulier son fondateur et premier Président, Monsieur Ryadh el-Maleh. L'Osdh s’est installé à la fin des années 80 à Londres sous la houlette bienveillante des services anglo-saxons et fonctionne en quasi-totalité sur fonds séoudiens et maintenant qataris.

    Je ne prétends nullement que les informations émanant de l'OSDH soient fausses, mais, compte tenu de la genèse et de l'orientation partisane de cet organisme, je suis tout de même surpris que les médias occidentaux et en particulier français l'utilisent comme source unique sans jamais chercher à recouper ce qui en émane.

    Second favori des médias et des politiques occidentaux, le Conseil National Syrien, créé en 2011 à Istanbul sur le modèle du CNT libyen et à l'initiative non de l'État turc mais du parti islamiste AKP. Censé fédérer toutes les forces d'opposition au régime, le CNS a rapidement annoncé la couleur. Au sens propre du terme…. Le drapeau national syrien est composé de trois bandes horizontales. L'une de couleur noire qui était la couleur de la dynastie des Abbassides qui a régné sur le monde arabe du 9è au 13è siècle. L'autre de couleur blanche pour rappeler la dynastie des Omeyyades qui a régné au 7è et 8è siècle. Enfin, la troisième, de couleur rouge, censée représenter les aspirations socialisantes du régime. Dès sa création, le CNS a remplacé la bande rouge par la bande verte de l'islamisme comme vous pouvez le constater lors des manifestations anti-régime où l'on entend plutôt hurler « Allahou akbar ! » que des slogans démocratiques. Cela dit, la place prédominante faite aux Frères musulmans au sein du CNS par l'AKP turc et le Département d'État américain a fini par exaspérer à peu près tout le monde.

    La Syrie n'est pas la Libye et les minorités qui représentent un bon quart de la population entendent avoir leur mot à dire, même au sein de l'opposition. Lors d'une visite d'une délégation d'opposants kurdes syriens à Washington en avril dernier, les choses se sont très mal passées. Les Kurdes sont musulmans sunnites mais pas Arabes. Et en tant que non-arabes, ils sont voués à un statut d’infériorité par les Frères. Venus se plaindre auprès du Département d'État de leur marginalisation au sein du CNS, ils se sont entendus répondre qu'ils devaient se soumettre à l'autorité des Frères ou se débrouiller tout seuls. Rentrés à Istanbul très fâchés, ils se sont joints à d'autres opposants minoritaires pour démettre le président du CNS, Bourhan Ghalioun, totalement inféodé aux Frères, et le remplacer par un Kurde, Abdelbassett Saïda qui fera ce qu'il pourra – c'est à dire pas grand chose - pour ne perdre ni l'hospitalité des islamistes turcs, ni l'appui politique des néo-conservateurs Américains, ni, surtout, l'appui financier des Séoudiens et des Qataris.

    Tout cela fait désordre, bien sûr, mais est surtout révélateur de l'orientation que les États islamistes appuyés par les néo-conservateurs américains entendent donner aux mouvements de contestation dans le monde arabe. Ce ne sont évidemment pas ces constatations qui vont rassurer les minorités de Syrie et les inciter à la conciliation ou à la retenue. Les minorités de Syrie – en particulier, les Alaouites qui sont en possession des appareils de contrainte de l'État – sont des minorités inquiètes pour leur survie qu'elles défendront par la violence. Faire sortir le président syrien du jeu peut à la rigueur avoir une portée symbolique mais ne changera rien au problème. Ce n'est pas lui qui est visé, ce n'est pas lui qui est en cause, c'est l'ensemble de sa communauté qui se montrera encore plus violente et agressive si elle perd ses repères et ses chefs. Plus le temps passe, plus la communauté internationale entendra exercer des pressions sur les minorités menacées, plus les choses empireront sur le modèle de la guerre civile libanaise qui a ensanglanté ce pays de 1975 à 1990.

    Il aurait peut être été possible à la communauté internationale de changer la donne il y a un an en exigeant du pouvoir syrien des réformes libérales en échange d'une protection internationale assurée aux minorités menacées. Et puisque l’Arabie et la Qatar – deux monarchies théocratiques se réclamant du wahhabisme – sont théoriquement nos amies et nos alliées, nous aurions pu leur demander de déclarer la fatwa d'Ibn Taymiyyah obsolète, nulle et non avenue afin de calmer le jeu. Il n'en a rien été.

    À ces minorités syriennes menacées, l'Occident, France en tête, n'a opposé que la condamnation sans appel et l'anathème parfois hystérique tout en provoquant partout – politiquement et parfois militairement – l'accession des intégristes islamistes au pouvoir et la suprématie des États théocratiques soutenant le salafisme politique. Débarrassés des ténors sans doute peu vertueux du nationalisme arabe, de Saddam Hussein, de Ben Ali, de Moubarak, de Kadhafi, à l'abri des critiques de l'Irak, de l'Algérie et de la Syrie englués dans leurs conflits internes, les théocraties pétrolières n'ont eu aucun mal à prendre avec leurs pétrodollars le contrôle de la Ligue Arabe et d'en faire un instrument de pression sur la communauté internationale et l'ONU en faveur des mouvements politiques fondamentalistes qui confortent leur légitimité et les mettent à l'abri de toute forme de contestation démocratique.

    Que les monarchies réactionnaires défendent leurs intérêts et que les forces politiques fondamentalistes cherchent à s'emparer d'un pouvoir qu'elles guignent depuis près d'un siècle n'a rien de particulièrement surprenant. Plus étrange apparaît en revanche l'empressement des Occidentaux à favoriser partout les entreprises intégristes encore moins démocratiques que les dictatures auxquelles elles se substituent et à vouer aux gémonies ceux qui leur résistent. Prompt à condamner l'islamisme chez lui, l'Occident se retrouve à en encourager les manoeuvres dans le monde arabe et musulman.

    La France, qui n’a pas hésité à engager toute sa force militaire pour éliminer Kadhafi au profit des djihadistes et à appeler la communauté internationale à en faire autant avec Bashar el-Assad, assiste, l'arme au pied, au dépeçage du Mali par des hordes criminelles qui se disent islamistes parce que leurs rivaux politiques ne le sont pas. De même les médias et les politiques occidentaux ont assisté sans broncher à la répression sanglante par les chars séoudiens et émiratis des contestataires du Bahraïn, pays à majorité chiite gouverné par un autocrate réactionnaire sunnite. De même les massacres répétés de Chrétiens nigérians par les milices du Boko Haram ne suscitent guère l'intérêt des médias et encore moins la condamnation par nos politiques. Quant à l'enlèvement et la séquestration durable de quatre membres de la Cour Pénale Internationale par des « révolutionnaires » libyens, elle est traitée en mode mineur et passe à peu près inaperçue dans nos médias dont on imagine l'indignation explosive si cet enlèvement avait été le fait des autorités syriennes, algériennes ou de tel autre pays non encore « rentré dans le rang » des « démocratures », ces dictatures islamistes sorties des urnes.

    À défaut de logique, la morale et la raison nous invitent tout de même à nous interroger sur cette curieuse schizophrénie de nos politiques et nos médias. L'avenir dira si notre fascination infantile pour le néo-populisme véhiculé par Internet et si les investissements massifs du Qatar et de l'Arabie dans nos économies en crise valaient notre complaisance face à la montée d'une barbarie dont nous aurions tort de croire que nous sommes à l'abri.

     
    Posté par Jocegaly à -

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    Bonne lecture à tous,
    Françoise Lopez