• Les États-Unis ne sont pas une démocratie car ils ne l’ont jamais été


    Par Gabriel Rockhill – Le 13 décembre 2017 – Source CounterPunch

    L’une des croyances les plus fortes en ce qui concerne les États-Unis est qu’il s’agit d’une démocratie. Chaque fois que cette affirmation fait l’objet d’une légère mise en doute, c’est presque toujours pour signaler des exceptions préjudiciables aux valeurs ou aux principes fondamentaux américains. Par exemple, les critiques en herbe déplorent souvent une « baisse de la démocratie » due à l’élection d’autocrates clownesques, à des mesures draconiennes de la part de l’État, à la révélation de malversations ou de corruptions extraordinaires, à des interventions étrangères meurtrières ou à d’autres activités considérées comme des exceptions antidémocratiques. Il en va de même pour ceux dont le cadre critique consiste à toujours juxtaposer les actions du gouvernement américain à ses principes fondateurs, à mettre en évidence la contradiction entre les deux et à visiblement espérer sa résolution potentielle.

    Le problème, cependant, c’est qu’il n’existe pas de contradiction ou de prétendue perte de démocratie, parce que les États-Unis n’en ont jamais été une…

     

    Il s’agit d’une réalité difficile à affronter pour beaucoup de gens, probablement plus enclins à rejeter immédiatement une telle allégation comme absurde plutôt que de prendre le temps d’examiner le dossier historique pour s’en rendre compte par eux-mêmes. Une telle réaction de dédain est due en grande partie à ce qui est peut-être la campagne de relations publiques la plus réussie de l’histoire moderne. Ce que l’on verra au contraire, si cette assertion est sobrement et méthodiquement inspectée, c’est qu’un pays fondé sur une élite, une domination coloniale basée sur le pouvoir de la richesse. En bref une oligarchie coloniale ploutocratique a réussi non seulement à se vêtir de la belle parure « démocratique » pour se vendre aux masses, mais aussi à faire en sorte que ses citoyens, et bien d’autres, se soient tellement investis socialement et psychologiquement dans son mythe nationaliste d’origine qu’ils refusent d’entendre les arguments lucides et bien-documentés prouvant le contraire.

    Pour commencer à déciller nos yeux, nous allons observer, dans l’espace restreint de cet article, cinq arguments patents montrant que les États-Unis n’ont jamais été une démocratie (un argument plus soutenu et développé est disponible dans mon livre, « Counter-History of the Present »). Pour commencer, l’expansion coloniale britannique dans les Amériques ne s’est pas faite au nom de la liberté et de l’égalité de la population en général, ni de l’attribution du pouvoir au peuple. Ceux qui s’installèrent sur les rives du « nouveau monde » ne respectaient pas, à quelques exceptions près, le fait qu’il s’agissait d’un monde très ancien et qu’une vaste population indigène y vivait depuis des siècles. Dès que Colomb a débarqué, les Européens ont commencé à voler, asservir et tuer les habitants indigènes. La traite transatlantique des esclaves a commencé presque immédiatement après, ajoutant un nombre incalculable d’Africains à l’attaque génocidaire en cours contre la population indigène. En outre, on  estime que plus de la moitié des colons venus d’Europe pendant la période coloniale étaient de pauvres domestiques sous contrat, et que les femmes étaient généralement prises au piège de la servitude domestique. Plutôt qu’une terre de liberté et d’égalité, l’expansion coloniale européenne vers les Amériques a imposé une terre de colonisateurs et de colonisés, de maîtres et d’esclaves, de riches et de pauvres, de gens libres et bien d’autres qui ne l’étaient pas. Les riches constituaient en outre une minorité infiniment petite de la population, alors que l’écrasante majorité, c’est-à-dire « le peuple », était soumis à la mort, à l’esclavage, à la servitude ou à une oppression socio-économique incessante.

    Deuxièmement, lorsque la classe dirigeante coloniale a décidé de couper les liens avec sa patrie et d’établir un État indépendant pour elle-même, elle n’a pas créé une démocratie. Au contraire, elle était farouchement et explicitement opposée à la démocratie, comme la grande majorité des penseurs européens des Lumières. Ils pensaient qu’il s’agissait d’une forme dangereuse et chaotique de gouvernement par un peuple sans éducation. Pour les soi-disant « Pères fondateurs », les masses étaient non seulement incapables de gouverner, mais elles étaient considérées comme une menace pour les structures sociales hiérarchiques prétendument nécessaires à la bonne gouvernance. Selon les mots de John Adams, pour ne prendre qu’un seul exemple révélateur, si la majorité se voyait accorder un pouvoir réel, elle redistribuerait la richesse et dissoudrait la « subordination » si nécessaire à la politique. Lorsque les éminents membres de la classe des propriétaires fonciers se réunissent en 1787 pour rédiger une Constitution, ils insistent régulièrement dans leurs débats sur la nécessité d’établir une république qui tienne à distance la vile démocratie, jugée pire que « la saleté des égouts publics » par le rédacteur pro-fédéraliste William Cobbett. La nouvelle Constitution ne prévoyait que des élections populaires à la Chambre des représentants, mais dans la plupart des États, le droit de vote était fondé sur le fait d’être propriétaire foncier, et les femmes, les autochtones et les esclaves – c’est-à-dire la majorité écrasante de la population – étaient simplement exclus du vote. Les sénateurs étaient élus par les législateurs des États, le président par les électeurs choisis par les législateurs des États, et la Cour suprême nommée par le président. C’est dans ce contexte que Patrick Henry a catégoriquement proclamé le plus lucide des jugements : « Ce n’est pas une démocratie ». George Mason a clarifié la situation en décrivant le pays nouvellement indépendant comme « une aristocratie despotique ».

    Lorsque la république américaine a lentement été rebaptisée « démocratie », il n’y a eu aucune modification institutionnelle importante pour justifier ce changement de nom. En d’autres termes, et c’est le troisième point, l’utilisation du terme « démocratie » pour désigner une république oligarchique signifiait simplement qu’un mot différent était utilisé pour décrire le même phénomène fondamental. Cela a commencé à peu près à l’époque de la campagne présidentielle du « tueur d’indiens » Andrew Jackson, dans les années 1830. Se présentant lui-même comme un « démocrate », il a mis en avant une image de lui-même montrant un homme moyen, venant du peuple, qui allait mettre un terme au long règne des patriciens de Virginie et du Massachusetts. Lentement mais sûrement, le terme « démocratie » a été utilisé comme terme de relations publiques pour rebaptiser une oligarchie ploutocratique en un régime d’élus servant les intérêts du peuple ou demos [En grec ancien, NdT]. Pendant ce temps, l’holocauste indien se poursuivait sans relâche, ainsi que l’esclavage, l’expansion coloniale et la guerre de classe du haut vers le bas.

    Malgré certains changements mineurs au fil du temps, la république étasunienne a conservé intacte sa structure oligarchique, ce qui apparaît clairement dans les deux principaux arguments de vente de sa campagne publicitaire contemporaine pour la « démocratie ». L’establishment et ses propagandistes insistent régulièrement sur le fait qu’une aristocratie structurelle est une « démocratie » car celle-ci se définit par la garantie de certains droits fondamentaux (définition juridique) et la tenue d’élections régulières (définition procédurale). Il s’agit bien sûr d’une conception purement formelle, abstraite et largement négative de la démocratie, qui ne dit absolument rien sur le pouvoir réel et durable que les gens ont sur la gouvernance de leur vie. Cependant, même cette définition creuse dissimule la mesure dans laquelle, pour commencer, l’égalité supposée devant la loi aux États-Unis est en fait une inégalité devant la loi car des secteurs importants de la population sont exclus : les personnes considérées comme n’ayant pas droit aux droits, et celles considérées comme ayant perdu leur droit aux droits (les Amérindiens, les Afro-Américains et les femmes pendant la plus grande partie de l’histoire du pays, et encore aujourd’hui sous certains aspects, ainsi que les immigrants, les « criminels », les mineurs, les « cliniquement fous », les dissidents politiques, etc. En ce qui concerne les élections, elles se déroulent aux États-Unis dans le cadre de campagnes publicitaires à plusieurs millions de dollars dans lesquelles les candidats et les enjeux sont présélectionnés par l’élite politique et des affaires. La population générale, dont la majorité n’a pas le droit de vote ou décide de ne pas l’exercer, se voit accorder le « choix » – choix surveillé par un collège électoral non démocratique et enchâssé dans un système de représentation non proportionnel – de choisir un membre de l’élite aristocratique qu’elle aimerait pour les dominer et les  opprimer pendant les quatre prochaines années. Selon une importante et récente étude de Martin Gilens et Benjamin Page « les élites économiques et les groupes organisés représentant les intérêts des entreprises ont un impact important sur la politique du gouvernement américain, alors que les citoyens moyens et les groupes d’intérêts de masse ont peu ou pas d’influence. Les résultats apportent un soutien substantiel aux théories de la domination par une élite économique […], mais pas aux théories d’une démocratie électorale à la majorité ».

    Pour ne prendre qu’un dernier exemple parmi ceux innombrables montrant que les États-Unis ne sont pas, et n’ont jamais été, une démocratie, il convient de souligner leurs attaques permanentes contre les mouvements populaires. Depuis la Seconde Guerre mondiale, ils se sont efforcés de renverser une cinquantaine de gouvernements étrangers, dont la plupart avaient été démocratiquement élus. Ils ont également, selon les calculs méticuleux de William Blum dans son livre « America’s Deadliest Export : Democracy » [Le produit le plus meurtrier exporté par l’Amérique : la démocratie], grossièrement interféré dans les élections d’au moins 30 pays, tenté d’assassiner plus de 50 dirigeants étrangers, lâché des bombes sur plus de 30 pays, et tenté de réprimer les mouvements populaires dans 20 pays. Le bilan sur le front intérieur est tout aussi brutal. Pour ne prendre qu’un exemple parallèle significatif, il existe de nombreuses preuves que le FBI s’est investi dans une guerre clandestine contre la démocratie. À partir des années 1960 au moins, et probablement jusqu’ à aujourd’hui, le Bureau « a étendu ses opérations clandestines intérieures contre le parti communiste, consacrant ses ressources à saper le mouvement pour l’indépendance de Porto Rico ; le parti ouvrier socialiste ; le mouvement des droits civiques ; les mouvements nationalistes noirs ; le Ku Klux Klan ; des segments du mouvement pacifiste ; le mouvement étudiant et la ‘nouvelle gauche’ en général » (Cointelpro : « The FBI’s Secret War on Political Freedom » p. 22-23). Prenons, par exemple, le résumé de Judi Bari sur l’agression contre le Parti socialiste des travailleurs : « De 1943 à 1963, le procès civil fédéral Socialist Workers Party Vs Attorney General documente des décennies de cambriolages illégaux effectués par le FBI et 10 millions de pages de dossiers de surveillance. Le FBI a versé environ 1 680 592 dollars à 1 600 informateurs et a utilisé 20 000 jours d’écoute électronique pour miner cette organisation politique légitime. » Dans le cas du Black Panther Party et de l’American Indian Movement (AIM) – qui étaient tous deux d’importantes tentatives de mobilisation du pouvoir populaire pour démanteler l’oppression structurelle de la suprématie blanche et de la guerre de classe – le FBI non seulement les a infiltrés et a lancé des campagnes hideuses de calomnie et de déstabilisation contre eux, mais a aussi assassiné 27 Black Panthers et 69 membres de l’AIM (et a soumis bien d’autres à cette mort lente qu’est l’incarcération). Que ce soit à l’étranger ou sur le front intérieur, la police secrète américaine a fait preuve d’une grande réactivité pour réprimer les mouvements populaires en action, protégeant et préservant ainsi le principal pilier de la suprématie blanche, l’aristocratie capitaliste.

    Plutôt que de croire aveuglément en un âge d’or de la démocratie pour rester à tout prix dans la cage dorée d’une idéologie produite spécifiquement pour nous par les spin doctors bien payés d’une oligarchie ploutocratique, nous devrions ouvrir les portes de l’histoire et scruter méticuleusement la fondation et l’évolution de la république impériale américaine. Cela nous permettra non seulement de nous débarrasser de ses mythes jingoïste et auto satisfaits sur son origine, mais nous donnera aussi l’occasion de ressusciter et de réactiver une grande partie de ce qu’ils ont cherché à effacer. En particulier, il y a une Amérique radicale juste en dessous de la surface de ces récits nationalistes, une Amérique dans laquelle la population s’organise de façon autonome en activisme indigène et écologique, en résistance radicale noire, en mobilisation anticapitaliste, en luttes anti-patriarcales, etc. C’est cette Amérique que la république corporative cherche à éradiquer, tout en investissant simultanément dans une vaste campagne de relations publiques pour couvrir ses crimes avec la feuille de vigne « démocratique » (ce qui a parfois nécessité l’intégration de quelques individus symboliques, qui semblent venir d’en bas, dans la classe dirigeante de l’élite pour perpétuer le mythe tout-puissant de la méritocratie). Si nous sommes assez astucieux et perspicaces pour reconnaître que les États-Unis sont antidémocratiques aujourd’hui, ne soyons pas indolents ou mal informés au point de nous laisser endormir par les berceuses louant son passé mythique. En effet, si les États-Unis ne sont pas une démocratie aujourd’hui, c’est en grande partie parce qu’ils ne l’ont jamais été. Cependant, loin d’être une conclusion pessimiste, c’est précisément en ouvrant cette dure coquille de l’encapsulation idéologique que nous pouvons tirer parti des forces radicales qui ont été réprimées par elle. Ces forces, et non pas celles qui ont été déployées pour les détruire, devraient être la source ultime de notre fierté.

    Gabriel Rockhill est un philosophe franco-étasunien

    Note du Saker Francophone
    
    Pour la France, et pour ceux qui auraient encore des doutes, la meilleure citation est celle de l'abbé Sieyès:

    « Les citoyens qui se nomment des représentants renoncent et doivent renoncer à faire eux-mêmes la loi ; ils n’ont pas de volonté particulière à imposer. S’ils dictaient des volontés, la France ne serait plus cet État représentatif ; ce serait un État démocratique. Le peuple, je le répète, dans un pays qui n’est pas une démocratie (et la France ne saurait l’être), le peuple ne peut parler, ne peut agir que par ses représentants. » (Discours du 7 septembre 1789, intitulé précisément : « Dire de l’abbé Sieyès, sur la question du veto royal : à la séance du 7 septembre 1789 » cf. pages 15, 19…)

    Traduit par Wayan, relu par Cat pour le Saker Francophone


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  • 23/12/17

    Syrie - Agrandissement de la base navale russe de Tartous en Syrie: 11 navires de guerre russes pourront désomais s'y ancrer

    La Douma approuve l'agrandissement de la base navale russe de Tartous en Syrie

    La Douma approuve l'agrandissement de la base navale russe de Tartous en Syrie© Ministère de la Défense russe Source: Sputnik
    Le porte-avions amiral Kouznetsov en mer Méditerranée, près de la Syrie

    Si les troupes russes déployées pour combattre Daesh se sont retirées de Syrie, deux bases russe restent actives dans le pays. La chambre basse du Parlement vient de ratifier un accord passé avec Damas, autorisant l'extension de l'une d'elles.

    Les députés russes ont ratifié le 21 décembre un accord prévoyant l'agrandissement des installations portuaires militaires russes à Tartous, dans le nord-ouest de la Syrie.

    Sur : https://francais.rt.com/international/46737-douma-approuve-agrandissement-base-navale-russe-tartous-syrie

    Cette résolution avait été transmise à la chambre basse du Parlement russe, la Douma, par le président Vladimir Poutine, le 13 décembre. Elle fait suite à un accord passé en janvier dernier entre la Russie et la Syrie, par lequel Damas a donné son consentement à Moscou pour procéder à l'agrandissement de sa base navale et à l'amélioration des ses infrastructures. Selon cet accord, signé pour 49 ans et qui pourra être prolongé de 25 ans si les deux parties le souhaitent, jusqu'à onze navires de guerre russes pourront s'amarrer dans le port de Tartous, dont certains pourront être équipés de missiles nucléaires.

    Pour Leonid Sloutski, responsable du Comité des affaires internationales de Douma, la ratification de cet accord revêt «une importance stratégique». Le responsable précise qu'étant strictement défensif, il s'inscrit dans une logique de soutient de la paix dans la région.

    Cette annonce intervient alors que Vladimir Poutine a ordonné le 11 décembre le retrait de troupes russes engagées en Syrie pour combattre les djihadistes, tout en soulignant que cela ne concernait pas les troupes stationnées dans les bases de Hmeimim et Tartous, en Syrie. ( https://francais.rt.com/international/46737-douma-approuve-agrandissement-base-navale-russe-tartous-syrie )

    Poutine ordonne le retrait de tous les soldats russes de Syrie déployés contre les djihadistes

     
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  • 23/12/17

    Préparez-vous au choc : Israël, l’Arabie Saoudite et les Etats-Unis sont sur le point d’envahir la Syrie

     

    Préparez-vous au choc : Israël, l’Arabie Saoudite et les Etats-Unis sont sur le point d’envahir la Syrie

    Préparez-vous au choc : Israël, l’Arabie Saoudite et les Etats-Unis sont sur le point d’envahir la Syrie

    Par Alexander Orlov

    Le ministère russe de la Défense a récemment annoncé que les Etats-Unis entraînaient une nouvelle force armée dans l’ancien camp de réfugiés de la province d’El Khaseq, citant le Centre pour la réconciliation syrienne. On pense que cette force sera utilisée pour tenter de renverser le gouvernement syrien dirigé par le président Bachar al-Assad. Ce qui est encore plus curieux, c’est que les miliciens de l’Etat islamique en Irak et en Syrie (l’EI) et Jabhat al-Nusra vont former l’épine dorsale de cette force militaire. La coalition occidentale menée par les États-Unis poursuit sa tentative d’utiliser des groupes de milices radicales en Syrie, malgré les déclarations répétées selon lesquelles elle est sensée s’être engagée dans la région pour combattre de telles milices. Selon les informations fournies par le Centre pour la réconciliation syrienne, les instructeurs des forces spéciales américaines forment de nouvelles unités armées à partir de groupes de terroristes dispersés. Les résidents locaux rapportent que la coalition occidentale utilise ce qui était un camp de réfugiés depuis six mois pour créer une nouvelle force armée, amenant des combattants à El Khaseq à partir de différentes parties de la Syrie. Selon le ministère russe de la Défense, quelque 750 terroristes sont arrivés de Raqqa, Deir ez-Zor, Abu Kamal et des territoires situés à l’est de l’Euphrate. La nouvelle colonne vertébrale du groupe se compose de plus de 400 membres de l’EI, des combattants endurcis qui, grâce au soutien des États-Unis, ont quitté Raqqa en octobre dernier sans trop de difficultés. On s’attend à ce que cette unité armée soit bientôt déployée dans le sud de la Syrie pour affronter les forces gouvernementales. Plus tôt, les médias russes avaient annoncé que le porte-parole du ministère russe de la Défense, Igor Konashenkov avait accusé le Pentagone de mentir à la communauté internationale au sujet des plans de Washington sur le retrait des forces américaines de la Syrie. Selon le chef du département américain de la Défense, James Mattis, les forces de l’EI sont vaincues en Syrie, mais la guerre n’est pas encore terminée.

    Il est curieux qu’en ce qui concerne des camps d’entraînement similaires pour les forces combattantes à travers la Syrie et au-delà de ses frontières, il y en ait bien plus d’une douzaine, dont un certain nombre en Jordanie. Ces camps sont utilisés par divers services de renseignements, y compris des organisations iraniennes, américaines et même turques. Chaque agence poursuit ses propres objectifs. Cela s’inscrit dans le contexte de la récente déclaration faite par le président russe Vladimir Poutine à la base militaire de Hmeymim concernant la réduction prévue de la présence militaire de Moscou en Syrie. A son tour, Washington s’emploie à préparer « ses propres » miliciens pour combattre Assad, profitant de ce qu’il espère être un vide sécuritaire une fois que la Russie se sera retirée. En outre, l’Arabie Saoudite et Israël ne cachent pas leur intention de frapper les forces iraniennes et du Hezbollah dans le sud de la Syrie en même temps qu’ils lanceraient une opération militaire dans le sud du Liban. On s’attend à ce que Washington soutienne ces actions en fournissant un soutien aérien rapproché aux forces saoudiennes et israéliennes en Syrie. C’est pourquoi des combattants de la soi-disant armée syrienne libre, formée de déserteurs de l’armée syrienne, s’entraînaient en Jordanie. Les frappes à l’intérieur du territoire syrien doivent être lancées de plusieurs directions – à partir de la zone du plateau du Golan occupée par Israël, de l’autre côté de la frontière libanaise une fois que le Liban sera infiltré par les forces israéliennes, et de l’autre côté de la frontière jordanienne. Il est curieux de constater qu’il n’y a plus que 100 kilomètres à parcourir depuis la frontière jordano-syrienne jusqu’à Damas, et que plus de la moitié de ce territoire est déjà occupé par des forces armées d’opposition. Il n’est pas exclu que des forces kurdes pro-américaines du SDF frappent Damas depuis l’est, bien que cette mesure puisse provoquer un scandale à Ankara, qui cherche à empêcher toute forme d’expansion kurde en Syrie. Des attaques spontanées peuvent également être lancées à partir de camps de réfugiés, où des terroristes de l’EI sont entrainés, comme l’a annoncé le ministère russe de la Défense.

    Si les événements commencent à se dérouler selon ce scénario avec le départ du corps d’aviation russe, Damas se retrouvera piégée par ses adversaires. Après tout, l’armée syrienne libre a récemment atteint le chiffre de 30 000. Il y a 25 000 autres membres de l’Etat Islamique qui sont dispersés le long de l’Euphrate et se cachent à Idlib. Dans le sud-ouest, il y a encore 10 000 activistes antigouvernementaux prêts à intervenir. Quant à Damas, elle n’a pas plus de 40 000 soldats à sa disposition, soutenus par près de 40 000 soldats iraniens et des miliciens chiites venus d’Irak, d’Iran, d’Afghanistan et du Pakistan. Quant à l’armée de l’air syrienne, elle a été sérieusement diminuée par le conflit en cours, tandis que les États-Unis, Israël et l’Arabie Saoudite conservent une formidable puissance aérienne. En outre, Riyad est en train de mettre sur pied une coalition militaire contre la Syrie à partir d’une longue liste de pays arabes, dont les Émirats Arabes Unis, la Jordanie et l’Égypte. De ce fait, le gouvernement syrien se trouve clairement dans une position désavantageuse avec l’Iran et le Hezbollah.

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    En fait, l’annonce faite par le ministère russe de la Défense ne contenait pratiquement aucune nouvelle révolutionnaire, à l’exception de l’annonce que ces camps recrutaient des terroristes. Tous les États engagés dans le conflit syrien ont défendu leurs propres intérêts entre 2011 et 2015, avant l’arrivée des forces russes. Cette lutte a consisté à former des forces combattant en tant que proxies pour des acteurs extérieurs. Les ennemis de la Syrie étaient mieux financés, armés et organisés, capables d’utiliser efficacement une grande quantité de ressources étrangères. C’est pourquoi la balance a commencé à basculer contre Damas il y a trois ans. En 2015, la Russie est entrée en guerre, brisant le dos des combattants anti-gouvernementaux, mais ce succès n’est pas automatiquement synonyme de victoire. En fait, la victoire est loin d’être acquise pour Damas. Ce que Moscou pourrait faire à cette fin, c’est de détruire l’économie parallèle créée par les forces antigouvernementales, ce qui pourrait rendre la lutte contre Damas à la fois extrêmement coûteuse et très peu rentable. La guerre est une entreprise, même si elle est sanglante, et le fait d’en supprimer les profits supprime le motif qui pousse à la faire.

    En fait, l’Union Soviétique était pleinement consciente du fait que si l’on veut avoir des pays alliés forts, il faut une base économique solide sur laquelle ces alliés puissent s’appuyer. À l’époque, un certain nombre de pays arabes, africains et asiatiques recevaient une aide économique pour disposer de forces militaires durables. Pour diverses raisons, ce travail n’a pas toujours été couronné de succès, mais les avantages d’une telle stratégie sont indéniables. La Russie moderne n’a pas passé beaucoup de temps à faire cela, en grande partie à cause de l’absence d’idéologie commune, car à l’époque soviétique Moscou croyait qu’il était de son devoir de soutenir les mouvements nationaux de libération visant à obtenir certains avantages sociaux pour le gouvernement et son peuple. Mais même aujourd’hui, Moscou tente de rendre ses alliés hautement autosuffisants, mais le problème est que sans l’appui direct de la Russie, ils sont encore capables de survivre économiquement.

    C’est là, en fait, que se trouve la réponse à toutes sortes de questions et d’affirmations concernant la fin de la guerre en Syrie. Il ne fait aucun doute que les États-Unis, l’Occident dans son ensemble et les acteurs régionaux locaux comme l’Arabie Saoudite, Israël, l’Iran et la Turquie poursuivront leur politique, y compris par l’intermédiaire de leurs proxies. Il n’est possible de s’opposer à un tel jeu qu’à travers une politique symétrique de renforcement du gouvernement Assad ou de créer à sa place un gouvernement plus compétent qui bénéficierait d’un soutien plus populaire. En l’absence d’une telle politique, attirer l’attention sur les actions illégales des États-Unis n’est qu’une distraction par rapport aux problèmes plus vastes de la Syrie. Les États-Unis se comportent comme bon leur semble, car ils se battent pour leurs propres intérêts, ignorant totalement les normes internationales ou le droit international.

    En fait, le droit international a été piétiné par Washington lui-même d’abord en Yougoslavie, puis sévèrement malmené en Irak et finalement enterré sous les « révolutions de couleur » d’Egypte, du Yémen, de Libye, de Syrie, de Géorgie, d’Ukraine et de Moldavie. Cela signifie que les États-Unis vont poursuivre sans vergogne leurs intérêts en Syrie et au Moyen-Orient. Bien entendu, Washington a désespérément besoin de garder sous son contrôle la première région productrice de pétrole et de gaz de la planète, de garder son contrôle sur les principales routes maritimes entre l’océan Indien et l’Atlantique, de garder sa main sur le flux des marchandises de l’Europe vers l’Asie et vice versa. C’est pourquoi les États-Unis vont s’opposer de toutes les manières possibles à une influence russe croissante au Moyen-Orient. Cela signifie qu’il bloquera l’approvisionnement de l’UE en gaz russe par voie terrestre à partir du sud – via la Turquie, la Syrie, que ce soit le « Turkish flow » ou le « Southern stream » à travers l’Azerbaïdjan, l’Iran, l’Irak et la Syrie vers la côte méditerranéenne et plus loin vers la Grèce et l’Italie. Mais il n’y a pas de lutte idéologique, il n’y a que le pragmatisme pur et égoïste. Tant que la Russie sera sur le chemin de Washington, elle ne pourra pas résister à la Chine, et faire dérailler un projet comme One Belt, One Road.

    Et alors que le président Poutine tente de se retirer du conflit syrien le plus rapidement possible, la tâche de l’Occident est le contraire : entraîner Moscou dans les affaires du Moyen-Orient, en Syrie, en Égypte, en Libye et au Soudan, tout en atteignant ses propres objectifs, dont le renversement du président Assad. Cela explique l’échec perpétuel des négociations de Genève. Ce n’est pas un hasard si le vice-ministre russe des affaires étrangères, M. Gennadiy Gatilov, a commenté la déclaration de l’opposition syrienne appelant à la démission obligatoire du Président de la République arabe syrienne. Selon M. Gatilov, l’opposition syrienne continue d’insister sur la démission du président Assad, bien que toutes les parties aient convenu plus tôt qu’il n’y aurait pas de conditions préalables aux négociations. Le vice-ministre des Affaires étrangères du ministère russe des Affaires étrangères a fait remarquer qu’il s’agissait là d’un embarras sérieux. De l’avis de Gatilov, la réaction que l’opposition syrienne attend dans ce cas de la délégation syrienne n’est pas claire. Par conséquent, les pourparlers se sont en partie déroulés sans la participation du gouvernement syrien, car il a qualifié les revendications de l’opposition d’inacceptables. Les jeux dans le processus de paix sont donc terminés. Une nouvelle guerre est inévitable.

    Les commandants des « Tigres » syriens, une unité des forces spéciales qui reste la meilleure à la disposition de Assad, n’ont pas cherché à dissimuler leur irritation lorsque les milices pro-Damas de la brigade Fatemiyoun et Liwa al-Qods ont cédé un certain nombre de positions entre Mayadin et Abou Kamal, qui avaient été libérées par les Tigres au prix d’énormes pertes. Et l’on peut facilement comprendre leur position, à mesure que l’EI intensifie ses opérations, les forces syriennes ont peu ou pas de soutien aérien sur lequel compter. C’est pourquoi les forces syriennes et iraniennes ont subi des pertes extrêmement élevées ces derniers temps. En deux jours à peine, ils ont perdu plus de 100 hommes, tandis que les forces pro-Damas continuent d’abandonner des territoires et des positions.

    L’Iran a constitué deux divisions, la Brigade Fatemiyoun et Zeynabiyun avec des combattants chiites d’Afghanistan et du Pakistan, respectivement. La direction et la formation de ces unités sont confiées aux forces spéciales iraniennes de la division Al-Qods du Corps des Gardiens de la Révolution islamique sous la direction du général Kasem Sulejmani. Sur le territoire iranien, il y a jusqu’ à un million de réfugiés afghans et pakistanais, et les dirigeants iraniens tentent d’employer ces personnes. La guerre en Irak et en Syrie exige d’énormes ressources humaines, c’est pourquoi les réfugiés afghans et pakistanais se sont retrouvés impliqués. En situation particulièrement difficile, les gens sont généralement forcés d’accepter de signer un contrat. Les citoyens iraniens servent également de mercenaires, et une grande partie d’entre eux partent en guerre à peu près de la même manière: parmi eux, il y a de nombreux délinquants ordinaires. Il est clair que le moral de tous ces gens est extrêmement bas et que, par conséquent, ils se battent mal. Ce qui est pire, c’est que les Syriens d’origine non alaouite ne sont pas aussi désireux de se battre, de sorte que le début imminent d’une nouvelle campagne anti-Damas ne laisse pas beaucoup d’espoir pour la paix dans ce pays déchiré par la guerre.

     Source : https://journal-neo.org/2017/12/19/israel-saudi-arabia-and-the-us-are-about-to-invade-syria/

     

    Sur:    http://reseauinternational.net/preparez-vous-au-choc-israel-larabie-saoudite-et-les-etats-unis-sont-sur-le-point-denvahir-la-syrie/

     
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  • Que faire pour s’émanciper de notre système de domination ?


    Par Alban Dousset − Le 8 décembre 2017 − Source Youtube

    Nous vous avons déjà proposé quelques vidéos de ses chroniques citoyennes où il se construit comme citoyen pour comprendre un monde qui échappe. Aujourd’hui, il se propose de vous donner  quelques conseils sur ce que chacun d’entre nous peut faire en 2018 pour aider les gens autour de lui à ouvrir les yeux sur une réalité plus complexe qu’il n’y parait.